Jack Nicholson

distribution avait été signé avec Allied Artists. Mais les producteurs novices avaient besoin de davantage d’argent pour financer leur projet. Kramarsky était donc allé trouver Roger Corman, pour qui il avait travaillé sur un certain nombre de films en qualité d’assistant et de directeur de production. Or, Corman avait conclu un pacte concernant la production avec Allied Artists. The Cry Baby Killer s’accordait donc bien avec les projets de tous.
    Autre ancien étudiant du Ring et habitué des cours de Jeff Corey, Tom Pittman s’était vu provisoirement accorder le premier rôle. Pittman commençait à faire parler de lui à Hollywood, et Kramarsky le perdit au cours des négociations. Il se souvint alors du physique bien propret de Nicholson et de sa sensationnelle lecture. Jack était un pari risqué : il n’avait à cette époque aucun film à son actif. Kramarsky téléphona à Jeff Corey pour lui demander son avis. Le professeur de comédie répondit que Nicholson méritait qu’on lui laisse sa chance.
    « On lui a fait faire une autre lecture, et on s’est dit qu’on pouvait lui donner le rôle », se souvient Kramarsky. « Je lui ai demandé quel âge il avait, parce que très souvent, on apprenait que ces soi-disant adolescents avaient en fait 40 ans. Quand il m’a dit qu’il avait moins de 21 ans, je me suis dit que c’était bon. »
    « Il avait exactement le visage que je recherchais – beau, mais pas trop, juste agréable. Sa voix était bien aussi – elle n’était pas trop menaçante ou effrayante. Il n’était absolument pas insipide ou éthéré. C’était un personnage qui se créait des problèmes simplement à cause des autres garçons qu’il fréquentait. C’était le gentil de l’histoire. Je trouvais que son accent faisait très Midwest, ce qui n’est pas le cas – une voix presque nasillarde. »
    La version des évènements qui a été contée dans des dizaines d’interviews, et qui est d’ailleurs relayée dans la propre autobiographie de Roger Corman, How I Made a Hundred Movies in Hollywood and Never Lost a Dime, est que le producteur délégué Corman, après avoir observé Nicholson dans les cours de Corey, offrit au jeune acteur son premier rôle au cinéma. Cette découverte est devenue l’une des pierres d’angle de la légende de Corman. Jack n’a jamais démenti la version de Corman, et ce sans doute parce que d’une façon ou d’une autre, le producteur a vraiment permis a beaucoup de gens de faire leurs débuts.
    Il se peut également que Jack lui-même n’ait pas eu véritablement conscience de la façon dont se sont réellement déroulés les évènements. Kramarsky s’est montré catégorique lorsqu’il a affirmé, au cours d’une interview, que Corman n’était pas aux États-Unis, mais en Extrême-Orient – « Roger n’était même pas à Los Angeles » – au moment où les décisions concernant le casting avaient été prises. L’autobiographie de Corman, dans laquelle on peut pourtant lire que « Jack était le meilleur de tous les acteurs qui avaient lu le rôle » confirme que durant la pré-production de The Cry Baby Killer, le riche producteur s’était absenté un mois pour faire le tour du monde et visiter les îles Fidji, Sydney, Tokyo, Manille, Bangkok, Rangoon, New Delhi et Le Caire.
    « Roger est rentré à L.A. , dit Kramarsky, et nous lui avons expliqué ce qui s’était passé, que nous avions confié le rôle à Jack Nicholson, et Roger a dit : "Ah oui, j’assiste aux cours de Jeff Corey et Jack Nicholson fait partie de ses étudiants. Je l’ai vu jouer des scènes et il m’a paru très talentueux. C’est parfait." »
    Le temps de répétitions, composé simplement de lectures rapides et de discussions, était limité. Kramarsky se souvient que Georgianna Carter était toujours dans les parages au cours des répétitions et du tournage à chuchoter à l’oreille de Jack. « Il était tout le temps avec Georgianna, affirme Kramarsky. J’ai toujours pensé qu’ils allaient se marier. C’était une véritable histoire d’amour. »
    Le film fut produit au milieu du mois d’octobre 1957. Le tournage, qui dura deux semaines, eut lieu aux Carthay Studios de Pico, et quelques extérieurs nuit furent filmés au restaurant drive-in qui se trouvait de l’autre côté de la rue.
    Le chef opérateur était le très expérimenté Floyd Crosby (père du musicien rock David Crosby de Crosby, Stills