Indomptable
faucon sauvage se fit entendre au-
dessus des prairies où des pousses vertes se frayaient un
chemin à travers le chaume de foin de l’année dernière. Non
loin, un épervier voltigeait au-dessus des prairies, à la
recherche du premier repas de la journée. Il y a quelques
jours, le faucon du prêtre avait plané de la même manière
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ELIZABETH LOWELL
avant de plonger sur une proie. Cependant, la prise avait été
disputée par un faucon sauvage qui faisait trois fois sa taille.
Avant que le prêtre n’ait pu intervenir, le courageux petit
rapace avait été sévèrement blessé.
Tout à coup, Meg se tourna et retourna vers la guérite.
Ses semis pouvaient attendre. Pas le faucon.
Comme s’il l’attendait, Harry ouvrit la porte avant même
qu’elle n’ait fait trois pas, lui permettant ainsi de se hâter
vers le mur d’enceinte. Lorsqu’elle déposa Black Tom sur les
pavés humides, les yeux verts de ce dernier lui lancèrent un
regard incrédule.
— Tu ne peux pas venir avec moi pour l’instant. Je dois
d’abord me rendre aux fauconneries, expliqua-t-elle.
Le chat cligna des yeux, puis commença calmement à
faire sa toilette comme s’il ne s’était jamais attendu à aller
gambader dans l’herbe à chat du jardin d’herbes aromati-
ques de Meg.
Dès qu’elle arriva en vue des bâtisses de bois qui abri-
taient les nombreux oiseaux de chasse du château de
Blackthorne, le fauconnier s’avança, l’air visiblement
soulagé.
— Merci, maîtresse, dit William en touchant son front.
Je craignais que vous ne soyez trop occupée avec les prépa-
ratifs du mariage pour venir voir le petit faucon.
— Jamais, dit doucement Meg. La vie serait bien plus
misérable sans ces farouches petites créatures. Pouvez-vous
me donner mon gant ?
William tendit un gant de cuir qu’il avait confectionné il
y a quelques années pour la mère de Meg. Il était également
à la taille de la fille. Déchiré et griffé à la suite de son
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INDOMPTABLE
utilisation de longue date, le cuir était le silencieux témoin
des serres tranchantes des oiseaux de chasse.
Meg se rendit dans la fauconnerie qui abritait le rapace
blessé. Elle devait légèrement se baisser pour entrer, mais
une fois à l’intérieur, elle pouvait aisément se tenir droite.
Après un moment, ses yeux s’acclimatèrent à la semi-
obscurité. Elle aperçut l’épervier sur un perchoir dans la
partie la plus sombre de la fauconnerie.
Lorsque Meg s’approcha et offrit son avant-bras comme
nouveau perchoir, l’oiseau refusa. Meg sifflota doucement.
L’épervier se leva d’abord sur une patte et ensuite sur l’autre.
Finalement, avec des gestes lents et rigides ainsi qu’une aile
à la traîne, il se hissa sur son avant-bras.
Meg marcha jusqu’à la porte de la fauconnerie et le tint
à la clarté de la lumière du jour. Les yeux, qui auraient dû
être translucides, étaient troubles. Le plumage, qui aurait
dû être lumineux avec de subtils reflets colorés, allant du
gris-bleu au roussâtre, paraissait terne. La prise des serres
de l’oiseau sur le gant n’était pas assurée.
— Eh, mon petit, murmura-t-elle tristement, bientôt tu
voleras dans des cieux qu’aucun homme n’a jamais vus.
Dieu te délivrera très vite de ta souffrance.
Avec précaution, Meg reposa l’épervier sur son perchoir.
Durant de longues minutes, elle sifflota et murmura douce-
ment à l’intention du faucon. Lentement, ses yeux brumeux
se fermèrent. Dès qu’elle fut certaine qu’aucun mouvement
ne perturberait le faucon, elle se retourna pour partir.
Lorsque Meg émergea des fauconneries, Dominic le
Sabre se tenait à côté du fauconnier.
Ses pas chancelèrent lorsque son regard se porta sur des
yeux gris sombre et des traits sévères et soignés. Alors que
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ELIZABETH LOWELL
les autres hommes portaient soit de longues barbes, soit
aucune, ce guerrier avait soigneusement taillé sa barbe
noire et sa moustache. Il n’avait pas non plus de longues
mèches de cheveux pour adoucir le contour de son visage
de guerrier, ses cheveux noirs et épais avaient été coupés
afin de tenir sous un heaume de bataille.
Grand, puissant, immobile, Dominic le Sabre s’empara
des sens de Meg en l’espace d’une, deux, trois bouffées d’air.
Ensuite, aussi certainement qu’elle avait ressenti la mort se
déployer dans le corps de l’épervier, elle sentit la rigide maî-
trise de
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