Jack Nicholson
n’était vraiment pas approprié. Lui, Jack, devrait le réécrire. Il était plus facile de réécrire que d’écrire. Tout d’abord parce qu’on n’avait pas vraiment besoin d’écrire. On pouvait dicter à une secrétaire.
« Jack a un petit côté paresseux, dit Fred Roos. Je ne pense pas qu’il soit paresseux quand il travaille sur un rôle, mais si Jeremy pouvait écrire et que Jack pouvait bricoler après, c’était plus facile. »
Larner voyait les choses d’un œil différent. En le faisant attendre, en supervisant son travail, Jack ne faisait que chercher à le remettre à sa place, celle d’un « simple scénariste ». Cette attitude faisait partie du code officieux de la tradition hollywoodienne que Nicholson, l’étranger qui avait été propulsé sur le devant de la scène par Easy Rider, s’empressait désormais d’embrasser.
Au cours des dizaines d’interviews qui suivirent Easy Rider, Nicholson déclara qu’il allait dans le futur rechercher des scripts qui impliquaient des personnages profondément humains embrouillés dans des situations émotionnelles complexes. Les personnages qui l’attiraient étaient les « personnages charnières » qui ébranlaient les valeurs de la classe moyenne. « Il faut continuer à attaquer les spectateurs et leurs valeurs », disait Nicholson au cours d’une interview. « Quand on les caresse dans le sens du poil, on perd sa vitalité. »
Alors qu’elle ne semblait pas pressée de préparer les débuts de Jack dans la mise en scène, la société BBS jouait des pieds et des mains pour trouver un film dont Nicholson pourrait être la star, en surfant sur le succès d’ Easy Rider , et qui « attaquerait les spectateurs ».
Il était convenu d’avance que Rafelson s’occuperait de la mise en scène de ce film. Il s’était mis d’accord avec Jack. On pensait que Henry Jaglom pourrait peut-être écrire un script ayant pour sujet la gloire. Jack avait toujours été fasciné par les gens célèbres. Les sportifs, les stars du cinéma, les grands personnages historiques, les hommes politiques.
Ses amis se souviennent d’un incident qui se produisit à la convention nationale du Parti démocrate à Los Angeles en 1964. Lyndon Baines Johnson était sur le point d’être nominé par les démocrates. Jack, John Herman Shaner, Monte Hellman et quelques autres avaient réussi à se faufiler dans l’immense salle où se tenait la convention. LBJ descendit une allée, en donnant des poignées de main. Jack serra la main de LBJ et sembla ne pas vouloir la lâcher. Il la garda dans la sienne quelques secondes de plus que ce qui se fait habituellement. Ses amis purent voir les regards des agents de sécurité commencer à réagir face au problème. Mais Jack finit par lâcher la main. Il voulait juste savoir ce que cela faisait d’avoir dans sa main celle du Président.
Et c’était désormais lui qui goûtait à la sensation nouvelle de la célébrité. Il plaisantait en disant qu’il briguerait bien le poste de Président. Ça devait être un truc sympa. Alors qu’il se déplaçait dans tout le pays pour donner des interviews, l’acteur transportait une valise sur laquelle était placé un énorme autocollant de pare-chocs : NICHOLSON PRESIDENT . Ses amis se disaient qu’il ne plaisantait peut-être qu’à moitié.
C’était une époque surréelle pour Jack. Il était encore en train de s’adapter au feu des projecteurs, à l’inhabituel flux d’argent, au pouvoir qui venait avec la reconnaissance. S’il avait l’impression que le succès était son destin, il se sentait également maladroit et peu sûr de lui vis-à-vis de sa réussite. Il était dans une phase de transition et reflétait un incroyable mélange d’arrogance et de manque d’assurance, d’égocentrisme et de modestie. Son comportement était à la fois impitoyablement égoïste et étrangement humain.
Jack avait des surnoms pour tout, y compris pour la réussite. Il appelait la gloire et la fortune la « Big Wombassa ». Méfiez-vous de la Big Wombassa, disait Nicholson à ses amis. Qu’est-ce que c’est ? demandaient-ils. « Ce que vous croyez que vous allez obtenir mais que vous n’obtenez pas, répondait Jack énigmatiquement, quand vous obtenez ce que vous voulez. »
Rafelson parlait de tourner tout un film dans un train. Jaglom fit donc un long voyage en train et écrivit un script avec un sous-texte sur la guerre du Viêt Nam pour un
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