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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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Électeur.
    Barras fut-il de ces comploteurs ? Il avait été trop brutalement chassé du pouvoir par celui dont il avait été le bienfaiteur pour ne pas en concevoir de la rancune et l’espoir de la revanche. Quelques semaines plus tôt, Tallien lui avait rendu visite ; or celui-ci avait eu le tort de décrire, dans une lettre au Directoire, la situation de l’armée française en Égypte, « abandonnée par un général auquel on a confié le commandement d’une expédition qu’il a lui-même fomentée ». Ce n’était certes pas un allié de Bonaparte, lui non plus. Coupable de recevoir des factieux, Barras reçut l’ordre de la police consulaire de quitter son domaine de Grosbois, trop proche de Paris ; il se replia en Provence.
    Républicain ardent, l’illustre La Fayette, qui venait d’échapper aux prisons autrichiennes, avait été acclamé à son retour à Paris. Bonaparte en prit ombrage et le pria de se faire voir le moins possible.
    Mais il y avait tous les autres, Sieyès, Benjamin Constant, Mme de Staël, Daunou, Joseph Chénier, Jean-Baptiste Say, Lacretelle et bien sûr Lucien Bonaparte, les idéologues de l’Institut, ainsi que l’éternel fâcheux Bernadotte, tous partisans de la légalité républicaine que menaçait le césarisme montant. Ni les charmes de Joséphine ni la vigilance de la police de Fouché ne pouvaient les museler. Avec l’aide de Cambacérès, Bonaparte rogna donc leur espace légitime. Plusieurs d’entre eux faisaient partie du Tribunat, l’une des trois chambres créées par la Constitution de l’an VIII. Il réduisit le nombre des membres de cette chambre et, aux élections, leurs chefs et ceux qui en avaient été trop familiers furent exclus. Ce fut ainsi le cas de Sieyès et de Benjamin Constant.
    L’éviction de ce dernier, son âme soeur, exaspéra Germaine de Staël ; elle déclara que Bonaparte avait éteint les dernières
    Lumières. Lors d’une conversation avec son frère, Lucien lui dit que, s’il avait témoigné un peu plus d’attention à la fille de Necker, elle l’aurait adoré.
    — Je ne me soucie pas de ces adorations, rétorqua Bonaparte. Elle est trop laide.
    Il est vrai que le Premier consul ne portait guère de sympathie à Mme de Staël ; se trouvant face à face avec elle à une réception du maréchal Berthier, il avait considéré avec stupeur la majestueuse poitrine dont elle offrait au moins la moitié aux regards et lui avait lancé :
    — Vous avez dû nourrir vous-même tous vos enfants !
    Ces saillies laissent des cicatrices. Mme de Staël en tout cas en demeura, pour une fois, sans voix.
    En dépit des aigreurs jacobines, il fallait entretenir l’illusion d’une épiphanie de l’harmonie universelle. Le mariage d’Hortense en serait un symbole.
    Soucieux de ne pas renoncer trop vite et trop ouvertement à l’héritage jacobin et de ne pas donner l’impression qu’il versait dans le papisme, Bonaparte fit célébrer la cérémonie civile aux Tuileries, le 13 nivôse de l’an X, autrement dit le 3 janvier 1802. Le contrat fut rédigé par les mêmes Raguideau et Calmelet qui avaient officié au mariage de Bonaparte et Joséphine, six ans plus tôt. Louis apportait, pour fonder le foyer, sa propriété de Baillon, et Hortense, 100 000 francs donnés par sa mère, plus 100 000 francs de biens, quinze actions de la Banque de France de 1 000 francs chacune (les Bonaparte étaient actionnaires de l’établissement), plus 250 000 francs offerts par le Premier consul, soit un total de 465 000 francs.
    Le lendemain, la bénédiction nuptiale fut donnée au couple dans l’intimité, à l’hôtel Chantereine, rue de la Victoire, et en présence du légat du pape, le cardinal Caprara. Joachim Murat et son épouse Caroline y furent présents et s’agenouillèrent à la consécration.
    Les rapports du couple furent conformes à leur peu d’attirance mutuelle.
    Et durant leur nuit de noces, rapporta plus tard Hortense, Louis avait dressé d’un ton vindicatif la liste des amants de Joséphine. Il vidait ainsi le sac des vilenies de son clan.
    Le propre des malgracieux est de se forger des destins de cocus. Hortense avait remarqué dans le régiment de son mari, le 5 e dragons, un officier à « l’extérieur prévenant », comme on disait, qui rendait souvent visite à Louis et qui ne manquait jamais de présenter ses hommages à Hortense. L’un et l’autre chantaient et ils avaient le même professeur.

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