Jack Nicholson
le style du film, ils lâchaient leurs répliques tout en se jaugeant l’un l’autre. Brimmer, brut de décoffrage, est un syndicaliste au caractère bien trempé qui anticipe sur Hoffa : méprisant à l’égard du luxe de Hollywood, mais néanmoins rompu à la courtoisie des salles de conférence. Il dispute contre Stahr une féroce partie de ping-pong, puis Stahr va trop loin dans la calomnie des rouges, et Brimmer finit par lui en mettre une. Pinter, le scénariste, savait-il que le tennis de table était le sport préféré de Jack, ou s’agissait-il d’une coïncidence ?
C’étaient là les scènes privilégiées d’un film sous-estimé et élégant, le dernier du réalisateur aguerri qu’était Kazan, l’homme qui avait aidé Brando à lancer sa carrière dans le théâtre et le cinéma. Au sein de son casting stellaire, on trouvait Anjelica Huston – qui n’avait aucune scène avec Jack –, dont le personnage était confondu avec un autre par Monroe Stahr. Huston jouait son petit rôle ingénieusement (« Je suis actrice. Je vais devenir actrice ! ») et replongeait un pied dans les eaux du show-business.
Le secret de June avait été tu par la presse. En privé, certains des amis de Jack se demandaient quand l’acteur allait se rendre dans le New Jersey pour rencontrer l’homme qui prétendait être son père. Mais dès que le sujet était soulevé, cependant, Jack faisait clairement comprendre qu’il ne souhaitait pas en parler.
Jack ne reprocha pas à Shorty de lui avoir caché quelque secret que ce fût. Jack ne reprochait jamais rien à Shorty. Le poids des reproches tomba sur les épaules de Lorraine. Il trouvait qu’elle aurait dû se montrer honnête avec lui, au moins après la mort d’Ethel May ; elle aurait dû lui dire, ne pas le laisser apprendre l’histoire de sa naissance de la bouche d’un étranger, d’une voix de l’autre côté d’un combiné.
Un froid se développa petit à petit entre eux. La relation de Jack à sa « sœur-tante », déjà ébranlée, allait se compliquer encore à cause de l’autre femme de la vie de Jack – Anjelica Huston.
Lorraine et Anjelica n’avaient jamais accroché. Elles n’avaient rien en commun, excepté Jack. Lorraine aimait passer quelques jours avec Jack lorsqu’elle venait rendre visite à ses enfants en Californie. Jack avait toujours fait en sorte qu’elle se sente chez elle. Les choses changèrent quand Anjelica fut entrée dans sa vie. Sa présence mettait Lorraine mal à l’aise. Anjelica occupait désormais la chambre que Lorraine aimait avoir lorsqu’elle venait. S’il se trouvait que l’actrice était en bons termes avec Jack au moment de sa venue, Lorraine préférait plier bagage ou s’arranger autrement.
Nicholson fit peu d’efforts pour amener Anjelica à Neptune et ne chercha pas à l’exhiber comme il l’avait fait avec Michelle Phillips. D’ailleurs, on commençait à avoir l’impression qu’il cherchait à éviter complètement Neptune.
Jack passait tous les ans deux semaines à New York. Il aimait séjourner à l’élégant Carlyle Hotel, faire un peu de promotion pour ses films, boire du vin, dîner au restaurant, se promener, voir quelques pièces et quelques films. Dans le passé, il avait toujours mis un point d’honneur à se rendre en voiture jusqu’à Neptune au cours de ces séjours. Après son coup de téléphone à Lorraine au sujet de June, il cessa de venir aussi régulièrement. Et quand il venait, il ne semblait pas heureux d’être là et se sentait gêné et amer lorsqu’il tombait par hasard sur de vieux amis qui lui demandaient de leur prêter de l’argent ou d’investir dans une affaire ou une autre.
Alors qu’il était à New York pour la promotion de Vol au-dessus d’un nid de coucou, au cours de l’automne 1975, Jack fit « le foufou » (d’après un ami, cité dans Cosmopolitan) avec deux mannequins au cours d’une « soirée de course aux jupons » (Ladies ’ Home Journal) dont tous ses amis, et la grande majorité des journalistes, semblèrent avoir entendu parler.
C’était loin d’être la première fois. Et les divertissements de ce type n’étaient pas limités à ses excursions sur la côte est. À Los Angeles, Nicholson pouvait rester assis chez lui et dispatcher ses chauffeurs de limousines en leur demandant d’aller chercher d’obscures et célèbres jeunes femmes. Photoday, en 1976, dressa la liste des top models avec qui
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