Jack Nicholson
grands espoirs que tout le monde avait mis en lui. Le jeu de Nicholson est particulièrement affecté. Son personnage, qui prend un plaisir malsain à étrangler des femmes, ne se détache jamais. On comprend bien pourquoi la Twentieth Century Fox a gardé le film dans ses tiroirs pendant plusieurs années avant de le proposer à la télévision.
À cette époque, en 1965, la non-sortie de Flight to Fury déçut amèrement l’équipe de production. Hellman et Nicholson jurèrent de ne plus jamais retravailler avec Lippert. De toute façon, le contrat qu’avait Lippert avec la Twentieth Century Fox expira en 1966, et le producteur, affaibli par une série de crises cardiaques, cessa d’œuvrer dans ce domaine.
Jimmie Rodgers se souvient avoir invité Jack à une grande fête de Noël en 1965. « À l’époque, j’avais une immense maison dans la vallée, 600 mètres carrés de plain-pied, relate Rodgers. Il y avait un orchestre dans le jardin, et on avait mis des tentes partout. J’avais une table basse à 600 dollars incrustée de verre. Il y avait plein de trucs comme ça dans tous les coins. C’était un peu ostentatoire, mais amusant. Il y avait beaucoup de gens du cinéma. Jack était là, et je me souviens l’avoir vu adossé contre le mur, à côté du grand ensemble télévision-stéréo en chêne blanc, en train de regarder toute cette scène, l’air fasciné. Il ne buvait pas – ce n’était pas un type qui buvait beaucoup. Je me souviens très bien de lui, immobile, regardant la pièce. Je suis sorti puis je suis revenu, et il était toujours là. Il avait un regard qui semblait vouloir dire : "C’est donc à ça que ça ressemble." »
Mais d’autres déceptions survinrent : alors que Hellman et Nicholson étaient aux Philippines, Roger Corman prit la décision de ne pas développer le projet du script sur l’avortement, Epitaph. « Il a dit qu’entretemps, il avait changé d’avis, se souvient Hellman. Il ne voulait plus faire ce film. Il le trouvait trop européen, trop artistique. Il disait que le sujet de l’avortement était trop délicat pour le public américain. »
Plutôt que de rejeter tout en bloc, Corman se mit à discuter avec Hellman et Nicholson de ce qu’ils pourraient faire à la place. Hellman se lança dans un discours passionné. La plupart des gens faisaient des films de série B avec un budget de série B, dit-il. Lui et Jack voulaient que Corman leur donne la chance de faire un film A avec un budget B.
Alors qu’ils déjeunaient au Brown Derby de Vine Street, la veille de Noël 1964, Hellman et Nicholson eurent l’idée de faire un western de série B avec des nuances de série A. Comme les westerns étaient toujours très en vogue, Corman accepta sans hésiter. Hellman estima les coûts de production à environ 75 000 dollars. Corman réfléchit un peu et finit par se dire que s’il finançait un western de Hellman et Nicholson, il pouvait en financer deux. Avec sa logique habituelle, il pensait qu’il pourrait économiser de l’argent en tournant deux films en même temps.
Au cours des discussions avec Corman, Hellman et Nicholson insistèrent sur l’aspect bon marché et sur les lieux communs du western, pas sur les nuances – le B, pas le A.
D’une certaine façon, d’après Nicholson, ils « trompèrent » Corman. « Roger voulait de bonnes scènes de tomahawk, avec plein de ketchup, a expliqué Nicholson au cours d’une interview, mais Monte et moi, on voyait ces films sur un autre niveau. »
L’avance de plusieurs milliers de dollars que fit Corman permit à Hellman et Nicholson d’ouvrir un bureau dans l’immeuble de la Writers Guild, sur Santa Monica Boulevard, où ils s’installèrent le 2 janvier 1965. Pour une raison mystérieuse, Corman ne voulait pas trop afficher son implication dans le projet et souhaitait masquer son investissement. On décida donc que Hellman et Nicholson se feraient passer pour coproducteurs. Le premier film serait davantage rattaché à Monte Hellman (« une production Santa Clara ») tandis que le second serait davantage lié à Nicholson (« Proteus Films xxii »).
Il fut décidé que Carole Eastman écrirait le premier western sous le nom de plume d’Adrien Joyce, tandis que Nicholson rédigerait le second. Hellman superviserait les deux projets mais accorderait aux scénaristes la même liberté qu’il leur avait donnée pour les films philippins. Il était évident que Millie
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