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Kommandos de femmes

Kommandos de femmes

Titel: Kommandos de femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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sera communiquée à la soupe. Il paraît qu’un requis, surpris à enrayer une machine, a été pendu dans le grand hall de l’usine. Pendu non pas au bout d’une corde, mais par un croc sous le menton. Un murmure horrifié accueille cette annonce.
    — Et comment que je préfère m’inscrire ! s’exclame Ketty, qui s’en va trouver d’Aufseherin.
    En revenant :
    — Et vous, pas de conneries ! S’il y en a qui tiennent à leur peau !
    Elle pose les mains sur ses hanches.
    — Quand elle en vaut la peine.
    Son exemple agit. La liste recueille dix, douze inscriptions de « volontaires », parmi lesquelles, à notre surprise, celle de la Colonelle.
    — Tu aurais cru ça d’elle ? fait Chinon.
    — Mets-toi à sa place, dit Clara. Et elle, personne ne s’est dévouée pour aller la mettre au courant. C’est notre faute !
    La majorité des nôtres, M rs  Hudson et la Marquise, et Christine en tête, réagissent sévèrement contre elle. Une Colonelle ! Passer à l’ennemi ! Ça ne lui portera pas bonheur ! La Colonelle mange dans son coin, digne et silencieuse, à l’écart, non plus de cinq mètres, mais de dix.
    Que rêvons-nous de résister ! Par quel moyen ? À moins de s’offrir à un châtiment hallucinant. Un second message de « Badine » fait savoir laconiquement qu’un exemple a été fait chez les hommes, qu’on n’hésitera pas à traiter les femmes de la même façon. Il n’y a pas assez de volontaires pour les nouvelles machines. Tant pis ! Un certain nombre d’entre nous se trouvent désignées d’office : Sylvaine, Clara, M rs  Lawson. Je n’en suis pas. Carmen propose :
    — Et si on les envoyait ch… ?
    Mais Clara et Sylvaine la première de déclarer :
    — Il faut céder.
    Elles se rendent à leur tâche dès l’après-midi ; moi, je reste à mes épluches avec les suprêmes rescapées. Devons-nous nous féliciter ou le contraire, d’être exemptes ? Ne nous réserve-t-on pas pis encore ? Celles qui viennent d’être « piquées » – dont des vieilles – auront-elles la force ?… Cette malheureuse Lily de Rothschild qui ne tient pas debout ? Clara qui, malencontreusement, a perdu un morceau de pain mis de côté depuis la veille ? (Il est tombé dans les latrines ; je lui ai donné un quignon.)
    Vers les quatre heures, remue-ménage du côté de l’infirmerie. Un brancard chargé vient de l’usine. Il n’y a eu que deux accidents mortels depuis le début. Serait-ce le troisième ?
    Peu après, la mère Marteau se fait donner la permission d’aller réclamer un tampon à la doctoresse. Elle revient : on ne l’a pas reçue. L’infirmerie est bouclée à quiconque pour la soirée.
    Notre attente des « journalières » ! L’heure venue, nous sortons sous une averse, à leur rencontre. Elles tardent. Nous rentrons. Charlotte Pons nous crie de fermer notre porte.
    — Ça ne t’inquiète pas, toi ?
    — Moi, je m’en fous.
    Enfin, en courant, transpercées par la pluie qui les fouaille sur les deux cents mètres du trajet, voilà les premières équipes. Yolande, la mine renversée :
    — Il paraît… La Colonelle…
    Elle s’interrompt. Clara la rejoint, les pommettes roses.
    — « Badine » l’a battue. Il l’a tuée.
    — C’est sûr, ça ?
    Elle ne respirait plus.
    — Mais pourquoi ?
    — Ah !
    D’autres surviennent et parlent toutes ensemble. Diverses versions s’entrelacent. L’anxiété corrode nos visages, à nous les embusquées, qui avons raté cet incroyable drame. Mais Gretchen, bâton en main, nous disperse. Nous n’apprendrons ce qui s’est passé qu’à table. Encore, dès les premières bouchées, le silence nous est-il imposé.
    On croit comprendre que la Colonelle avait été placée au graissage de la fameuse machine. Un « business » de tout repos. Simplement, toutes les trois minutes, verser une cuillerée de lubrifiant « ersatz » dans les flancs de cette tourelle trépidante qui crachait mille cartouches, bouchées, toutes les vingt secondes. Qu’a-t-elle fait ? Qù avait-elle pris cette forte tige ? Maladresse ? Inconscience ? Ou bien vouloir réfléchi ? Elle l’a lâchée – une tige d’acier de cinquante centimètres – en plein dans les engrenages. Le ventre de la machine a éclaté. Arrêt d’un quart des ateliers. Dans la confusion, on a appelé « Badine » . On a entendu des cris. Est-elle morte ? C’est presque assuré.
    Elle ne l’était

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