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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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le
quartier juif. Il nous fallut faire nos adieux à Sara. Ce moment inéluctable,
auparavant occulté par nos aventures comme s’il ne devait jamais se produire,
était arrivé, à mon grand désespoir.
    — Je ne veux pas que nous nous quittions
avec tristesse, murmura Sara en jetant sa besace sur l’épaule d’un geste
résolu. Le destin nous a déjà réunis par deux fois, qui sait ce que l’avenir
nous réserve ?
    — Il peut aussi décider que nous ne nous
retrouverons jamais, répondit Jonas.
    — Je suis certaine que cela n’arrivera pas,
beau Jonas, promit Sara en lui caressant la joue. On revoit toujours les
personnes qui comptent pour vous. Tout tourne dans l’Univers, je suis sûre que
nous nous retrouverons dans l’une de ces rondes. Quant à vous, don Galcerán,
dit-elle en se tournant vers moi, je vous souhaite bonne chance car il est
probable que je ne vous reverrai jamais.
    — Je le sais, dis-je, reconnaissant la
vérité de ses paroles. Mais vous savez où me trouver : quand tout cela
sera terminé, je rentrerai chez moi, à Rhodes.
    — Je ne crois pas que j’irai jamais sur
cette île. Accepter cette consolation serait absurde. Soyez heureux. Que Yahvé
guide vos pas.
    — Que le ciel guide les vôtres, murmurai-je
en pivotant sur mes talons, sentant mon coeur se briser. Partons, Jonas.
    — Adieu, Jonas, entendis-je Sara dire.
    — Adieu, Sara.
    A peine avions-nous passé la porte de San Martin
située à peu de distance de l’Hospital del Rey que Jonas s’écria :
    — Mais pourquoi devons-nous nous séparer
d’elle ?
    — Parce qu’elle aime un homme qui se trouve
dans cette ville et que nous n’avons pas le droit de nous immiscer dans sa vie,
dis-je d’un ton raisonnable, regrettant de ne pas être libre de crier la
douleur que je ressentais. Si elle préfère rester à Burgos, cela la regarde, tu
ne crois pas ? continuai-je d’une voix enrouée par l’émotion. Impossible
de la traîner de force jusqu’à Compostelle. Et puis, toi et moi, avons une
affaire à régler ici, et nous avons même intérêt à nous dépêcher.
    — Quelle affaire ?
    — Elle est bien trop importante pour que je
t’en parle ici au beau milieu de la rue.
    Nous venions de franchir les murailles qui
entouraient l’Hospital del Rey, et marchions le long d’une allée ombragée
conduisant vers un édifice qui tenait plus de la forteresse que du monastère.
    Jamais au cours de notre voyage nous ne nous
étions reposés dans un endroit aussi luxueux que cet hospice où nos faux
sauf-conduits nous permirent d’entrer. Nous n’étions plus de pauvres pèlerins
mais des seigneurs de la plus ancienne noblesse bénéficiant de chambres royales
chauffées par de bons feux, de lits à baldaquin moelleux, de murs couverts de
tapisseries, de sièges parés de peaux d’ours et de renard, et de plats goûteux
et assez abondants pour nourrir les armées castillanes d’Alfonso IX. Les frères
lais qui recevaient les pèlerins de notre genre, c’est-à-dire des nobles venus
de toute l’Europe, étaient propres, zélés et serviables. Le plus étonnant était
que tout cet ensemble, monastère et hôpital à la charité si luxueuse, ne
représentait qu’une infime partie de l’abbaye royale de Las Huelgas qui
comptait de nombreux couvents, églises, chapelles, hameaux, bois et pâturages.
Le tout était gouverné d’une main de fer par une femme : la
toute-puissante abbesse de Las Huelgas, qui disposait d’un pouvoir de
juridiction absolu.
    Après le repas, tandis que je sentais mon corps
se couvrir d’une sueur froide, j’arrangeai ma tenue du mieux que je le pus (je
coupai même ma longue barbe à l’aide de la dague du comte) et laissai Jonas
faire une sieste pour me diriger vers la conciergerie du monastère, expression
pure de l’art militaire de Cîteaux. L’antichambre était un large cloître. Au
plafond, des stucs de style mudéjar et, peint sur le plâtre, un long texte
latin reprenant des versets des Psaumes. Une religieuse de basse condition vint
à ma rencontre avec de grandes démonstrations de frayeur et de respect.
    — Pax
vobiscum.
    — Et
cum spirituo tuo.
    — Que venez-vous chercher dans la maison de
Dieu, messire ?
    — Je viens voir dona Isabel de Mendoza.
    La nonne, que j’avais dû tirer de son sommeil,
me regarda d’un air surpris sous sa coiffe noire.
    — Les dames de ce monastère ne reçoivent
pas de visites sans l’autorisation de la

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