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Il était une fois le Titanic

Il était une fois le Titanic

Titel: Il était une fois le Titanic Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: G.A. Jaeger
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dans sa manière de mener les interrogatoires, l’Europe et l’Angleterre, en particulier, prirent rapidement ombrage de sa partialité qu’un patriotisme teinté de populisme poussait à toutes les extravagances. « Pour Londres, écrit Philippe Masson, l’affaire dérivait de la jalousie des Yankees, de ces parvenus qui n’avaient jamais dissimulé leur jalousie à l’égard d’une vieille nation aristocratique 264 . » Et tout cela sur le dos de l’indignation des familles, ajoute-t-il avec l’amertume qu’induit ce constat.
    En ce printemps 1912, l’heure des comptes avait sonné. Le président Smith était assis à deux mètres de Joseph Ismay, installé au bout d’une très longue table, tandis que le public avait pris place au milieu des témoins et des sénateurs. C’était comme une grande chambre d’inquisition, un tribunal de doléances où tout le monde pouvait à tout instant prendre la parole et pointer un doigt vengeur en direction de l’accusé de son choix.
    De témoin qui s’estimait ordinaire, Joseph Ismay eut tout de suite le sentiment d’être la victime expiatoire d’un contentieux qui le dépassait. Quand il lut dans la presse que les reporters présents le premier jour parlaient de sa distinction « toute britannique », il sut qu’il serait au mieux raillé, au pire voué d’avance aux gémonies par tout un peuple. Il cherchera parfois le regard de Philip Franklin quand il se sentira injustement harcelé. En particulier lorsque le sénateur Isidor Rayner déclarera que « si le Titanic avait été un navire battant pavillon américain, il aurait été accusé d’homicide involontaire, si ce n’est de meurtre 265  » !
    Passé les questions techniques relatives à la conception du paquebot, au nombre de canots de sauvetage embarqués, ainsi qu’au manque d’entraînement de l’équipage
en cas d’évacuation d’urgence, le président Smith en vint à l’interroger sur la route suivie par le commandant du Titanic au cours de la journée du dimanche 14 avril, puis sur le manque d’attention que ce dernier avait porté aux télégrammes d’avertissements prodigués par les bateaux croisant à proximité de la banquise dérivante. Pour en arriver enfin à cette demande à laquelle Ismay ne s’attendait pas : « Avez-vous donné des ordres pour que le navire augmente sa vitesse à l’approche du danger ? » Car la lâcheté dont on l’accusait jusqu’ici ne découlait que de son embarquement à bord d’un canot de sauvetage, pas d’un déni de responsabilité. Il fallait maintenant convenir qu’on allait s’attaquer à sa culpabilité dans la catastrophe elle-même. Et démontrer que le capitaine Edward John Smith, que l’on qualifiait désormais de héros puisqu’il avait péri dans le naufrage, n’était pas maître de son commandement !
    Ismay eut beau se défendre, il ne retourna pas les certitudes de ceux qui l’accusaient d’avoir faussé les règles du jeu transatlantique par sa seule présence à bord du paquebot. Par sa position, il aurait poussé le capitaine à négliger les règles de prudence élémentaires en lui demandant de pousser les machines afin d’augmenter la vitesse. Et cela dans le but non pas de remporter le Ruban bleu, mais de battre le record de traversée de l’ Olympic . Joseph Ismay nia catégoriquement avoir exercé la moindre pression sur les officiers du navire, ce que viendront démentir deux ou trois témoins à charge, dont Elizabeth Lines. Devant les sénateurs, elle prétendra que le 13 avril à 13 h 30, alors qu’elle se trouvait dans le salon de réception de première classe, elle fut témoin que le patron de la White Star Line avait manifesté le désir de surprendre tout le monde en arrivant à New York avant la date prévue.
    Ismay plaida qu’il n’était qu’un passager ordinaire et qu’il ne se mêlait pas de navigation lorsqu’il embarquait sur un nouveau bâtiment pour son voyage inaugural. Si son statut de directeur pesait d’une si mauvaise influence, argumenta-t-il, une telle catastrophe se serait produite depuis
longtemps. Ayant décidé de quitter ses fonctions à la fin de l’année, se serait-il permis cet écart de conduite ? Arguant du fait qu’il n’avait plus rien à perdre et qu’un exploit eût ajouté à sa notoriété, d’aucuns pensaient tout au contraire qu’il était en mesure de rembarrer qui que ce fût sans mettre la suite de sa carrière en péril.
    Ce qui

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