Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
Valignano rédigea un ouvrage destiné à établir les principes de l’évangélisation du pays : Advertimentos e avisos acerca dos costumes y catangues de Jappâo ( XVI e s.), où il formulait des recommandations : salutations, manières de table, contacts entre personnes habitant la même maison, etc., consignes précises et minutieuses qui partaient de l’idée qu’il fallait prendre conscience du jeu des statuts sociaux, et prendre même exemple sur le comportement des prêtres zen.
Le père Valignano avait compris qu’il fallait que les missionnaires s’adaptent au style de vie du pays. Mais le pouvoir jugeait que, dans une société shintoïste, le christianisme était une religion « aberrante », dangereuse pour l’identité des habitants, et, à terme, pour le pouvoir en son principe (kogi) , l’autorité suprême contrôlée au sommet par Hideyoshi. Après sa mort, une phrase des Espagnols mit en alerte son successeur, Tokugawa Ieyasu. Lors d’une audience accordée le 5 octobre 1604 aux envoyés du gouvernement de Manille, on releva le texte suivant qui se trouvait dans la lettre du gouverneur de Manille : « Dans notre pays, la Castille, l’Empereur et tout le peuple adorent Dieu. La visite de Pères dans votre pays n’est pas motivée par la recherche futile de l’or et des bijoux, mais par le désir de répandre l’enseignement de Dieu pour le salut des âmes… »
« N’était-ce pas, interrogea un érudit japonais, pour travailler au déclin du pays, au renversement du régime ? »
Le 1 er février 1614, une ordonnance du Bakufu , le système shogunal, décidait l’expulsion de ces missionnaires, venus sous le prétexte de faire du commerce, mais qui en vérité cherchaient à détruire la foi bouddhique et à changer la loi politique au Japon.
Deux décennies plus tard, le pays se fermait à l’Occident (1639).
Entre-temps, devant les troubles dont les groupes de chrétiens pouvaient être à l’origine, il fut envisagé de s’allier aux Hollandais pour monter une expédition punitive sur les Philippines.
En France, la pêche ou l’aventure ?
En France, c’est la pêche à la morue, plus que le goût de l’aventure ou la lutte contre l’Islam, qui a été à l’origine de la première colonisation aux Amériques. C’est la pêche également qui provoque des conflits entre marins olonnais, basques, bretons, castillans. Dès 1497, Christophe Colomb avait dû s’abriter contre eux à Madère. Au reste, François I er demande à voir « la clause du testament d’Adam » qui, selon la Papauté, l’a exclu du partage du monde. En fait, pendant longtemps, les moyens ont manqué pour monter un grand dispositif commercial, et au XVI e siècle nul n’en a vraiment l’idée. Il a fallu que la guerre de course survienne pour que Saint-Malo, Nantes, etc., prennent leur élan, mais plusieurs décennies après le Portugal et l’Espagne, et avec moins de détermination que l’Angleterre. Il fallait surtout que l’État soit possédé du désir d’avoir des colonies.
Au vrai, à l’époque des guerres de Religion et de la lutte contre l’Espagne ou l’Angleterre, les objectifs de la guerre coloniale sont purement militaires. Certes, au Canada, les premières aventures d’exploration financées par François I er ouvrent la voie à Jacques Cartier qui, en 1535, découvre la route du Saint-Laurent, cette voie depénétration qu’il croit vers le Japon — cf. le nom « La Chine » donné aux chutes. Une situation qui demeure jusqu’à ce que Champlain pose les jalons d’un véritable établissement colonial, dans un esprit antianglais. Mais c’est la pêche qui alimente le peuplement, et bientôt le commerce des fourrures prend sa relève.
Déjà Anglais et Français cherchent à s’appuyer sur différentes tribus indiennes — à moins qu’ils ne les combattent tout en voulant simultanément les convertir. La mesure de ces établissements est dite quand on rappelle qu’à l’époque de Richelieu, c’est-à-dire des luttes entre Iroquois, alliés aux Anglais, et Hurons, alliés aux Français, Québec compte entre 60 et 100 habitants — et Boston, 2 000.
Sur les premières réactions des Indiens à l’arrivée des Français, on sait peu de chose, sinon par une tradition orale qui s’est peu à peu détériorée et qu’a analysée G. Trigger. Montagnais et Micmacs crurent que leurs vaisseaux étaient des îles flottantes, la
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