Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Renard
Vom Netzwerk:
qui, là-bas, sur la route, passe péniblement d'un arbre à un autre.
Ce n'est pas une plaisanterie, un mirage classique : une belle jeune fille marche pieds nus sur la route.
29 juin.
Sur les roses la rosée.
Je sais pourquoi je déteste le dimanche : c'est parce que des gens, occupés à rien, se permettent d'être oisifs comme moi.
Une lune légère, comme faite avec un morceau de nuage blanc.
Claudel. L'âpre Bresse où il est né une seconde fois. Son front devait se cogner aux montagnes, puis, par les vallées à perte de vue, son regard filer comme un éclair. Un calvaire qui donne le vertige. Une église qui étouffe le village dans son ombre, et ces gens dévots qui nous regardent toujours, toujours, comme des étrangers.
Et l'on arrive à ces maisons de cloportes par d'invisibles sentiers perdus dans l'herbe.
    L'hiver, il faut repousser la neige comme des ours blancs.
Quel épicier aligna tous ces pins de sucre ?
Ce qui me manquait, au milieu de ces pins, c'était de pouvoir poser mes lèvres sur la joue d'une femme fraîche et un peu lasse.
Le petit ruisseau qui écume à toutes les pierres.
- Les bêtes qui dorment dans l'ombre reposent mieux et s'échauffent moins, dit la vieille femme.
On ne voyait de la chèvre que ses yeux, et un peu ses cornes.
- La chèvre qui pond du lait, dit Berthe.
Des moissons dispersées sur la montagne avec une symétrie qui apparaît de loin, une proportion dans les distances. Çà et là, une école vide, avec sa cloche dont la ficelle pend. Ses verres dépolis et grattés et ses grandes cartes d'atlas qui dépassent.
Les chevaux aux tabliers chasseurs de mouches, et leurs petites tours Eiffel de grelots.
L'orage joueur de boules derrière la montagne. Après chaque coup de tonnerre la pluie redouble comme les pleurs après les gros mots.
Dans un long voyage, effacer des gares comme les jours de l'année au régiment.
5 juillet.
Gérardmer, la Schlucht, le Hohneck. - Charlemagne a pris ici un repas champêtre.
    Tout de suite on parle de ses relations avec ses filles.
La Roche du diable, occasion d'exposer sa théorie sur le vertige. Le corps en arrière, on ne s'appuie à la rampe de fer que du bout du doigt. On devient cotonneux. Un mendiant, qui ressemble à Verlaine, (il est très beau, ce mendiant-là !) profite de notre vertige. Par sensibilité peureuse, nous lui donnons chacun deux sous. C'est à la fois une charité et une façon de désarmer l'abîme qui bâille à nos pieds.
La Meurthe n'en finit plus de prendre sa source. Les autres rivières peuvent attendre.
Descendu jusqu'à Retournemer par le Sentier des Dames. C'est une espèce d'entraînement pour l'enfer. Un des endroits les plus riants de notre promenade. Des petites servantes ahuries nous apportent bière âcre et limonade rouge. Comme je donne quatre sous de pourboire à l'une d'elles, elle les retourne, trouve que ce n'est pas assez pour payer la bière, ou se demande pourquoi je paie deux fois.
Au Hohneck, table d'orientation. Un sentier permet d'y arriver sans marcher sur le territoire allemand. Il faut être patriote, car le sentier allemand est beaucoup plus doux.
Vivre et mourir au bord du lac de Longemer ! Les lichens pendent comme des barbes d'Espagnols. Sous les hêtres, la cascade tombe en gémissant, comme une femme qui se cache la figure.
6 juillet.
Le poëte Titulopanpé avait fait, sur les papillons, une pièce de vers.
    Il n'en était pas content du tout. Il trouvait lourd le vol de ses papillons. Il déchira ses vers et jeta sur le lac les morceaux de papier. Mais ils ne tombèrent pas à l'eau. Légers, ils s'envolèrent d'un essor miroitant, pris par la brise. Et le poëte Titulopanpé les suivait du regard, attendri, content d'avoir écrit des vers meilleurs qu'il ne croyait.
19 juillet.
Rentrée à Paris. Paris a une odeur de fiacre.
26 juillet.
J'aime mieux m'occuper de moi que des autres, dans la crainte qu'ils ne disent : « De quoi se mêle-t- il, celui-là ? »
28 juillet.
Cette pièce est, comme on dit dans les faits divers, un de ces drames malheureusement trop fréquents.
29 juillet.
Toute notre critique, c'est de reprocher à autrui de n'avoir que les qualités que nous croyons avoir.
10 août.
Je pense à vous et, devant chaque beau site, je pousse une exclamation en votre honneur.
De la joie comme quand il pleut et qu'on sait un ami dehors.
20 août.
La mer, c'est l'abîme plein jusqu'au bord.
Oh ! voir le Groënland ou la mer Morte !
    Devant moi, sur le coteau, il y a un

Weitere Kostenlose Bücher