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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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lorsque Gabinius vint le voir avec un message de
Pompée. Celui-ci lui faisait brièvement ses amitiés et lui annonçait qu’il
comptait sur lui pour soutenir la lex Manilia « dans toutes ses
dispositions », et non seulement dans les coulisses mais aussi sur le
devant de la scène, du haut des rostres.
    — « Dans toutes ses dispositions », répéta
Gabinius avec un sourire narquois. Tu sais ce que ça veut dire.
    — Je présume que cela fait référence à la clause qui te
nomme à la tête des légions de l’Euphrate et te donne donc légalement l’immunité
contre toute poursuite maintenant que ton mandat de tribun a expiré.
    — Exactement, fit Gabinius avec un grand sourire avant
de faire une imitation assez convaincante de Pompée en se redressant et
gonflant les joues. « N’est-il pas intelligent, messieurs ? Ne vous
avais-je pas dit qu’il était intelligent ? »
    — Calme-toi, Gabinius, dit Cicéron avec lassitude. Je t’assure
qu’il n’y a personne que je verrais partir pour l’Euphrate avec plus de
plaisir.
    Il est dangereux en politique de tenir le rôle du
souffre-douleur d’un grand homme, c’était pourtant celui dans lequel Cicéron se
retrouvait maintenant piégé. Ceux qui n’avaient jamais osé insulter ou
critiquer directement Pompée pouvaient en revanche taper sur son représentant
juridique en toute impunité, sachant que chacun comprendrait quelle était la
cible réelle. Mais il n’y avait pas moyen d’échapper à un ordre du commandant
en chef, aussi fut-ce l’occasion pour Cicéron de prononcer son premier discours
aux rostres. Il se donna énormément de mal et commença à me le dicter plusieurs
jours auparavant avant de le faire lire à Quintus et à Frugi pour solliciter
leur avis. Il le garda prudemment à l’écart de Terentia car il savait qu’il
devrait en envoyer un exemplaire à Pompée et n’y était pas allé de main morte
avec la flatterie. (Je vois, par exemple, sur le manuscrit que « le génie
surhumain de Pompée pour le commandement » s’est mué, sur la suggestion de
Quintus, en « génie surhumain et incroyable de Pompée pour le
commandement ».) Il trouva une formule brillante pour résumer la réussite
de Pompée – « une loi, un homme, une année » – et passa des
heures sur le reste du discours, conscient que, s’il échouait aux rostres, ce
serait un frein à sa carrière politique et que ses ennemis en profiteraient
pour laisser croire qu’il n’avait pas la fibre populaire susceptible d’émouvoir
la plèbe de Rome. Le matin fatidique arriva, et Cicéron en fut malade de trac,
vomissant de façon répétée dans les latrines tandis que je me tenais près de
lui avec une serviette. Il avait les traits si tirés et était tellement pâle
que je me demandais s’il aurait la force de marcher jusqu’au forum. Mais il
pensait sincèrement qu’un grand orateur, quelle que soit son expérience, devait
avoir peur avant de monter sur scène – « les nerfs doivent être aussi
tendus que la corde d’un arc si l’on veut que les flèches partent » – et,
lorsque nous arrivâmes au fond des rostres, il était prêt. Il va sans dire qu’il
n’avait pas de notes. Nous entendîmes Manilius annoncer son nom, et les
applaudissements commencèrent. C’était une belle matinée, claire et lumineuse.
La foule était innombrable. Cicéron rajusta ses manches, se redressa de toute
sa taille et monta lentement vers le tumulte et la lumière.
    Catulus et Hortensius menaient une fois encore l’opposition
contre Pompée, mais ils avaient développé de nouveaux arguments depuis la lex
Gabinia, et Cicéron s’en amusa un instant.
    — Que dit Hortensius ? plaisanta-t-il. Que si l’on
doit attribuer les pleins pouvoirs à un seul homme, il faut que ce soit à
Pompée, mais qu’il ne faut pas donner les pleins pouvoirs à un seul homme ?
Ce raisonnement est périmé, et ce ne sont pas tant les mots que les faits qui
le réfutent. C’était déjà toi, Hortensius, qui dénonçais le courageux Gabinius
pour avoir proposé une loi nommant un seul commandant contre les pirates. Je te
le demande maintenant au nom du Ciel, Hortensius : si, en cette occasion,
le peuple romain avait davantage tenu compte de ton opinion plutôt que de sa
sécurité et de ses intérêts personnels, pourrions-nous nous targuer d’une telle
gloire et d’un empire mondial ?
    Dans le même ordre d’idée, si Pompée voulait Gabinius

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