Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
des terres réservée à chaque communauté. Les Noirs se voient attribuer 8 % du total des terres ; ailleurs, même si la population est majoritairement africaine, la terre est blanche, sauf de rares exceptions. Les Noirs perdent ainsi bien des lopins qu’ils cultivaient : on compte près d’un million d’expulsés ; il faut attendre 1936 pour que les terres tribales des Noirs passent de 8 % à 13 % de la superficie de l’Union.
Expulsés de leurs terres, les Noirs vont travailler dans les mines ; pourtant le Colour Bar , de 1911, leur interdit de postuler l’emploi de travailleurs spécialisés. Le pass-system les assigne à résidence.
Jusque-là, on avait pu observer que le statut des hommes de couleur différait sensiblement d’une région à l’autre. Il survivait une tradition libérale dans la province du Cap où, en principe, les Noirs et les mulâtres disposaient de droits politiques pour autant qu’ils remplissaient les conditions requises par le suffrage censitaire. C’est dire que peu en bénéficiaient effectivement, mais les « Petits Blancs » étaient exclus eux aussi. Au Natal, comme dans les Républiques d’Orange et du Transvaal, les Noirs et les métis étaient privés de tous les droits politiques ; les Indiens étaient également interdits de séjour dans les anciennes Républiques boers. Ce sont ceux-ci, d’ailleurs, qui au Natal mènent campagne avec le plus de succès contre le Colour Bar ; et c’est là que Gandhi a fait l’apprentissage du racisme.
Ainsi, globalement, il n’existait que des différences dedegré entre la législation raciste des territoires anglais et boers ; néanmoins, le principe était différent, la province du Cap demeurait la plus tolérante, et la fissure s’élargissait entre ses pratiques, auxquelles adhèrent les Hollandais, dont le général Smuts, et celles des Boers, qu’on appelle de plus en plus souvent les Afrikaners.
Antécédents de l’apartheid
L’événement de l’histoire des Afrikaners avait été le grand Trek. Les Boers n’avaient pas voulu subir la loi de l’étranger, notamment dans leurs rapports avec les Noirs, et ils entendaient garder leur langue, leur mode de vie traditionnel. « Donner aux Noirs un statut égal à celui des Blancs est contraire à la loi de Dieu ; cela s’opposait à la différence naturelle de la race et de la religion. Pour tout chrétien une telle humiliation est intolérable. » « Il ne sera pas question d’égalité entre Blancs et non-Blancs, ni dans l’Église ni dans l’État », stipulait la première Constitution du Transvaal en 1858. Ce grand Trek, une Anabase de plusieurs années (Marianne Cornevin, L’Apartheid) , était considéré comme l’équivalent de l’Exode de Moïse, son itinéraire était sacré, il l’est encore un siècle après.
Un texte de l’ Instituut vor Christelike-nasionale Ouderwys , daté de 1948, formule, pour l’enseigner, le principe de l’apartheid. « L’éducation des enfants de parents blancs doit se faire sur la base des conceptions des parents, donc se fonder sur les Saintes Écritures. […] Nous pensons que Dieu a voulu des nations séparées, des peuples séparés, et a donné à chacun sa vocation, ses tâches, ses dons. » Les croisements de race, leur égalité allaient contre la volonté de Dieu, dont les Boers étaient les seuls interprètes. La Bible et le Fusil.
Les Afrikaners avaient dû, pourtant, sous la pression des Anglais, amender leurs pratiques depuis 1901.
Pourtant, la victoire d’un Afrikaner aux élections de 1948, le D r Malan, ressentie comme une revanche sur les Anglais, accentua la détermination des vainqueurs, qui vivaient « comme retranchés dans leur langue et leur religion », d’instituer une ségrégation raciale stricte, ou apartheid. Dès 1949, les mariages mixtes entre Européens et non-Européens sont interdits, et les Indiens y sont inclus. Surtout la ségrégation résidentielle est renforcée, la classification raciale durcie, qui définit dans le cas des mulâtres et métis leur appartenance : le test du peigne, qui reste accroché si les cheveux sont un peu crépus, est une des mesures vexatoires instituées par les commissions spéciales. La ségrégation s’étendit ensuite aux lieux publics, aux transports en commun, aux universités, aux sports, etc. Même la représentation, par des Européens, des Africains au Parlement fut supprimée en 1959. Simultanément, il fut
Weitere Kostenlose Bücher