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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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signifiait: «Je vous déteste.»
    L’incident fut suivi d’un silence troublant et des regards gênés partaient dans toutes les directions sans savoir où se poser.
    â€” Cousin, ces manières sont indignes d’un gentleman, s’indigna Salaberry. Vous devez des excuses à mademoiselle Boileau.
    â€” Vous avez raison, dit Ovide, en faisant mine d’être contrit.
    Mais il avait atteint son but: montrer publiquement qu’il était amoureux d’Emmélie.
    â€” Mademoiselle Boileau, veuillez accepter mes excuses. Mon désir de vous plaire m’a poussé à… un geste inconsidéré.
    Emmélie n’eut d’autre choix que de signifier qu’elle pardonnait et Salaberry se demanda pourquoi Ovide cherchait à s’imposer auprès d’une jeune fille qui, visiblement, se montrait si peu intéressée. Lui-même ne ferait jamais le pantin devant une femme.
    â€” Salaberry, intervint monsieur de Rouville, vous m’obligeriez en racontant à nos amis ce fameux duel avec un Prussien.
    Son ton joyeux fit diversion. Le récit qu’il réclamait avait fait le tour des salons de Québec grâce à Louis de Salaberry, intarissable au chapitre des exploits familiaux. Mais Salaberry hésitait encore.
    â€” Je crains d’offusquer la délicatesse de ces dames. 
    â€” Je vous en prie, major! insista Sophie, l’enjôleuse. Régalez-nous d’une bonne histoire. À Chambly, il ne se passe jamais rien.
    â€” Permettez, père, que Salaberry raconte son aventure du Prussien, supplia à son tour Zoé. Je ne suis pas trop jeune, n’est-ce pas? Ça ne peut pas être pire que les récits de torture des Indiens de l’ancien temps?
    â€” Demandons à ta mère, répondit monsieur Boileau qui désirait connaître l’anecdote pour la consigner dans ses mémoires.
    â€” Monsieur de Salaberry, fit alors la noble dame, si notre ami le colonel le demande, c’est que votre aventure est certainement remarquable et je suis impatiente de l’entendre de la bouche même du héros.
    Avant de capituler, Salaberry promena son regard parmi les invités. Julie, toujours assise à côté du notaire, lui adressa un sourire d’encouragement.
    â€” Puisque les dames insistent, j’ai le devoir de les satisfaire, déclara l’officier. Mais à la condition que ma cousine Julie me pardonne à l’avance mes fautes de français, ajouta-t-il dans un sourire charmeur.
    Tout le monde se mit à rire et Julie entra volontiers dans le jeu:
    â€” Charles, vous êtes déjà tout pardonné.
    Ce dernier s’inclina devant elle d’une manière très théâtrale, suscitant de nouveau les rires. Pendant ses années de collège, Salaberry avait appartenu à une petite troupe et possédait un talent dramatique dont il usait volontiers en société.
    â€” Ma chère cousine, permettez que je vous dédie ce récit.
    Et il se tourna vers le père d’Emmélie:
    â€” Ce qui signifie également, cher monsieur, qu’il faut servir au conteur une rasade de votre meilleur rhum.
    Devant une assistance qui s’impatientait, monsieur Boileau s’exécuta en brandissant une bouteille et un verre qu’il tendit à Salaberry. Dûment équipé, il leva son verre devant Julie et avala d’un trait le précieux liquide.
    â€” Je suis prêt.
    Il entreprit de narrer avec force gestes et mimiques appropriées, ménageant des pauses opportunes qui permettaient à son auditoire de bien s’imprégner de l’atmosphère.
    â€” J’étais affecté aux Indes occidentales, en Jamaïque plus précisément. Mon régiment était composé d’hommes de diverses nationalités: Anglais, Suisses, Prussiens et, bien entendu, quelques Canadiens. Un matin, attablé devant mon petit déjeuner, on m’apprend qu’un des nôtres est mort la veille, des suites d’un stupide duel. La tristesse m’envahit aussitôt dès que j’eus appris son nom: Desrivières, l’un de mes plus chers amis.
    â€” Je me rappelle en effet avoir entendu parler de la mort de ce lieutenant, il y a quelques années, commenta monsieur Boileau.
    â€” Je contemplais mon repas sans appétit, lorsque j’entendis un officier prussien se vanter en ces termes:

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