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Il était une fois le Titanic

Il était une fois le Titanic

Titel: Il était une fois le Titanic Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: G.A. Jaeger
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épargner la vision du naufrage, elle leur détourna la tête. Malgré ses efforts pour distraire leur attention, ils refusèrent de s’asseoir et cherchèrent longtemps leur père des yeux. Il était précisément 2 h 15. Dans cinq minutes à peine, l’insubmersible Titanic aurait consommé le temps que lui avait accordé l’Histoire.
    Il n’y avait plus maintenant que deux radeaux pour faire pièce au destin, or ces deux embarcations se trouvaient sur le point d’être immergées. Avec l’aide d’un matelot, Charles Lightoller s’apprêtait à faire basculer le premier d’entre eux jusque sur un des ponts inférieurs lorsque le paquebot s’enfonça de plusieurs mètres après la rupture d’une cloison étanche. Un passager du nom de Mellors, qui avait participé à son déploiement, fut emporté avec le radeau. Dans le même temps, le deuxième officier Lightoller fut jeté à la mer. Aspiré par un ventilateur des chaudières, il fut plaqué contre son grillage, puis vivement repoussé vers la surface par une bulle d’air chaud venue du conduit d’aération. C’est ainsi qu’il se retrouva à côté du radeau retourné, vers lequel il se mit à nager. Le colonel Gracie s’y trouvait avec John Borland Thayer. « Je pense, déposera-t-il, qu’ils étaient les deux seuls passagers. Il n’y avait pas de femmes parmi nous. Le reste des gens, une trentaine en gros, étaient des chauffeurs et d’autres membres de l’équipage 207 . »
    Quelques instant plus tard, la première cheminée dont les câbles venaient de céder chuta lourdement sur l’avant,
pulvérisant le pont où deux embarcations se trouvaient sur leurs bossoirs un quart d’heure plus tôt. Puis la grande verrière de la poupe explosa, laissant l’eau s’engouffrer par l’escalier jusque dans les profondeurs du navire. L’océan l’alourdit encore. Aussitôt il piqua de nouveau jusqu’à former avec la mer un angle terrifiant. Les passagers des chaloupes qui essaimaient sans but tout autour de l’épave en suspens virent avec effroi des centaines de personnes tomber à la mer.
    Les quelque mille cinq cents prisonniers du grand transatlantique virent s’éloigner définitivement tout espoir de s’en sortir. Il n’y avait plus que deux radeaux à bord, pour ainsi dire inaccessibles, et le navire continuait de se dresser vers les étoiles. Comme autant d’offrandes inutiles, ceux qui n’étaient pas encore noyés dans les cabines, les coursives et les salons broyés par des tonnes d’eau noire et glacée, tentèrent de refluer vers la plage arrière. Jusqu’à ce que les uns après les autres, par grappes entières, des hommes, des femmes et des enfants oubliés abandonnent toute prise et se laissent tomber comme des pierres dans le vide, avant de s’écraser quelques dizaines de mètres plus bas. Assommés ou noyés, ils se mirent à flotter comme des espars disloqués. Face à cette scène terrifiante, Helen Churchill Candee écrira : « J’attend[ai]s la fin, pétrifiée. » Plus tard, elle se souviendra avoir supplié Dieu d’abréger leur souffrance 208 .
    La dernière fois que l’on crut voir le commandant Smith, il tentait au porte-voix de rappeler les chaloupes afin qu’elles viennent au secours de ceux qui se débattaient dans l’eau. Mais aucune n’y répondit spontanément, craignant d’être aspirée par le tourbillon que provoquerait l’engloutissement du navire. Tous ne furent pas de cet avis, mais la majorité l’emporta. « Sauvons nos vies avant celle des autres », dira le quartier-maître Hichens 209 en éloignant le canot numéro 6 de la zone. De nombreuses personnes
tentèrent de rejoindre les chaloupes à la nage, mais leurs efforts ne durèrent que quelques minutes. Certaines y parvinrent néanmoins, mais toutes ne purent y monter, soit en raison de la distance qui les en séparait, soit parce qu’elles en furent repoussées par leurs occupants. Dans cet océan de glace où la température de l’eau était à peine de 1°C, ils n’avaient que quelques minutes à vivre.
    À 2 h 18, le navire se rompit à l’arrière de la troisième cheminée. Où que se fussent trouvées les embarcations de sauvetage, leurs passagers ne purent l’ignorer. Néanmoins, les témoignages ne concordent pas. Certaines personnes déclareront que le Titanic sombra d’un seul tenant, plongeant dans les profondeurs de l’Atlantique sans le moindre remous. Telle sera notamment la version du lieutenant

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