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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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là : Antonius
Hybrida.
     
    Quelques jours plus tard, il se produisit un événement qui
allait changer radicalement le sort de Cicéron et l’avenir de l’État tout
entier, même s’il n’en eut pas conscience sur le moment. Cela me fait penser à
ces petites taches qu’on peut, paraît-il, découvrir un matin sur sa peau sans y
prêter attention, puis qui se développent au fil des mois en une tumeur
épouvantable. Le petite tache se présenta alors sous forme d’un simple message,
totalement inattendu, qui convoquait Cicéron auprès du grand pontife, Metellus
Pius. Cicéron fut extrêmement intrigué, vu que Pius, qui était très âgé (au
moins soixante-quatre ans) et éminent, n’avait jamais daigné jusque-là ne
fût-ce que lui adresser la parole, sans parler de réclamer sa présence. Nous
partîmes donc aussitôt, les licteurs nous dégageant la voie.
    En ce temps-là, la résidence officielle du chef de la
religion d’État se trouvait sur la Voie sacrée, à côté de la Maison des vierges
vestales, et je me souviens que Cicéron était très content d’être vu entrant
dans ces lieux, car il s’agissait véritablement du cœur sacré de Rome et rares
étaient les hommes qui avaient la chance d’en franchir le seuil. On nous fit
monter un escalier et suivre une galerie qui donnait sur le jardin de la
résidence des vestales. J’espérais secrètement entrevoir l’une de ces six
mystérieuses jeunes filles vêtues de blanc, mais le jardin était désert et il n’était
pas possible de s’attarder alors que la silhouette aux jambes arquées de Pius
nous attendait déjà avec impatience au bout de la galerie, tapant du pied,
encadré par deux prêtres. Il avait été soldat toute sa vie, et sa peau
présentait l’aspect craquelé et durci du vieux cuir laissé dehors pendant des
années et rentré depuis peu. Il n’y eut pas de poignée de main avec Cicéron,
pas d’invitation à s’asseoir ni aucun préliminaire d’aucune sorte. Pius se
contenta de dire aussitôt, de sa voix rauque :
    — Préteur, il faut que je te parle de Sergius Catilina.
    À la seule mention de ce nom, Cicéron se raidit, car c’était
Catilina qui avait torturé son lointain cousin, le représentant du parti
populaire Gratidianus, en lui brisant les membres puis en lui arrachant les
yeux et la langue. Catilina souffrait de graves accès de folie furieuse,
pareils à des éclairs qui lui vrillaient le cerveau. À un moment, il pouvait
être charmant, cultivé, amical ; puis quelqu’un se permettait une remarque
apparemment anodine, ou bien il interceptait un regard qui lui semblait
impertinent, et il perdait toute retenue. Pendant les proscriptions de Sylla,
quand les listes de condamnés étaient affichées au forum, Catilina avait été l’un
des exécuteurs les plus efficaces au marteau et au couteau –  percussores comme on les appelait – et avait tiré beaucoup d’argent des biens
de ceux qu’il avait mis à mort. Son propre beau-frère faisait partie de ses
victimes. Pourtant, il était doté d’un charisme indéniable, et pour chaque
personne que sa sauvagerie répugnait, il s’en trouvait deux ou trois autres
séduites par ses accès tout aussi débordants de générosité. Il était également
connu pour ses mœurs licencieuses. Sept ans plus tôt, il avait été poursuivi
pour avoir entretenu des relations sexuelles avec une vierge vestale – qui
n’était autre, en fait, que la demi-sœur de Terentia, Fabia. C’était là un
péché capital, non seulement pour lui, mais pour elle aussi, et si l’on avait
pu prouver sa culpabilité, elle aurait enduré le châtiment traditionnel des
vestales qui rompent leur vœu de chasteté – être enterrée vivante
dans la petite chambre réservée à cet effet près de la porte Colline. Mais les
aristocrates, conduits par Catulus, s’étaient ralliés autour de Catilina et
avaient assuré son acquittement, lui permettant de poursuivre sa carrière
politique comme si de rien n’était. Il avait été préteur deux ans plus tôt puis
gouverneur de la province d’Afrique, et n’avait donc pu suivre le tumulte
autour de la lex Gabinia. Il venait tout juste de rentrer.
    — Les membres de ma famille, continua Pius, sont les
protecteurs de l’Afrique depuis que mon père a gouverné cette province, il y a
cinquante ans. Les gens de là-bas sont donc venus chercher protection auprès de
moi, et je dois te dire, préteur, que je ne les ai

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