Iacobus

dévotion à ces chevaliers
qui demeuraient agenouillés comme des statues sans bouger un pli de leur
manteau dans une attitude extatique était... l’arche d’alliance !
    Comment décrire l’émotion qui me submergea soudain ?
J’avais sous les yeux l’objet le plus convoité de toute l’humanité, le trône de
Dieu, le réceptacle de sa force et de son pouvoir... ! Et je n’avais aucun
doute, malgré toute ma modération, sur ce que j’étais en train de voir.
    Tu
feras une arche en bois d’acacia : de deux coudées et demie sera sa
longueur, d’une coudée et demie sa largeur et d’une coudée et demie sa hauteur.
Tu la recouvriras d’or pur ; à l’intérieur et à l’extérieur, tu la
recouvriras et tu feras sur elle une moulure d’or tout autour. Tu fondras pour
elle quatre anneaux d’or et tu les placeras à ses quatre pieds : deux
anneaux sur son premier côté et deux anneaux sur son second côté. Tu feras des
barres en bois d’acacia et tu les recouvriras d’or. Tu introduiras les barres dans
les anneaux sur les côtés de l’arche qu’elles serviront à transporter. Les
barres resteront dans les anneaux de l’arche, elles n’en seront pas retirées.
    Tu
placeras dans l’arche le témoignage que je te donnerai.
    Tu
feras un propitiatoire d’or pur : de deux coudées et demie sera sa
longueur et d’une coudée et demie sa largeur. Tu feras deux chérubins
d’or ; en métal repoussé tu les feras aux deux extrémités du
propitiatoire. Fais un chérubin à une extrémité et un chérubin à l’autre
extrémité. Vous ferez les chérubins formant corps avec le propitiatoire sur les
deux extrémités. Les chérubins auront les deux ailes déployées vers le haut,
protégeant de leurs ailes le dessus du propitiatoire leurs faces l’une vers
l’autre ; les faces des chérubins seront en direction du propitiatoire. Tu
placeras le propitiatoire sur l’arche, par-dessus, et dans l’arche tu placeras
le Témoignage que je te donnerai. C’est là que je me rencontrerai avec toi et
que de dessus le propitiatoire d’entre les deux chérubins qui seront sur l’arche
du Témoignage, je parlerai avec toi de tout ce que je te commanderai pour les
fils d’Israël [26] .
     
    C’était donc vrai : les Templiers avaient
trouvé l’arche d’alliance ! Ces neuf chevaliers qui avaient fondé l’Ordre
à Jérusalem étaient parvenus à accomplir la mission que leur avait confiée
saint Bernard. Un groupe de soldats l’avait sans doute transportée par la suite
en secret dans ces galeries souterraines de Bierzo, où elle demeure depuis.
    L’émotion me fit trembler de la tête aux pieds.
Si on en croyait les paroles de la Bible, cette arche contenait les Tables de
la Loi, non de la Loi comprise comme un cumul d’interdits puérils impropres
d’un Dieu, mais le logos, le Verbe, les mesures sacrées
architectoniques, les relations géométriques, musicales et mathématiques de
l’Univers, une puissance destructive capable d’anéantir les Philistins, les
remplissant de tumeurs [27] ,
une gigantesque colonne de feu capable de monter jusqu’aux cieux [28] .
    Aucun autre pouvoir destructeur et créateur
n’était comparable à celui de cette arche, et pourtant rien dans son apparence,
dans la sérénité affectée des chérubins dorés, dans sa beauté ne le laissait
transparaître. Je comprenais maintenant l’attitude des Templiers agenouillés en
signe de déférence. Si je l’avais pu, je me serais prosterné moi aussi. J’étais
certain que le réseau de forteresses qu’avait mentionné Rodrigo lors de sa
visite au cachot était destiné à protéger l’arche d’alliance.
    Un cri d’alerte résonna soudain sous la nef.
Mille têtes se relevèrent, et une rumeur sourde commença à circuler dans
l’enceinte comme un tourbillon. Puis un autre cri fit que tous les Templiers se
relevèrent, portant leur main droite à l’épée. La clameur augmenta, l’un après
l’autre tous les regards convergèrent dans ma direction. Étourdi par tant
d’émotion, je demeurai paralysé, mais le tumulte était assez grand pour que je
comprenne enfin que j’avais été découvert. Comment diable avaient-ils su ?
    Je le compris rapidement en découvrant Jonas qui
se tenait immobile à mes côtés, les yeux fixés sur l’arche, le corps à
découvert. Ni le vacarme produit par son apparition sur le balcon ni les coups
que Sara lui donnait ne purent le tirer de sa contemplation