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Khadija

Khadija

Titel: Khadija Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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les tiennes. Les pistes du Hedjaz sont assez vastes pour nous deux, et les souks de Ma'rib, de Yarim, de Sawakin, de Sham et de Ghassan sont bien assez fournis pour remplir les bâts de nos chameaux.
    — Mon père, Al Çakhr ibn Harb, qu'Hobal notre dieu prenne soin de lui, est mort depuis une année. Je sais ce que tu penses de lui. Il est pour toi celui de Mekka qui a été l'ennemi de ton époux avant de devenir le tien.
    — Celui qui a fait voter les Anciens de la mâla contre mon époux, oui. Celui qui a refusé l'aide qu'Âmmar al Khattab demandait et a laissé les Perses détruire sa caravane, massacrer ses fils et ses frères dans les montagnes de dhar al Amir. Et qui a espéré que sa veuve serait trop faible pour protéger ses richesses. Oserais-tu me contredire ?
    — Le passé appartient à mon père, qu'Hobal garde sa main sur lui. La décision prise à la mâla n'était pas la mienne, et le fils que j'étais il y a six ans n'est plus. Je dis : Khadija bint Khowaylid, veuve d'Âmmar al Khattab, aujourd'hui tu es mon égale. Et aujourd'hui, moi, je suis le chef des Banu Ommaya. Soyons comme les deux doigts d'une seule main.
    La colère avait raidi Khadija, la laissant prête pour une joute verbale. La surprise la laissa silencieuse et troublée. Elle aurait voulu garder le regard sur le visage d'Abu Sofyan, mais ses yeux s'abaissèrent sur la face d'albâtre d'Al Ozzâ, comme si la déesse pouvait lui adresser un signe.
    Abu Sofyan s'en aperçut. Aussitôt, il s'inclina pour soulever la plaque d'albâtre et la pousser aux pieds de Khadija.
    — Ceci n'est pas un présent de politesse, cousine Khadija, reprit-il d'une voix plus basse. Et ce n'est pas une alliance de marchand que je viens te proposer. Veux-tu devenir mon épouse ?
    — Moi ?
    Abu Sofyan ne put retenir son rire.
    — Toi, bien sûr. J'aurais dû en parler à ton oncle Abu Assad bint Khowaylid avant de venir chez toi, comme l'exige la règle, mais le vieux est si âgé qu'il ne comprend plus ce qu'on lui dit ni ce qu'il dit lui-même.
    — Cousin Abu Sofyan...
    — Tu es veuve, et veuve depuis longtemps, cousine Khadija. Et tu es femme à décider seule.
    — Une vieille femme, de presque dix ans plus âgée que toi.
    — Tu n'es pas une vieille femme.
    — Allons ! Tu n'as pas vécu trois décennies, et moi, je vais vers le soir des femmes. Voudrais-tu m'épouser pour te rassasier de mes jeunes servantes ?
    Involontairement, le regard d'Abu Sofyan fila vers le visage d'Ashemou. Voyant la moquerie qui plissait les traits de Khadija, il inclina le front en se frappant doucement la poitrine.
    — Ta maison regorge de jeunes et belles servantes, il est vrai. Des filles si fraîches que pas la moitié n'a encore connu d'homme. Cependant, tu n'as pas peur de te montrer à leur côté. Tu ne crains pas la comparaison. Tes servantes ont la jeunesse, mais leur maîtresse possède tout le reste. Un homme véritable sait d'où lui viendra le plus grand plaisir.
    — Tu as la réputation de savoir user des mots avec les femmes, cousin Abu Sofyan. Et, ce qui est mieux encore, d'y prendre plaisir. Après ce soir, moi aussi, je pourrai assurer que ta réputation est vérité. Mais avec l'âge, on apprend ce que pèsent les mots.
    — Ne te fais pas ce que tu n'es pas, cousine Khadija. Tu n'as plus de fils...
    — Oui.
    — Veux-tu que ta maison s'éteigne comme la mèche de cette lampe ? Ce qui a été ne reviendra pas. Ton époux et tes fils ne reviendront pas. La vie d'une femme n'est pas finie tant qu'elle peut voir son ventre se remplir.
    — Cousin Abu Sofyan... J'ai entendu que tu venais de prendre une jeune épouse, Hind bint `Otba.
    — On t'a informée, alors, qu'elle n'a que six ans et que ce n'est qu'un accord de commerce.
    — Des épouses et des concubines, combien en as-tu, déjà ? Te déplaisent-elles donc tant que tu aies besoin des cuisses d'une vieille veuve pour ton plaisir ?
    La franchise de la question prit Abu Sofyan au dépourvu. Il agita vaguement la main avant de rire, embarrassé.
    — Cousin Abu Sofyan, reprit Khadija d'une voix tranquille, regarde autour de toi. Pourquoi voudrais-tu que j'abandonne mon existence de veuve ? L'été, je vis ici, dans cette belle maison construite par mon époux Âmmar. L'hiver, je suis dans notre cité de Mekka, où il n'existe pas six demeures aussi spacieuses que celle qu'Âmmar al Khattab m'a léguée. Sa richesse, que la main d'Hobal demeure sur moi, depuis six

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