Jack Nicholson
dormirais beaucoup mieux », déclara l’acteur-réalisateur. Le film s’attachait à donner une image héroïque de cet homme dur dont l’idée du syndicalisme était qu’il fallait brûler les petits magasins de quartier et piller les pensions. Les liens que Hoffa entretenait avec la mafia étaient expliqués de façon compatissante, tandis que Robert Kennedy, qui avait mené une croisade contre Hoffa – et qui était un héros pour beaucoup de membres de la génération des sixties – était présenté comme un mou (un angle qui donnait moins d’indications sur Kennedy que sur les cinéastes).
Le film générait une vision stupide de l’histoire mais de puissantes prestations de comédiens. Au début, Nicholson avait été perçu comme un nouveau Henry Fonda. Siskel et Ebert, dans l’une de leurs émissions télé, avaient comparé sa carrière à celle de Bogart. Les réalisateurs qui travaillaient avec lui disaient souvent que Nicholson était de la même étoffe que Spencer Tracy, notamment pour ce qui était de son professionnalisme déterminé, de sa maîtrise technique, et de l’image de plus en plus légendaire qu’il semblait acquérir auprès des autres acteurs.
Mais cette fois-ci, Nicholson joua le personnage comme seul Cagney aurait pu le faire. Il avait les pantalons de marche, les crispassions nerveuses du cou et le doux clapotis qui pouvait tout à coup jaillir comme la lave d’un volcan. Comme d’habitude, il y avait l’extérieur lumineux et l’intérieur mystérieux. Hoffa fut la plus éblouissante des compositions sobres de Jack, les meilleures scènes du film étant les plus calmes situées dans le présent de la structure en flash-back de Mamet, telle celle où Hoffa, âgé et provoquant, s’assoit dans le parking d’un restaurant pour routiers dans l’attente de l’inévitable balle qui viendra l’arrêter.
Hoffa figura dans les listes des « pires » et des « meilleurs » films de l’année 1992. David Mamet avait écrit d’excellentes scènes, mais la ligne narrative du film était aussi embrouillée que celle de The Two Jakes. Les mouvements de caméra de DeVito semblaient parfois fluides, parfois incontrôlés. Par ailleurs, on aurait dit que l’acteur-réalisateur se croyait à tort l’inventeur du travelling aérien.
Mais il y avait Nicholson : comme un homme toujours debout, tenace et fier, passant un chambranle de porte vide après qu’un ouragan eut détruit sa maison tout autour de lui. Le film était semblable à sa vie, teinté de mensonges et de désordres, mais au bout du compte fabuleux. Jack avait créé un Hoffa très Jack – dur, intelligent, solitaire, paranoïaque, condamné.
Il était enfin là, le grand sujet biographique à côté duquel il était toujours passé : la Big Wambassa. Jouer sa propre gloire, c’était pour lui une mise à l’épreuve, tout comme jouer sa propre intelligence. Désormais, certains réalisateurs intelligents pouvaient sans doute imaginer Nicholson, avec un maquillage tout aussi subtil, hanter d’autres grands hommes : Richard Nixon, Jackson Pollock, Henry Miller, Fidel Castro – des personnalités dures et obstinées qui ne laissaient personne leur mettre des bâtons dans les roues et qui étaient célèbres pour leur refus de la perplexité et des changements d’opinion.
Alors que Hoffa en était aux dernières étapes de sa post-production, au milieu du mois de septembre 1992, on commença à murmurer que Nicholson et Rebecca Broussard avaient rompu. Nicholson ne désirait pas épouser la mère de ses enfants.
Mais il s’agissait là de rumeurs auxquelles il était difficile d’accorder crédit. Army Archered de Variety, qui écrivait beaucoup d’articles loyaux vis-à-vis de Nicholson, qualifia la rumeur de « ridicule » et informa ses lecteurs que Jack et Rebecca avaient assisté au débat Clinton-Bush et étaient ensuite allés voir ensemble un match de basket.
Mais la rumeur persistait. Un journaliste d’ Entertainment Weekly (8 janvier 1993) déclara que les deux célébrités avaient définitivement rompu. Une semaine plus tard, dans le Star (19 janvier 1993), un tabloïd de supermarché, on put lire qu’il y avait bien eu rupture, mais que le couple s’était depuis réconcilié et que Jack et Rebecca s’étaient engagés à rester ensemble.
Les amis de Nicholson disaient que l’ironie du sort, c’était que l’on pouvait dire que Jack était sincèrement amoureux de
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