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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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qui le tira vivement à part, et lui dit à l’oreille : – Tout va bien.
    – Masters l’a-t-il vue ? demanda le comte.
    – Oui, milord ; comme elle n’a voulu ni répondre à ses questions ni lui donner le motif de son silence, il attestera qu’elle est atteinte d’une maladie mentale, et qu’il faut la remettre entre les mains de ses amis : l’occasion est sûre pour l’éloigner comme nous l’avons résolu.
    – Mais Tressilian ? répondit Leicester.
    – Il n’apprendra pas son départ de quelque temps, et il aura lieu ce soir même ; demain on s’occupera de lui.
    – Non, sur ma vie, s’écria Leicester ; ce sera ma propre main qui me vengera de Tressilian.
    – Votre main, milord ! vous venger vous-même d’un homme aussi peu important que Tressilian ! non, milord. Il a toujours témoigné le désir de voyager dans les pays étrangers ; j’aurai soin de lui : je ferai en sorte qu’il ne revienne pas de si tôt pour rapporter des histoires.
    – Non, de par le ciel, Varney ! s’écria Leicester. Appelles-tu peu important un ennemi qui a pu me faire une blessure si profonde, que désormais ma vie ne sera plus qu’un enchaînement de remords et de douleur ? Non : plutôt que de renoncer à me faire justice de ce misérable, j’irais dévoiler tout à Élisabeth, et appeler sa vengeance sur leur tête et sur la mienne.
    Varney vit avec effroi que son maître était tellement agité, que, s’il ne parvenait pas à calmer son esprit, il était capable de se porter à cet acte de désespoir, qui ruinerait en un moment tous ses projets d’ambition formés pour son maître et pour lui : mais la fureur du comte paraissait irrésistible et profondément concentrée ; ses yeux étincelaient, l’accent de sa voix était mal assuré, et l’écume coulait sur ses lèvres.
    Son confident parvint cependant à le maîtriser au milieu de cette extrême agitation. – Milord, dit-il en le conduisant devant une glace, regardez-vous dans ce miroir, et voyez si ces traits décomposés sont ceux d’un homme capable de prendre conseil de lui-même dans une circonstance si grave.
    – Que veux-tu donc faire de moi ? dit Leicester, frappé du changement de sa physionomie, quoique offensé de la liberté de Varney. Suis-je ton sujet, ton vassal ? suis-je l’esclave de mon serviteur ?
    – Non, milord, dit Varney avec fermeté : mais commandez à vous-même et à vos passions. J’ai honte, moi qui vous sers dès mon enfance, de voir la faiblesse que vous manifestez dans ce moment. Allez aux pieds d’Élisabeth ; avouez votre mariage ; accusez d’adultère votre épouse et son amant ; déclarez en présence de toute la cour que vous êtes la dupe qui a épousé une petite fille de campagne, et s’est laissé tromper par elle et son galant érudit. Allez, milord ; mais recevez d’abord les adieux de Richard Varney, qui renonce à tous les biens dont vous l’avez comblé. Il a pu servir le noble, le grand, le magnanime Leicester ; il était plus fier de lui obéir que de commander à d’autres : mais ce seigneur déshonoré, qui cède au moindre coup de la fortune, dont les hardis projets se dissipent comme la fumée au plus léger souffle des passions, non, Richard Varney ne consentira jamais à le servir. Il porte une âme aussi supérieure à la sienne qu’il lui est inférieur par le rang et par la fortune.
    Varney parlait ainsi sans hypocrisie, quoique cette fermeté d’âme dont il se vantait ne fût chez lui que cruauté et dissimulation profonde ; cependant il sentait réellement cette supériorité dont il se vantait ; et dans ce moment, l’intérêt qu’il prenait à la fortune de Leicester animait son geste et donnait à sa voix l’accent d’une émotion peu ordinaire en lui.
    Leicester fut subjugué ; il sembla au malheureux comte que son dernier ami allait l’abandonner : il étendit les mains vers Varney en prononçant ces paroles : – Ne me quitte pas. Que veux-tu que je fasse ?
    – Que vous soyez vous-même, mon noble maître, dit Varney en baisant la main du comte après l’avoir serrée respectueusement ; que vous soyez vous-même, et supérieur à ces orages des passions qui bouleversent les âmes communes. Êtes-vous le premier qui ayez essuyé les trahisons de l’amour ? le premier à qui une femme capricieuse et légère ait inspiré une affection dont elle s’est ensuite jouée ? Vous livrerez-vous à un désespoir insensé pour

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