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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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exorbités, les cheveux hérissés, Thibaud demeurait pétrifié au milieu de la chambre où il venait d’entrer. Il était devenu très pâle, c’est-à-dire que son visage avait pris les teintes de la rose au lieu de celles de la brique. Enfin, un soupir gonfla sa vaste poitrine, et il put balbutier :
    – Le chevalier de Passavant !…
    – Fermez donc la porte, par la Croix-Dieu !…
    – Je rêve, je rêve ! bégayait Thibaud.
    – C’est moi que vous empêchez de rêver. Maître Thibaud, je vous préviens que si cela continue, je quitterai votre auberge et irai m’installer ailleurs…
    – Quoi ! C’est vous ! C’est bien vous que je vois !…
    – Et qui voulez-vous que ce soit ? dit le chevalier qui éclata de rire et se souleva sur le coude.
    Il était allongé sur le lit, tout habillé, et paraissait sortir d’un profond sommeil. À ce moment Tanneguy du Chatel, étant entré, referma la porte en disant :
    – Monsieur le chevalier a tout à fait raison. Il fait froid, et vous êtes un drôle, maître Thibaud, de laisser ainsi les portes ouvertes.
    En un clin d’œil, Passavant fut sur pied et, sans avoir l’air d’y toucher, alla décrocher sa rapière qu’il ceignit aussitôt. Puis, saluant Tanneguy :
    – Monsieur, dit-il, vous êtes le bienvenu chez moi…
    – Non, dit Tanneguy, chez moi !
    – Monsieur, reprit le chevalier, saluant de plus belle, malgré la façon bizarre dont vous vous introduisez chez moi, faites-moi l’honneur de vous y asseoir un instant.
    – Ne vous gênez donc pas, dit Tanneguy, prenez cet escabeau et, bien que je sois assez surpris de vous voir installé chez moi, reposez-vous-y tant qu’il vous plaira…
    – Seigneur ! Seigneur ! Comment cela va-t-il finir ? gémit Thibaud en levant ses bras courts vers le plafond.
    Le chevalier de Passavant se prit à sourire comme il souriait parfois quand la main lui démangeait. Tanneguy fronça les sourcils et se mit à tordre sa formidable moustache. Tous deux ensemble se tournèrent vers l’infortuné Thibaud.
    – Suis-je chez moi ? demanda le chevalier.
    – Sans doute !
    – Suis-je chez moi ? gronda Tanneguy.
    – C’est sûr !
    – Je ne vois plus qu’une chose à faire, dit Tanneguy, c’est de prier monsieur de franchir la porte.
    – Je ne vois plus qu’une chose à faire, dit Passavant, c’est de jeter monsieur par la fenêtre.
    Les deux adversaires, un instant, se mesurèrent. Dans la même seconde, les fers virent le jour. Thibaud, rapide et subtil, fit une conversion oblique et disparut. Tanneguy et le chevalier tombèrent en garde. Les épées cliquetèrent. Presque aussitôt, ils se ruèrent l’un sur l’autre. Il y eut un corps à corps, puis tous deux ensemble rompirent : à cet instant l’épée de Tanneguy sauta et sa forte garde d’acier alla rudement heurter le coffre.
    D’un bond, le chevalier avait sauté sur l’épée de Tanneguy, et, mettant le pied dessus :
    – Vous êtes vaincu, monsieur.
    – Je me rends à merci, dit Tanneguy dont le poignet endolori eût été incapable de soutenir encore la rapière.
    – Eh ! mordieu, fit Passavant, ramassez votre épée… Vous êtes un brave… Recommençons.
    Tanneguy jeta un regard sur le gentilhomme qui, selon les règles du temps, pouvait le tuer ou le rançonner à son gré, et qui lui faisait une si généreuse proposition. Il le vit jeune, beau, étincelant de bravoure, et si fin avec son sourire sceptique. Son cœur s’émut.
    – Jeune homme, dit-il, vous avez vaincu une des meilleures lames de Paris. Vous avez la générosité de me rendre mon épée. C’est un procédé que je n’oublierai pas. Je suis votre ami, cornes du diable, et je vous aime, tout truand que vous êtes !
    – Truand ? fit le chevalier étonné.
    À ce moment, la tête effarée de Thibaud apparut. Les deux ennemis réconciliés éclatèrent de rire. Ce que voyant, Thibaud plissa sa figure qui devint un rire répété à mille éditions, et dit :
    – Pour en revenir à ce que nous disions, mes braves gentilshommes, laissez-moi vous faire une proposition.
    – Voyons, dit Passavant. Et si la chose est raisonnable…
    – Elle l’est. Vous, capitaine, je vous ai promis cette chambre, ignorant que M. le chevalier m’avait fait l’honneur de la réintégrer sans m’en prévenir. Vous êtes donc d’autant plus chez vous que vous m’avez proposé de payer d’avance.
    – Ah ! ah ! fit le chevalier. Voilà

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