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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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mélange de tendresse et de finesse
qui le caractérisait, c’est avec elle et non avec Terentia qu’il aborda cette
question pour la première fois.
    — Est-ce que ça te plairait, lui demanda-t-il un matin,
alors que nous nous trouvions tous les trois dans son bureau, de te marier un
jour ?
    Comme elle lui assura que cela lui plairait beaucoup, il lui
demanda qui, entre tout le monde, elle aimerait le plus avoir pour mari.
    — Tiron ! s’écria-t-elle en jetant ses bras autour
de ma taille.
    — Je crois qu’il est beaucoup trop occupé à m’aider
pour avoir le temps de se marier, répondit-il très sérieusement. Qui d’autre ?
    Le cercle des connaissances adultes mâles de Tullia était
assez restreint, aussi n’eûmes-nous pas à attendre longtemps avant qu’elle
évoque le nom de Frugi, qui avait passé tellement de temps avec Cicéron depuis
l’affaire Verres qu’il faisait presque partie de la famille.
    — Frugi ! s’exclama Cicéron, comme si l’idée ne l’avait
jamais effleuré. Comme c’est merveilleusement trouvé ! Tu es bien sûre que
c’est lui que tu veux ? Vraiment ? Alors allons sur-le-champ en parler
à ta maman.
    De cette façon, Terentia se retrouva battue par son mari sur
son propre terrain aussi adroitement que si elle avait été un malheureux
aristocrate au Sénat. Non qu’elle eût quoi que ce fût contre la personne de
Frugi, qui représentait un assez bon parti, même selon ses critères à elle – un
jeune homme diligent et doux qui avait maintenant vingt et un ans et venait d’une
famille distinguée. Mais elle était bien trop rusée pour ne pas voir que
Cicéron, en trouvant un remplaçant qu’il pourrait former et amener vers une
carrière publique, faisait ce qu’il pouvait pour se créer un fils. Cette prise
de conscience fut pour elle comme une menace, et Terentia réagissait toujours
violemment aux menaces. La cérémonie de fiançailles, qui eut lieu au mois de
novembre, se déroula cependant assez bien, et Frugi – qui, soit dit
en passant, aimait beaucoup sa petite fiancée – lui glissa timidement
un anneau au doigt sous le regard approbateur des deux familles et de leurs
maisonnées ; le mariage proprement dit était fixé à cinq ans plus tard,
quand Tullia serait pubère. Mais ce soir-là, Terentia et Cicéron connurent l’une
de leurs pires scènes de ménage. Elle éclata dans le tablinum avant que j’eusse
eu le temps de sortir. Cicéron venait de faire une remarque anodine sur le fait
que les Frugi s’étaient montrés très accueillants à l’égard de Tullia.
Terentia, qui avait observé jusque-là un silence qui n’augurait rien de bon,
répondit que c’était en effet très généreux de leur part, étant donné la
situation.
    —  Etant donné quelle situation ? s’enquit
Cicéron avec lassitude.
    Il s’était de toute évidence résigné à ce qu’une dispute
avec Terentia fût ce soir-là aussi inévitable que de vomir après avoir mangé
une huître avariée, et que mieux valait s’en débarrasser au plus vite.
    — Étant donné la situation dans laquelle ils s’engagent,
répliqua-t-elle avant d’enfourcher son cheval de bataille favori : la cour
éhontée que Cicéron faisait à Pompée et sa coterie de provinciaux, qui avait
plongé sa famille dans l’opprobre de toutes les personnes les plus honorables
de l’État, et la promulgation illégale de la lex Gabinia qui avait
permis la montée du règne de la plèbe.
    Je n’ai pas tout retenu et, de toute façon, quelle
importance ? Comme dans beaucoup de scènes conjugales, le sujet évoqué n’était
le plus souvent qu’un prétexte et le fond du problème portait sur tout autre
chose, en l’occurrence qu’elle n’ait pas pu lui donner de fils et que Cicéron
se soit par conséquent attaché presque comme un père à Frugi. Je me rappelle néanmoins
Cicéron lui rétorquant que, quels que fussent les défauts de Pompée, personne
ne niait que c’était un grand soldat et qu’à peine investi des pleins pouvoirs,
il avait levé des troupes, pris la mer et balayé la menace pirate en
quarante-neuf jours seulement. La remarque cinglante de Terentia me revient
encore : si les pirates avaient réellement été éradiqués des mers en sept
semaines, c’est peut-être qu’ils ne constituaient pas une menace aussi terrible
que ce que Cicéron et ses amis avaient laissé entendre ! C’est alors que
je parvins à m’éclipser pour me réfugier

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