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Je Suis à L'Est !

Je Suis à L'Est !

Titel: Je Suis à L'Est ! Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Josef Schovanec
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d’attendre l’instant où, à l’approche du point final, les verbes accumulés allaient se loger, impeccablement conjugués, au bon endroit, un peu comme quand, à l’issue d’une longue série de formules, le matheux enclenche des mécanismes qui par miracle, soudain, donnent le résultat parfait. Un autre professeur, français cette fois, spécialiste du sacré, avait évoqué un phénomène intrigant, que j’avais déjà observé étant enfant : pourquoi la liturgie sacrée en allemand, c’est-à-dire dans un allemand non seulement extrêmement formel mais légèrement archaïsant, avait un tel effet émotionnel, contrairement à la même liturgie en français ? Mystère. Peut-être que sans la complexité hors du commun de la syntaxe et de la grammaire sanskrites, cette langue non plus n’aurait pu devenir langue sacrée pour des millénaires. Je ne sais.
    L’autre facette de l’allemand que je n’allais découvrir que plus tard est son aspect historique. Réduire l’allemand à l’Allemagne, c’est faire une erreur grossière. L’Allemagne en tant que pays constitué aujourd’hui n’a qu’un rapport ténu avec la culture de langue allemande. Rarement j’ai ressenti une telle émotion en lisant certains vieux textes d’une Europe centrale disparue, où l’allemand était ce qui donnait être à toute vie de l’esprit. La même que quand, un soir, j’arrivai après un long voyage à la Piata Trandafirilor, la place historique de Targu Mures, en Transylvanie, pour y découvrir, malgré les noires décennies d’une histoire terrible, les traces d’un passé perdu où magyar et allemand étaient des biens partagés.

    Diversifications
    L’anglais est arrivé beaucoup plus tard. Je n’ai commencé à suivre des cours qu’en quatrième, une heure ou deux à peine par semaine. Au collège comme au lycée, je n’attachais guère d’importance à cette langue.
    Mon apprentissage effectif est venu d’un phénomène marginal : mes parents avaient acheté un premier ordinateur, d’une marque assez inhabituelle, et dont les manuels étaient en anglais. Je commençais à les lire, avec sans doute une compréhension assez difficile au début.
    La particularité de l’anglais est que beaucoup de ses mots sont apparentés au français ou à l’allemand : même sans avoir suivi des cours sérieux, et si on connaît l’allemand et le français, on peut se faire une petite idée de ce que dit un texte, surtout quand il est technique.
    Par la suite, j’ai eu ma période grec ancien. Je ne suis pas allé très loin, mais j’ai passé un ou deux étés à ne faire quasiment que cela. Hélas, je n’ai jamais su mener cet effort à quelque chose de constructif. Un jour peut-être suivrai-je un cursus plus sérieux. Peut-être suis-je quelqu’un de profondément pervers, au sens premier du terme, car ce n’est pas tellement le grec ancien qui m’attirerait aujourd’hui, mais plutôt le grec byzantin, cet entre-deux assez captivant.
    Le grec me semblait nettement plus attirant que le latin, qui n’a jamais eu ma sympathie, sauf, beaucoup plus tardivement, celui de la fin du Moyen Âge, qui a un côté plaisant, toujours en lien avec mes obsessions autour des livres comme La Nef des fous –  peu importe que ces ouvrages du Moyen Âge tardif ou de la Renaissance soient dans leur original en latin ou une autre langue, ils ont un cachet très particulier que j’assimile à un type de latin. Il est de ces différents textes assez extraordinaires où le latin est un peu bizarroïde, mêlé à toutes sortes de langues, toujours entre le plus grand sérieux et la pantalonnade, le recul des siècles ayant au demeurant souvent inversé les deux. Sinon, le latin a quelque chose d’antipathique pour moi : j’ai l’impression d’être confronté à une plaque de marbre froid. La flamme ne prend pas. J’ai essayé, pourtant. Alors que je trouve la grammaire grecque attachante dans la sonorité, les manières d’écrire, et même les lettres ; il y a quelque chose de beaucoup plus chaleureux, de

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