Interdit
ne vous prendrai pas, dit-il simplement. J’ignore
ce que je vous ai fait par le passé pour que vous craigniez
ainsi mon désir pour vous, mais je sais bien que vous en
avez peur.
— Ce n’est pas… ce que vous… mon Dieu ! Vous ne
devez pas me prendre !
— Chut, précieuse Ambre, dit-il en scellant ses lèvres
d’une douce pression du pouce. Je ne vous prendrai pas. Me
croyez-vous ?
Il disait la vérité. Elle le sentait. Sa sincérité était encore
plus puissante que la passion qui brûlait en lui.
— Oui, murmura-t-elle. Je vous crois.
Il poussa un long soupir, qui s’apparentait plus à un
grognement.
— Merci, dit-il. Par le passé, personne n’aurait douté de
ma foi. Mais ici… ici, je dois de nouveau tout faire pour
prouver ma valeur et mon honneur.
ELIZABETH LOWELL
— Pas à moi. J’ai très clairement ressenti votre honneur
et votre fierté dès la première fois que je vous ai touché.
Duncan effleura tendrement sa bouche de ses propres
lèvres, presque trop légèrement pour que l’on considère
cette caresse comme un véritable baiser.
— Venez, dit-il doucement en lui tendant la main.
Marchez avec moi.
Ambre entrelaça ses doigts dans ceux de Duncan. Les
feux de passion qu’elle sentait brûler si intensément en lui la
firent trembler de nouveau.
— Où allons-nous ? demanda-t-elle.
— Trouver un refuge.
— Le vent n’est pas froid.
— Pas tant que nous portons nos capes, concéda-t-il.
Ce que Duncan avait choisi de passer sous silence se
répandait en elle comme une vague associant malaise et
excitation.
Le murmure de la mer, de l’herbe et du vent les suivit au
pied d’une petite butte. Là, l’homme avait autrefois dessiné
un cercle pour y ériger de grandes pierres. Bien que ces
constructeurs aient disparu depuis longtemps, le cercle
d’herbe et les pierres étaient restés.
— Ce lieu est un refuge, dit Ambre. À moins que vous
ne craigniez les pierres ?
Duncan ferma les yeux un instant. Les sens qui dor-
maient en lui lorsqu’il n’y avait pas de danger se réveillèrent
pour étudier la question. Leur vigilance ne décelant rien de
menaçant, ils retombèrent dans un sommeil éternel.
Ambre, dont la main était toujours jointe à celle
de Duncan, l’observait avec stupéfaction. Grâce aux
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INTERDIT
enseignements de Cassandra, elle savait que, même si un
mal ancien s’était jadis attardé près du cercle de pierres, le
mal était parti depuis longtemps.
Et Duncan le savait aussi, alors qu’il ne l’avait jamais
appris.
« Ce doit être un chevalier inconnu. Je suis idiote de
redouter qu’il ne soit le Fléau Écossais, l’ennemi d’Erik. »
— Il n’y a rien à craindre de ces pierres, dit-il enfin.
— Vous êtes un Érudit, affirma-t-elle.
— Non, ma sorcière d’or, répondit-il en riant. Je suis un
simple guerrier qui se bat avec ses propres moyens, y com-
pris sa tête.
En entendant le mot « sorcière », Ambre voulut protester,
avant de se rendre compte qu’il avait utilisé le terme avec
affection, et non sur un ton accusateur. Lorsqu’elle vit que
les yeux vifs de Duncan l’observaient d’un air amusé, elle se
dit qu’elle aimait être sa « sorcière d’or ».
— C’est cela même, être Érudit, dit-elle d’un air absent.
Utiliser sa tête.
— Dans ce cas, dit-il en regardant le cercle de pierres,
j’ai dû apprendre pendant la croisade ce qu’un chien de
chasse sait dès sa naissance. Le danger se sent et se ressent.
— Je pense qu’il y a plus que cela.
— Et je pense qu’il y a moins.
Duncan regarda Ambre du coin de l’œil. Elle l’observait
de ses yeux dorés et lumineux, avec une intensité qui lui
donna envie de la ravir à la fois tendrement et profondément.
— Venez, mon délice d’ambre.
— Ah, alors je ne suis plus une sorcière, mais un délice !
Vous devez être un Érudit !
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ELIZABETH LOWELL
Le sourire qu’il lui adressa était comme une caresse.
— Sorcière délicieuse, dit-il à voix basse. Asseyez-vous
avec moi contre cette pierre, et nous discuterons de ce qui
est Érudit et de ce qui relève du simple bon sens.
Un sourire aux lèvres, elle céda à son invitation et s’assit
dans l’herbe à ses côtés. La pierre qu’il avait choisie pour les
protéger du vent était plus grande qu’un homme. Sa surface
avait été creusée par le temps et l’air salé. Dans les sillons
aussi fins qu’une lame
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