Jack Nicholson
c’est parfois difficile à dire – en modifiant encore les modifications de Towne. Nicholson effectuait souvent ces changements passionnés de dernière minute la veille du tournage des scènes. D’après certaines sources, il lui arrivait parfois de rester éveillé jusqu’à cinq heures du matin, en feuilletant le script, et de ne s’octroyer que trois heures de sommeil avant de se lever pour aller travailler, les yeux troubles, sur la mise en scène.
Les conversations entre Nicholson et Towne devinrent moins régulières et plus tendues. Quelques semaines avant la fin du tournage, Towne partit pour Bora Bora afin de consacrer tout son temps à Jours de tonnerre. Nicholson considéra cela, de façon très caractéristique, comme une forme de désertion, tandis que Towne, qui était las de Jack et de The Two Jakes, pensait qu’il avait fait tout ce qu’il pouvait.
Anne Goursaud, le monteur de The Two Jakes, déclara à la presse que Nicholson s’était senti « abandonné » par Towne. « Jack ne le dira jamais, expliqua Goursaud. C’est un Irlandais – les Irlandais n’expriment jamais ce genre de choses. Mais il veut pourtant que les gens comprennent les sentiments qu’il éprouve et les prennent en compte. Malheureusement, dans le monde dans lequel nous vivons, les choses ne se passent pas toujours ainsi – en particulier quand on a affaire à un autre talent narcissique qui voit les choses à sa façon. »
En public, Nicholson resta évasif vis-à-vis de ce qui s’était passé entre lui et Towne ; il laissa les autres donner l’impression que le scénariste s’était défilé. De même, Towne n’évoqua que très peu le sujet. Contacté pour les besoins de cet ouvrage, il a répondu via un intermédiaire qu’il trouvait qu’il ne valait mieux pas qu’il parle de Nicholson étant donné qu’il était toujours fâché avec lui.
« On croit qu’on connaît ses vieux amis », déclara Towne, déçu, à un journaliste de Premiere. « On lit des choses sur eux partout, ce sont des personnalités publiques. Et ce sont vos proches amis, et tout à coup, on s’aperçoit qu’on ne passe pas plus de quelques jours par semestre avec ces personnes, et qu’on a peut-être eu un sentiment de fausse intimité, conséquence du fait que nous sommes exposés indirectement à nos amis de la même façon que l’est le public. »
La saga tortueuse du script et les frictions de Nicholson et de Towne n’étaient que la face immergée de l’iceberg. D’autres problèmes, dans les coulisses de The Two Jakes, tendaient en effet à créer sur le plateau une ambiance tendue, voire lugubre.
Les révélations de Playboy, la nouvelle de la grossesse non désirée de Rebecca Broussard, et la rupture de Jack et d’Anjelica, tout cela s’était produit à la veille du début du tournage de The Two Jakes, au cours de l’automne 1989.
Jack se sentait déjà d’humeur morose, et les choses ne firent qu’empirer lorsque le chaos de sa vie privée fut dévoilé au public. Il se sentait sous pression, une pression qu’il avait lui-même fait peser sur ses épaules – ses seules épaules – à l’idée de faire un film qui devait égaler Chinatown. À l’idée de faire un manifeste définitif qui dirait : Jack Nicholson.
La rumeur à Hollywood continuait de prétendre que la drogue que Nicholson prenait en dehors de ses heures de travail consumait son énergie. Les gens disaient que parfois, sur le plateau, le réalisateur parlait mal à ses acteurs. Ces explosions de colère étaient révélatrices du stress qu’endurait Nicholson, car c’était un homme qui adorait jouer la comédie et qui s’était toujours comporté respectueusement avec les autres acteurs. La plupart des récits des témoins semblent confirmer l’idée de nuage noir qui semblait flotter au-dessus de la tête du réalisateur-star.
« Sa bienveillance légendaire disparaît occasionnellement dans des accès de colère », écrivit un observateur du Los Angeles Times Magazine.
« Avec une inflexion de sa voix, Mr Nicholson pourrait transformer de l’eau bouillante en glaçons », fit pour sa part remarquer Aljean Harmetz dans The New York Times Magazine.
« L’ambiance triste qui a marqué ce tournage a été profonde et persistante », put-on lire dans Premiere.
Certaines scènes paraissaient refléter son désespoir. La scène de sexe de Jack et de Madeleine Stowe, notamment, était révélatrice. Elle
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