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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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variable était la liberté ou la capacité de s’organiser ainsi. Or, avant 1914, cette possibilité n’existe que dans certaines possessions anglaises, françaises ou russes — pas toutes. Quelques organisations réussissent ainsi à se développer.
    Dans l’Empire britannique, c’est le Parti du Congrès , fondé à Bombay, en 1885, par un Anglais et un Écossais, qui hérite de multiples organisations indiennes, animées essentiellement par des juristes, hindous et musulmans. N’étant pas religieux à l’origine, il n’a pas la même popularité que d’autres organisations, mais son efficacité le rendit célèbre assez rapidement, et son extension, ensuite, fut foudroyante. L’autre exemple, dans l’Empire, fut le Wat’ani , ce parti nationaliste égyptien d’où devait être issu le Wafd , en 1918, « délégation » de plusieurs groupements politiques. Sur ce modèle se fonde le Destour , en Tunisie, grâce à l’action d’Abd el-Aziz Taalbi, un prédicateur de la mosquée Zitouna, qui appelle l’élite à rejeter la colonisation française (1908).
    Ce sont les partis politiques, également, qui donnent à l’Islam, notamment en Russie, sa forme organisationnelle la plus efficace. Comme en Tunisie, la fascination exercée par le renouveau turc est à l’origine de la première organisation politique musulmane, l’ Al-Hidad al-Mislimin , dont le mode de fonctionnement est calqué sur le Parti K.D. russe (constitutionnel-démocrate). Il s’agit de réformistes, que dépassent rapidement les Jeunes-Tatars (1906) créés à l’initiative des Jeunes-Turcs chez qui s’alliaient l’idéologie religieuse et l’idéologie socialiste. Un exemple frappant de parti politique où l’idéologie religieuse, le nationalisme et le socialisme s’associent est la secte des Vaïssites de Kazan, groupe dissident d’une confrérie soufie, à la fois conservateur et allié des bolcheviques, en 1905. Plus important, sur le modèle social-démocrate, est le parti Hümmet , fondé à Bakou, la seule organisation sur une base nationale, patronnée par le Parti social-démocrate russe ; alors que celui-ci n’acceptait pas, au nom de l’internationalisme, de tels groupements ; il la toléra, comme il avait dû tolérer l’existence du Bund juif.
    C’est désormais le modèle social-démocrate qui l’emporte en Asie, jusqu’au Japon et aux Philippines, où il est en concurrence avec d’autres. Mais la révolution russe de 1917 tout comme le mouvement national arabe et le panafricanisme apportent à ces différentes organisations un souffle et une vision globale de l’histoire qui leur faisaient encore défaut, et ont contribué largement, chacun à sa manière, à l’émancipation des peuples colonisés.
    Les mouvements indépendantistes arabes
    Un des paradoxes de la montée des mouvements indépendantistes dans les pays arabes, avant comme aprèsl’occupation de certains d’entre eux par l’Europe, est bien que l’affirmation de leur volonté ou de leurs droits a pu s’accompagner d’une interrogation sur leur propre identité. Du temps des Ottomans, l’émergence d’un sentiment national, en Égypte surtout, puis en Syrie, s’accompagne d’une autonomisme de fait, dont la condition est l’union de tous face au sultan, c’est-à-dire l’oubli des différences entre chrétiens et musulmans. Le sentiment de la terre natale, de la patrie ( watan ) l’emporte sur l’Islam, la langue arabe, sa culture créant une solidarité active entre les divers habitants d’un même pays… Car, peu à peu, durant ces siècles du règne des Ottomans, une sorte de déconstruction de l’Empire s’est lentement opérée, plus visible dans les parties chrétiennes de l’Empire, c’est-à-dire dans les Balkans, que dans ses parties musulmanes. Au XIX e  siècle l’Islam serait-il devenu alors, ou plutôt redeviendrait-il la sauvegarde de la puissance de l’Orient, de sa défense contre l’Occident, et l’essence même du monde arabe ? Mais, sous la domination des Ottomans, l’enseignement du Coran ne s’est-il pas fourvoyé, et n’est-ce pas le retour à l’Islam des origines qui restituera aux Arabes leur vraie liberté ? Telle est l’alternative qui, celle-là, rejette l’État-nation comme cadre d’une authentique renaissance.
    Cette ambiguïté ou ce désaccord ne sont pas levés avec l’irruption de l’Occident, en Algérie d’abord (1830), en Égypte ensuite (1882) ; la

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