Je Suis à L'Est !
propre à lâépoque, où on pouvait enchaîner des références qui, en apparence, nous paraissent purement pédantes tant quâon ne voit pas quel est le sens derrière. De fait, il nâest pas plus pédant en soi de citer un auteur classique que dâévoquer tel film qui passe au cinéma actuellement.
Ces livres de la Renaissance, pour beaucoup, évoquent des voyages intérieurs et extérieurs, la différence étant fort mince entre les deux. Tout un défilé des mondes, des modes, des êtres. Aujourdâhui, on nâécrit plus des livres similaires. Si lâon prend au hasard un ouvrage publié récemment sur ce qui pourrait être lâéquivalent de la folie, sur le trouble du spectre autistique par exemple, que dire de la comparaison⦠Nous avons gagné sur le plan technique toutes sortes de classifications, mais que nâavons-nous pas hélas perdu en route ! En somme, être normal est bien triste. Je préfère la compagnie des fous. La Nef partie, étant resté à terre je ne peux que rêver de meilleurs rivages.
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La vie associative, stade ultime de lâautisme ?
Bien que le constat ne soit pas dressé de manière aussi explicite, il est socialement admis que les membres, réels ou supposés, dâune minorité reconnue comme telle puissent faire usage dâun vocabulaire qui serait répréhensible dans la bouche de la population en général. Ãtrange phénomène, soit dit en passant, qui renvoie aux problématiques de la constitution de lâidentité par la mise à lâécart. Je ne crois pas que ce « privilège de langue » soit particulièrement usité parmi ceux qui sâidentifient à la communauté autistique, du moins en comparaison avec ce qui se pratique dans dâautres groupes. Toutefois, jâai pu entendre un certain nombre de plaisanteries, certes non nécessairement des plus fines mais sans pour autant perdre de leur véracité eu égard au sujet traité, par exemple sur lâautisme et les hommes politiques. Câest à ce titre que je me permettrais de dire que plus dâun trait fâcheux attribué par les préjugés communs à lâautisme sâapplique, en fait, au « petit monde de lâautisme » au sens où nous pourrons comprendre lâexpression, à savoir tout ce qui gravite autour de lâautisme, en particulier en termes associatifs.
Reformulé autrement, quelquâun mâavait dit que lâautisme en France était concerné par deux drames : celui de sa méconnaissance et celui de sa connaissance, le premier étant lâexclusion de la société non sensibilisée en général, le second regroupant moult travers des associations et mouvements spécialisés.
Toujours la même idée, dite de manière plus provocatrice : quel est lâendroit où on risque le moins de croiser des personnes autistes ? Dans les événements organisés autour de lâautisme. à moins que le terme « autiste » reçoive une définition différente, englobant désormais la quasi-totalité des présents.
Ultime façon de redire la mise en garde, un peu à la manière du message à lâentrée de lâenfer de Dante : une amie, jeune psychologue, avait opté comme lieu de son stage dâétudes pour une certaine association bien connue dans le domaine de lâautisme. Au bout de quelques mois, paniquée, elle me téléphona pour mâappeler au secours â une amusante inversion des rôles dont jâai plus dâune fois été témoin. Psychodrames à répétition plus tard, elle constate aujourdâhui, avec le recul, quâau fond ses vÅux ont été exaucés : elle qui voulait un stage en psychopathologie a eu le nécessaire, et même plus. à ceci près que les aliénés nâétaient pas, au sein de lâassociation, ceux quâon lui avait désignés de prime abord.
Vétérans et compagnons de route : un carnage
Chaque guerre a ses « gueules cassées ». La guéguerre de lâautisme a un turn-over inquiétant, mais qui, à ma connaissance, nâa jamais suscité dâinterrogations en « haut lieu », si tant est quâun semblable lieu
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