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Je Suis à L'Est !

Je Suis à L'Est !

Titel: Je Suis à L'Est ! Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Josef Schovanec
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merveilles, à la création. À l’inverse, les pays catholiques tendent à valoriser davantage la psychanalyse, bien que naturellement les choses évoluent.
    Quel qu’en soit l’arrière-plan, la parole génétique acquiert un pouvoir social remarquable. Notre époque, même si elle ne se l’avoue guère, la valorise au-delà de tout. Prenons le cas du diabète. Ce dernier est issu d’une multiplicité de facteurs, biologiques, sociaux et idiopathiques (ou indéfinissables). La découverte d’un gène lié au diabète fait sensation, l’équipe impliquée est fortement récompensée. Alors même que le taux d’explication du gène en question est relativement faible, notamment par rapport à des facteurs non génétiques, qui eux sont passés sous silence, tant dans la presse scientifique que non scientifique. Une recherche analogue sur je ne sais quel facteur lié par exemple au mode de vie n’aurait pas connu un tel succès d’estime, et de loin. Mieux encore : il n’y a pas si longtemps, les journaux avaient rapporté, enthousiastes, la découverte d’un gène de l’infidélité. Enfin, nous avions l’explication.
    Naturellement, la recherche génétique dans l’autisme est plus sérieuse que dans l’exemple qui précède, encore que la méthodologie soit la même. Il n’en demeure pas moins que rares sont les gènes individuels qui ont un large pouvoir explicatif de l’autisme et vont au-delà d’un petit nombre de cas et de formes spécifiques d’autisme. Le professeur Thomas Bourgeron, en pointe sur ces questions et recherches, et pour qui j’ai beaucoup d’estime et d’amitié, est d’ailleurs d’une modestie remarquable, que les moins experts et non experts sont hélas loin de partager.
    La croyance béate dans le pouvoir de la génétique peut recevoir deux critiques additionnelles. D’une part, comme je m’efforcerai de le développer dans le chapitre suivant, je pense que l’autisme devrait faire l’objet d’une étude pragmatique, problème après problème. Dans une telle approche, les difficultés à trouver un emploi, par exemple, devraient être prises au sérieux en tant que telles, non en tant qu’épiphénomène d’un facteur génétique. Un lien causal que j’ai beaucoup de mal à qualifier autrement que hautement hypothétique, plus encore que le gène de l’infidélité par rapport à l’infidélité effective. D’autre part, la génétique, science jeune, se cherche encore. Ses praticiens sont d’ordinaire nettement moins dogmatiques que ses amateurs en herbe. Son histoire est plus complexe que ce que l’on croit : souvent, on pense que la science, portée par Darwin, Mendel et autres, se serait imposée face à la religion obscurantiste pour donner la génétique. Ceci est une simplification outrancière, tant ces auteurs ont travaillé séparément, parfois dans l’hostilité, et elle ignore les tâtonnements multiples de toutes ces disciplines. Une vérification simple permet de constater que fort peu de gens ont lu Darwin. La plupart sont même surpris que l’on envisage de leur proposer de lire un auteur qu’ils « connaissent ». Aujourd’hui, la génétique est, si j’ose dire, toujours en pleine mutation. Des pans entiers de la discipline émergent. Ce qui hier encore était remisé dans un coin sous le titre « empreinte parentale » est aujourd’hui une science à part entière, l’épigénétique. À ce titre, je dois remercier, là aussi, Jean Claude Ameisen, éminent scientifique et grand monsieur, pour son enseignement.
    Pour moi, en tout cas, le moment le plus triste, le plus déprimant, serait celui où on réussirait à dresser un modèle systématique, qu’il soit génétique ou autre, de l’être humain. C’est également pour cela que je ne peux qu’être sceptique vis-à-vis de cet ouvrage que pourtant j’avais tant apprécié dans mon enfance, L’Homme neuronal , du professeur Changeux. C’est peut-être par un acte de foi, ou de mauvaise foi, que je pense que cette modélisation ultime n’arrivera pas de

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