Hitler m'a dit
remarquai-je. Mais Hitler n’avait pas besoin d’encouragement. « L’Église catholique, continua-t-il, doit être citée en exemple, en premier lieu, pour sa tactique extraordinairement habile, pour sa connaissance des hommes, et pour son adroite adaptation des faiblesses humaines au gouvernement des croyants. Aussi, quand il s’est agi de rédiger le programme qui devait être la constitution immuable de notre parti, me suis-je inspiré de la forme que l’Église a donnée à son credo et à ses articles de foi. Elle n’y a jamais laissé toucher. Elle n’a pas cessé depuis plus de quinze siècles de repousser à chaque époque tout remaniement de ce texte vénérable dont les termes restent fixés une fois pour toutes. Elle savait qu’elle pouvait laisser juxtaposer au credo les commentaires ou interprétations les plus contradictoires. La foule des croyants n’y fait aucune objection ; elle ne s’embarrasse jamais de contradictions logiques. Les fidèles ne sont troublés que par une seule chose, par la modification des textes eux-mêmes, dont chaque syllabe a pour eux une vertu magique, même lorsque ces rituels ont perdu toute valeur pratique et ne sont plus que les monuments respectables d’un lointain passé. »
Je m’étonnai qu’il eût pu prendre aussi quelque chose chez les Francs-Maçons.
— « Que voyez-vous là d’étonnant ? Bien entendu, je ne crois pas sérieusement à la malignité diabolique des Francs-Maçons, de ces gens qui se sont embourgeoisés, au cours des siècles, de cette association devenue tous les jours plus inoffensive en Allemagne, où elle n’est plus guère qu’une société de secours mutuel. Je me suis fait renseigner exactement à ce sujet. J’ai communiqué au major Buch les pièces de cette enquête et le rapport détaillé qui la résume. Les prétendues horreurs, les squelettes, les têtes de mort, les cercueils, le cérémonial mystérieux, tout cela n’est qu’un attirail de croquemitaine. Ce qu’il y a de dangereux chez ces gens-là, c’est le secret de leur secte, et c’est justement ce que je leur ai emprunté. Ils forment une sorte d’aristocratie ecclésiastique. Ils se reconnaissent entre eux par des signes spéciaux. Ils ont développé une doctrine ésotérique qui n’est point formulée en termes logiques, mais en symboles qu’on révèle graduellement aux initiés. L’organisation hiérarchique et l’initiation par des symboles et par des rites, c’est-à-dire sans fatigue pour l’intelligence, mais par la fécondation de la fantaisie, par l’effet magique de symboles rituels : voilà ce que les Francs-Maçons ont inventé de Dangereux et de Grand, et c’est là l’exemple qu’ils m’ont fourni. Ne voyez-vous pas que notre parti doit être constitué exactement comme leur secte ? Un Ordre, la hiérarchisation d’un clergé laïque. Mais il n’y a pas place dans le monde pour deux ou plusieurs organisations semblables. Ou bien nous, ou bien les Francs-Maçons, ou bien l’Église. Mais jamais deux ensemble. Cela s’exclut et l’Église catholique a compris la situation, du moins en ce qui concerne la Maçonnerie. Aujourd’hui, c’est nous qui sommes les plus forts et c’est pourquoi nous éliminerons les deux autres, l’Église et la Maçonnerie. »
— « Vous avez pris à l’Église son organisation hiérarchique, et à la Franc-maçonnerie la conception d’un Ordre, avec son vœu d’obéissance, et de discrétion et avec sa doctrine ésotérique qui se manifeste dans l’initiation graduelle. Soit. Mais qu’avez-vous donc pris dans les « Protocoles des Sages de Sion ? » demandai-je.
— « L’intrigue politique, la technique, la conspiration, la désagrégation révolutionnaire, l’art de déguiser, de tromper, l’organisation. Est-ce que ce n’est pas assez ? »
Je lui accordai que c’était beaucoup. « Mais nous n’avons parlé jusqu’ici, reprit Hitler, que du Juif, maître dans le domaine économique. Nous avons parlé de notre adversaire politique. Que représente le Juif dans la lutte plus décisive pour une nouvelle organisation du monde ? »
Je le priai de vouloir bien m’éclairer.
— « Il ne peut pas y avoir deux peuples élus. Nous sommes le peuple de Dieu. Ces quelques mots décident de tout. »
— « Vous entendez cette proposition plutôt comme un symbole ? »
« Non, c’est la réalité toute simple et qui ne supporte même pas la discussion.
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