Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
populaire dont bénéficie bientôt son gendre, Soekarno ; il regarde vers un Islam moderniste, ou plutôt une modernité islamique, telle qu’elle semble naître au Caire. Une des branches du mouvement devient sociale-démocrate, puis fonde le Parti communiste en 1921. Elle regroupe les Abengan , dont l’Islam est le principe, alors que les dévots, ou Santri , demeurent au Sarekat Islam . Soekarno oscille entre ces courants : « Ce n’est pas un envoyé de Moscou ou un calife d’Islam qui apportera l’indépendance. »
L A RECHERCHE D ’ UN MODÈLE ORGANISATIONNEL
Le nationalisme est né d’une cristallisation des sentiments dus à la présence étrangère dans des ensembles qui ont été regroupés artificiellement par l’occupant, par exemple par les Hollandais en Indonésie, les Français ou les Anglais en Afrique noire, etc. Au contraire, le nationalisme allait de soi dans des pays tels que le Maroc, qui ont une existence commune ancienne, même si elle est longtemps demeurée conflictuelle, entre « Berbères » et « Arabes », entre « Maghzen » et « Siba »… L’origine du nationalisme proprement dit, ou salafisme , a été une sorte de combinaison entre le refus du compromis avec l’étranger et une rupture totale avec le passé.
L’exemple de l’Afrique du Nord est là pour témoigner que c’est tantôt l’Islam, tantôt le sentiment d’appartenir au monde arabe, tantôt un patriotisme plus directement lié à la terre natale, qui a servi de levain au soulèvement populaire. On retrouve le même va-et-vient en Indonésie où, en 1926, Soekarno écrit Nationalisme, Islam, Marxisme , ambitionnant de réunir ces trois forces qui constituent les leviers de la liberté. Mais c’est l’Islam le précurseur.
Au Vietnam, vieil État-nation dont l’identité s’est forgée dans la lutte contre la volonté dominatrice des Chinois, le nationalisme allait de soi, aussi. C’est pourtant sur l’exemple chinois qu’au Vietnam, comme en Corée, le mouvement national s’est appuyé en empruntant ses slogans à Sun Yat-sen et Chen Du Xiu.
Soyez indulgents, non serviles,
Soyez progressistes, non conservateurs,
Soyez agressifs, ne soyez pas sur la défensive,
Soyez cosmopolites, ne vous isolez pas du monde,
Soyez utilitaires, ne soyez pas conformistes.
Ces mots d’ordre que les communautés chinoises, d’étudiants notamment, répètent entre la révolution de 1911 et le mouvement du 4 mai 1919, repris par les Vietnamiens, montrent bien la greffe de la Chine et de son nationalisme sur les idées occidentales. Mais le nationalisme du Sud-Est asiatique emprunte aussi son élan et sa force au Japon ; car ce pays a donné le triple exemple de la fermeture, de la modernisation, de l’humiliation infligée à l’impérialisme européen. Il a su appliquer cette maxime, au reste chinoise, « la morale orientale comme fondement, la science occidentale comme instrument ». C’est en Chine et au Japonque s’instruisirent les nationalistes de Corée, du Vietnam, tel Phan Boi Chau, etc.
Ainsi, en Asie orientale, le nationalisme chinois et japonais a nourri et animé des mouvements anticolonialistes qui avaient pu naître dans le giron de l’Islam (Indonésie), du bouddhisme (Birmanie), à moins de revigorer des mouvements paysans et religieux (caodaistes au Vietnam) qui s’appuyaient sur une tradition patriotique déjà éprouvée.
Mais ces mouvements n’aboutissaient pas à l’expulsion des étrangers, de sorte que ce sont d’autres idées, occidentales, mais organisationnelles surtout, qui ont permis leur transfiguration par la constitution de partis politiques, ces leviers, dont le Kuo-min-tang a été le premier exemple.
Ils se sont inspirés de modèles qui ont exercé leur fascination, pas tant pour le contenu de leur programme que pour leurs techniques politiques qui montraient leur efficacité. Les partis anglais ou français de la fin du XIX e siècle et du début du XX e étaient un exemple. Modèle également, le parti ou mouvement Jeune-Turc , dans le monde musulman, mais plus encore les partis sociaux-démocrates — ce qui ne signifiait pas nécessairement une adhésion à leur programme, au socialisme. Ultérieurement, le modèle organisationnel bolchevique fut imité par toute une série de partis politiques, les uns communistes, par conséquent adhérents au Komintern, les autres pas, telle L’Étoile nord-africaine , de Messali Hadj.
La deuxième
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