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Imperium

Imperium

Titel: Imperium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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appartenir. J’imagine que c’est cela, ce qu’on appelle l’« éducation ».
Il avait fallu quatre cents ans de mariages entre les familles les plus
considérées de Rome pour produire ces deux gredins – aussi racés que
des pur-sang arabes, et tout aussi rapides, impétueux et dangereux.
    — Voici l’affaire telle que nous l’envisageons, annonça
Catilina. Le jeune Clodius ici présent va prononcer un discours brillant pour l’accusation,
et tout le monde dira qu’il est le nouveau Cicéron et que j’ai toutes les
chances d’être condamné. Mais alors, toi, Cicéron, tu feras une plaidoirie encore
plus brillante pour ma défense, de sorte que personne ne s’étonnera que je sois
acquitté. Au bout du compte, nous aurons assuré un bon spectacle et notre
situation n’en sortira que renforcée. Je serai déclaré innocent devant le
peuple de Rome. Clodius apparaîtra comme un homme d’avenir plein de courage. Et
tu remporteras un nouveau succès éclatant au tribunal, en défendant quelqu’un
de condition bien supérieure à ton lot habituel de clients.
    — Et si les juges en décident autrement ?
    — Tu n’as pas à te préoccuper d’eux, assura Catilina en
tapotant sa poche. Je me suis occupé des juges.
    — La justice est si chère, intervint Clodius
avec un sourire. Le pauvre Catilina a été obligé de vendre ses biens de famille
pour s’assurer l’issue du procès. C’est un scandale. Mais comment font les gens
pour s’en sortir ?
    — J’aurai besoin de voir les documents du procès, dit
Cicéron. Dans combien de temps commencent les audiences ?
    — Trois jours, répondit Catilina en faisant signe à un
esclave qui se tenait près de la porte. Cela te laisse-t-il assez de temps pour
préparer ton discours ?
    — Si le jury t’est déjà tout acquis, je peux le réduire
à cinq mots : « Voici Catilina. Laissez-le partir. »
    — Oh, mais je veux la représentation cicéronienne
complète ! protesta Catilina. Je veux : « Cet homme
v-v-valeureux… le s-s-sang des c-c-centuries… v-v-voyez les larmes de sa
f-f-femme et de ses amis… »
    Il avait la main en l’air et l’agitait de manière expressive
tout en imitant grossièrement le bégaiement presque imperceptible de Cicéron.
Clodius riait ; ils étaient tous deux légèrement ivres.
    — Je veux : « Ces s-s-sauvages africains
s-s-souillant cette cour v-v-v-énérable… » Je veux que Carthage et Troie
soient invoquées devant nous, Dinon et Énée…
    — Tu auras, l’interrompit froidement Cicéron, un
travail professionnel.
    L’esclave était revenu avec les papiers du procès, et j’entrepris
de les ranger rapidement dans mon coffret à documents car je sentais que l’atmosphère
se dégradait à mesure que l’alcool consolidait son emprise et j’étais pressé de
sortir Cicéron de là.
    — Nous devrons nous rencontrer pour discuter de ton
témoignage, continua-t-il sur le même ton glacé. Demain serait le mieux, si
cela te convient.
    — De toute façon, je n’ai rien de mieux à faire. Je
pensais me présenter aux élections consulaires cet été, comme tu le sais sans
doute, jusqu’à ce que cette mauvaise graine m’en empêche.
    C’est l’agilité qui vous coupait le souffle chez un homme de
cette taille. Il bondit soudain et enroula son bras droit puissant autour du
cou de Clodius en lui abaissant la tête, ce qui plia le jeune homme en deux. Le
malheureux Clodius – qui, soit dit en passant, n’avait rien d’un
avorton – poussa un cri étouffé et chercha faiblement à accrocher le
bras de Catilina. Mais la force de cet homme était ahurissante, et je pense qu’il
aurait très bien pu briser le cou de son visiteur d’une simple secousse de son
avant-bras si Cicéron n’était intervenu d’une voix très calme :
    — En tant qu’avocat de la défense, je dois te prévenir,
Catilina, que ce serait une grave erreur d’assassiner ton accusateur.
    À ces mots, Catilina fit volte-face et plissa les yeux pour
le dévisager, comme s’il avait momentanément oublié qui il était. Puis il se
mit à rire et ébouriffa les boucles blondes de Clodius avant de le lâcher.
Clodius recula en titubant. Il se massa un côté de la tête et de la gorge et
jeta à Catilina un regard proprement meurtrier. Puis il se mit à rire lui aussi
et se redressa. Ils tombèrent alors dans les bras l’un de l’autre, Catilina
réclama du vin et nous les abandonnâmes

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