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Jeanne d'Arc Vérités et légendes

Jeanne d'Arc Vérités et légendes

Titel: Jeanne d'Arc Vérités et légendes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Colette Beaune
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du pape. Notre inconnue n’avait rien à y gagner, sauf la compagnie
du jeune comte de Virnenbourg, qui l’aimait beaucoup et lui offrit une superbe
cuirasse. L’inquisiteur excommunia la fille. Elle réussit à quitter Cologne
discrètement grâce aux Virnenbourg, qui jugèrent plus prudent de restaurer sa
réputation et sa crédibilité en la dotant au plus vite d’un mari.
    Claude épousa donc à Arlon, en septembre ou octobre 1436,
Robert des Armoises. Nos mythographes veulent qu’il s’agisse d’un mariage
d’amour. Jeanne, la vraie, aurait eu depuis l’expédition du sacre un faible
pour ce bon prud’homme. N’aimait-elle pas tous les bons prud’hommes qui
menaient une vie chaste ? Cela fait quand même du monde ! Robert
n’était guère un bon parti. C’était un veuf désargenté d’une cinquantaine
d’années. Cadet d’une famille chevaleresque barroise, il avait servi Charles
d’Orléans entre 1412 et 1415. Azincourt mettant fin à ses perspectives de
carrière, il se maria en 1419 avec Alix de Manonville, qui lui apporta en dot
Manonville et Haraucourt tandis qu’il lui assignait pour douaire sa principale
seigneurie, Tichémont. Ce mariage fit de lui le beau-frère de Robert de
Baudricourt. Mais les déconvenues s’accumulèrent. Robert dut vendre. D’autres
terres lui échappèrent par confiscation en 1423 et en 1435. Il n’avait plus que
son nom à vendre.
     

En ménage et mère
de famille !
    Épouser Claude ne rétablit d’ailleurs que très
imparfaitement sa situation. Le 7 novembre 1436, en effet, « Robert des
Armoises chevalier seigneur de Tichémont et Jeanne du Lys la Pucelle de France
sa femme » cédèrent leur quart d’Haraucourt à Colard du Failly pour quatre
ans, moyennant un gros prêt de 350 francs-or « pour notre très grand
profit et urgente nécessité ». Puis le couple vint s’établir à Metz dans
la maison qu’y possédait Robert dans le haut de la ville, près de la porte de
Moselle, en face de l’église Sainte-Ségolène. « Se tinrent là, jusqu’à
tant qu’il leur plut. » Claude eut le temps de donner deux fils (qui
semblent n’avoir guère vécu) à son époux. Le mariage fut interrompu soit par la
mort de Robert (aucune trace de lui après le 7 novembre 1436), soit par le
départ de Claude, peu faite pour la routine, conjugale ou non. Selon
l’inquisiteur, en effet, elle fut très vite séduite par un clerc qui l’emmena
avec lui.
    Claude quitta Metz probablement durant l’été de 1438. Qu’en
ont pensé les nombreux chroniqueurs messins [57]  ? Le curé de Saint-Eucaire a cru
qu’il s’agissait de Jeanne d’Arc, du moins dans un premier temps. La seconde
version de sa chronique ajoute avec scepticisme : « Vint une jeune
fille laquelle se disait la Pucelle de France et jouant tellement son
personnage que plusieurs en furent abusés et par espécial [surtout] tous les
plus grands. » La chronique des maîtres échevins, conservée à la
Bibliothèque municipale de Metz (BM Metz 855), écrite vers 1475, fait précéder
un résumé assez complet de la chronique de Saint-Eucaire d’une phrase de
présentation : « Et disait-on que c’était la Pucelle qui avait remis
le roi Charles de Valois en son autorité et l’avait fait sacrer à Reims pour
roi de France », mais termine en revanche par une conclusion très
dubitative : « Mais on disait qu’elle avait été brûlée et prise
devant Compiègne, et mise en la main des Anglais qui la firent brûler. »
    Deux autres chroniques contemporaines émanent du milieu
marchand, qui n’a participé en rien à l’opération Claude. Celle-ci a impliqué
uniquement trois des cinq paraiges aristocratiques de la cité. La première est
rédigée par l’orfèvre Jacomin Husson (1450-1518), qui est surtout un
compilateur. Après un récit quasi identique, il conclut : « Toutefois,
on disait qu’elle avait été prise devant Compiègne et mise en la main des
Anglais, qui la firent brûler sur le pont de Rouen. Mais ce fut une
fiction. »
    Enfin, le chef-d’œuvre des chroniques messines est l’œuvre
énorme du marchand Philippe de Vigneulles (1471-1528), dont nous pouvons tous
consulter l’édition. Aussi je ne comprends absolument pas pourquoi nos
mythographes veulent qu’il ait été marchand de chaussures [58] , ni pourquoi ils lui attribuent un texte
qu’il n’a pas écrit. Son journal décrit ses activités de marchand de drap et de
chausses (qui ne sont pas

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