Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Jeanne d'Arc Vérités et légendes

Jeanne d'Arc Vérités et légendes

Titel: Jeanne d'Arc Vérités et légendes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colette Beaune
Vom Netzwerk:
mourir. Il n’y a jamais à la fois deux enfants de même prénom dans
une fratrie (c’est un usage très strictement codifié en Italie et Isabeau est
la fille de Taddea Visconti), parce que redonner le prénom porterait malheur à
l’aîné et le ferait mourir. Charles et Isabeau avaient déjà une petite Jeanne
en pleine santé en 1407, il n’était donc pas question de la
« refaire ».
    S’ils avaient eu une fille en 1407, elle n’aurait pas pu
s’appeler Jeanne, ni Isabelle, ni Catherine, ni Michelle, ni Marie. Ils ont eu
un garçon qui ne pouvait s’appeler ni Louis, ni Jean, ni Charles, tous vivants
à cette date. Ils ont choisi Philippe, le prénom d’un arrière-grand-père qui
fut aussi le premier roi Valois.
     

… et gros problèmes
de chronologie !
    Si Jeanne est bien Philippe, si elle n’est pas morte et si
elle a été envoyée à Domrémy dans la famille d’Arc (ce qui fait quand même
beaucoup d’hypothèses qui ne sont appuyées que sur d’autres hypothèses !),
il n’en reste pas moins que la Pucelle, lorsqu’elle fut interrogée à
l’ouverture du procès, déclara : « À ce qu’il me semble, j’ai environ
dix-neuf ans », ce qui la fait naître en 1412 et non en novembre 1407. Une
différence de plus de quatre ans.
    Il n’y a pas lieu de se défier à l’époque quand quelqu’un
donne son âge « environ » : les occasions de donner son âge sont
rares ; les papiers d’identité ne sont pas d’usage. Les paysans de Domrémy
donnent tous leur âge « environ », sauf deux qui sont l’un prêtre,
l’autre écuyer. Les bourgeois savent plus souvent leur âge exact mais, même
dans la noblesse, Gaucourt, Alençon et Dunois donnent leur âge « environ »
et ne savent pas toujours leur date de naissance avec exactitude.
    Les chroniqueurs donnent des réponses variées sur l’âge de
Jeanne : elle avait seize ou dix-sept ans lors de son arrivée à la Cour,
selon Christine de Pisan ou le Greffier de La Rochelle, plutôt vingt ans pour
les chroniqueurs bourguignons, désireux d’atténuer le miracle. La question est
posée, dans la seconde enquête préliminaire au procès en nullité, à 14 témoins
qui l’ont vue. Elle avait bien l’air d’avoir dix-neuf ans, répondent huit d’entre
eux, deux optent pour dix-huit/dix-neuf ans et un pour vingt ans. Il lui en
faudrait vingt-trois pour que les bâtardisants aient raison.
    Si tout n’est pas absolument clair à quelques mois près dans
cette question, certains des arguments utilisés ici sont irrecevables. Le
Bourgeois de Paris lui donne dix-sept ans selon la meilleure édition (la mienne
évidemment ! mais la vieille édition Tuetey dit la même chose) et non
vingt-sept, Pasquier recopie la première réponse de Jeanne et se trompe deux
fois (vingt-neuf pour dix-neuf, Dompré pour Domrémy). Béroald de Verville
(« mon âge se compte par 7 ») est un romancier du XVIII e siècle qui ne peut servir de source probante.
    Au procès en nullité, le témoignage d’Isabelle épouse de
Gérardin d’Épinal n’est pas non plus à retenir. Elle ne parle pas de l’âge de
Jeanne et ne déclare nullement « que Jeanne était sensiblement du même âge
qu’elle », comme l’affirment les bâtardisants. Elle dit avoir cinquante
ans et plus, donc être née entre 1400 et 1405. C’est tout. Ne reste donc qu’un
seul texte incontestable, le témoignage d’Hauviette. Elle « ne se souvient
pas des parrains et marraines (de Jeanne) car celle-ci était, à ce qu’elle
disait, plus âgée qu’elle de trois ou quatre ans ». Notre Hauviette est probablement
la jeune sœur de Mengette, la meilleure amie de Jeanne et son exacte
contemporaine. Or, Mengette confirme comme tous les autres l’âge de Jeanne.
Pourquoi préférer le témoignage de la cadette ? Et un témoignage bien
isolé. Testis unus, testis nullus  – « Témoin unique, pas de
témoin », comme le dit l’adage. Pourquoi ne pas admettre tout simplement,
que trente ans après, les souvenirs sont fluctuants ?
     

Le nom et les armes
    Quand l’enfant grandit, l’identité royale aurait percé sous
l’humble paysanne, peut-on lire sous la plume des bâtardisants. Ceux-ci
attachent en effet une grande importance aux fluctuations autour de la
dénomination de Jeanne. Au premier interrogatoire de Rouen, elle affirme en
effet : « Dans mon pays, on m’appelait Jeannette. » Nos
mythographes, habitués aux usages contemporains où

Weitere Kostenlose Bücher