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Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle

Titel: Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Ferro
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Anglais avaient plus ou moins laissé faire, estimant que Dupleix s’enferrait dans les querelles interindiennes. Mais la marche de Muzaffer et de Bussy sur lacapitale du Dekkan amena le gouverneur anglais Thomas Saunders à mettre le holà, et désormais Dupleix le rencontra sur sa route, tant en Dekkan qu’en Carnatic, un ensemble de territoires qui constituait une proie trop énorme pour les Français.
    L’Inde à l’époque de la rivalité franco-anglaise

Source : D’après l’Atlas Hachette,
Histoire de l’humanité , © Hachette, 1992.
    Selon le jugement de Marc Vigié dans son ouvrage sur Dupleix, certes, celui-ci fut à la fois l’inventeur de l’armée coloniale et le promoteur d’une politique nouvelle ; mais il pécha par aveuglement, et son anglophobie se révéla maladive. « L’Angleterre a conduit dans l’Inde la nation portugaise sous l’esclavage, l’hollandaise baisse le col et subira bientôt le joug. Elle souhaite nous soumettre aussi », écrit-il ainsi. Le réalisme prudent de ses supérieurs, à Paris, lui parut être une preuve de faiblesse, un manque de patriotisme, une trahison.
    De ce point de vue aussi, Dupleix fut un précurseur, car c’est à la suite de son rappel et de ses échecs que naît le mythe de « l’Inde perdue », que « nous ont prise les Anglais », alors qu’en vérité ce fut son action qui les amena à réagir quand ils n’étaient pas vraiment disposés à la conquérir. Approuvé par les uns, tel l’abbé Raynal, critiqué par ceux qui s’opposent à la politique coloniale du roi, tel Voltaire, Dupleix devint un héros lorsque la France voulut se redonner un Empire, après 1870, et que son souvenir (comme celui de Montcalm) ressuscita la haine des Anglais : entre 1881 et 1913 furent publiés quinze ouvrages sur Dupleix et la Compagnie française des Indes.
     
     
    En Amérique du Nord, la rivalité franco-anglaise oppose, cette fois, des colons à d’autres colons. Mais la différence essentielle entre leur situation réciproque est que, globalement, côté français, la métropole s’intéresse peu à leur sort, alors que Londres, au contraire, est très actif dans la défense des anglophones d’Amérique. Pourquoi cette différence ?
    D’abord parce que, pour l’opinion française, la mise en valeur de ces régions ne présente qu’un intérêt limité. « Que valent ces arpents de neige ? » interroge Voltaire, tandis que le ministre Choiseul en 1758 juge aussi qu’une lieue carrée aux Pays-Bas vaut mieux que tout le Canada. « Le degré sous lequel cette colonie est située, écrit un peu plus tard le comte Jean-Frédéric de Maurepas, ne peut pas lui procurer la même richesse qu’aux îles d’Amérique. Les cultures qui s’y pratiquent sont les mêmes qui se font dans le royaume, excepté le vin. » Ce sont des vues de terriens. Et pendant la guerre de Sept Ans, lorsque le marquis de Montcalm lance un appel au secours après la chute de Fort Frontenac, le ministre de la Marine, N.R. Berryer, lui répond : « Quand le feu est à la maison, on ne s’occupe pas des écuries. »
    Les Anglais, au contraire, ont une autre vision de l’Amérique du Nord. Pour eux, les colons constituent une main-d’œuvre et une clientèle qui leur expédient des matières premières à bon compte (bois, surtout) et desfourrures, et à qui ils vont vendre des produits manufacturés. Le système dit de « l’exclusif » doit ainsi fonctionner à l’avantage des entrepreneurs anglais — mais à condition que les colons d’Amérique ne fabriquent rien eux-mêmes, « pas même un clou », et qu’ils achètent ces produits en Grande-Bretagne.
    Le gouvernement anglais ne cesse ainsi d’envoyer outre-mer des colons, alors que les Bourbons de France demeurent indifférents — depuis qu’est dépassé l’aspect religieux de la confrontation au Canada. De sorte que, vers 1740, alors que les colonies anglaises d’Amérique sont fortes de près d’un million d’habitants, on compte au plus 80 000 colons français, plus quelques milliers d’autres en Louisiane.
    Au XVIII e  siècle, ce ne sont pas tellement les persécutions religieuses qui constituent un motif à l’émigration (au reste, lorsque des protestants français, lors de la révocation de l’Édit de Nantes, veulent s’en aller aux Amériques, le roi le leur interdit — mais rien ne prouve qu’ils eussent été nombreux à partir), mais ce sont des

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