Je Suis à L'Est !
se préparer et parler ; jâavais eu un certain nombre dâentraînements à Sciences Po à cet égard ; ou même quand jâétais gamin, mes parents me laissaient parler dâastronomie et dâautres sujets. Jâavais déjà une certaine habitude.
Ce qui est beaucoup plus difficile, câest avant et après. Avant, parce que vous devez venir dans tel ou tel endroit. Affronter les contacts avec les gens, souvent des inconnus, qui attendent mille merveilles de votre propos. Les mieux intentionnés essayent de vous déstresser, par une méthode qui ne fait quâaugmenter le stress. Pour leur faire plaisir vous devez faire semblant que cela marche. Et vous vous dites : je dois être encore plus anormal que prévu, parce que les méthodes, les petites phrases qui sont censées calmer le stress ne marchent pas pour moi.
Autre problème : à quelle heure et comment devez-vous venir exactement ? Si vous avez, par exemple, une conférence à 19 heures, quelle est lâheure effective de votre présence que cela implique ? Il y a une petite anecdote que je ne résiste pas à raconter. Récemment, jâétais dans les studios de France Culture pour une émission qui devait commencer à 14 heures précises. Une des deux personnes qui devaient mâinterviewer est arrivée en courant à 13 h 58 et 40 secondes. Lâautre intervieweur, qui était déjà là , a dit en rigolant à celui qui arrivait : « Ah, tu es en avance aujourdâhui ! Câest pas dans tes habitudes ! » Alors que moi, on mâavait demandé dâêtre impérativement là à 13 h 30 au plus tard. Faut-il comprendre que pour être un habitué de la maison on doive mépriser les instructions de la maison ? Les conférences, elles, ne commencent jamais à lâheure. Donc si lâhoraire théorique de début est 19 heures, on peut très facilement arriver à 19 h 15, voire plus tard encore.
Il peut paraître un peu mystérieux que je ne fasse apparemment pas lâeffort de venir un peu en avance quand je le peux. Câest ce que je faisais au début. Mais soit je trouvais porte close, dâoù la conviction stressante dâavoir été oublié ou de mâêtre trompé de lieu, soit jâétais entouré de gens exigeant de moi une conversation informelle â que je sais mener de mieux en mieux, il me semble, mais tel nâétait pas le cas il y a quelques années.
Autre question : que mettre dans son sac ? Au début, je prenais un peu de tout : des sandwichs, des boissons, deux parapluies parce que le premier peut se casser, et ainsi de suite. En apparence, plus vous êtes équipé, mieux cela vaut, à ceci près quâun sac horriblement lourd peut être la source de bien des tracas.
Ces temps-ci, lors des conférences, je me sens beaucoup moins anxieux quâavant. Une bonne chose en apparence, pourtant je me sens quelque peu coupable car je me dis que, sur le plan éthique, il faudrait être anxieux avant les conférences. Ne pas lâêtre est quasiment une marque de je-mâen-foutisme ou de non-prise au sérieux des attentes des autres personnes. Jâai ce type de préoccupation, dâinquiétude.
Après la conférence vient lâautre moment : à quelle heure est-ce que vous pouvez partir ? Pouvez-vous abandonner un groupe de gens qui veulent vous parler ? Le mieux est quand vous avez un horaire impératif de train ; cela vous donne une justification géniale pour pouvoir tirer votre révérence. Mais ce nâest pas toujours le cas.
Un autre paramètre à prendre en compte est le nombre de personnes présentes. Il est très différent de faire une présentation à dix ou quinze personnes, et de faire une présentation à plusieurs centaines. Le type de comportement des gens évolue par seuils. Il y a un premier seuil, que je situerais de manière totalement empirique, non scientifique, à peut-être 25 ou 30 personnes ; en deçà , les gens se sentent encore individualisés, et cela peut créer une certaine gêne parce que, quand ils posent une question, ils évaluent dâabord les regards de chacun des autres présents. Et lâautre seuil, le seuil supérieur,
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