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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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Koruga, fut appe lée à la mairie. Il était minuit quand deux paysans à brassard tricolore frappèrent au carreau et lui ordonnèrent de les suivre. Dehors, la lune était pleine. Corina Koruga ferma soigneusement la porte et garda la clé à la main. À la mairie, il y avait une dizaine de soldats russes qui ripaillaient avec les paysans. La femme du prêtre fut amenée devant eux. Ils lui offrirent un verre de vin et l ’examinèrent sur toutes les coutures. La femme du prêtre baissa les yeux, et adressa en pensée une prière à l’adresse de saint Nicolas.
    Les soldats la forcèrent à boire. Mais elle continua à prier saint Nicolas sans regarder personne et sans toucher le verre de ses lèvres. Un soldat lui versa du vin dans son corsage. Un autre releva ses jupes et l’arrosa de vin par en dessous. Mais, elle, n’entendait rien, ne voyait rien. Elle tenait les yeux fermés et continuait à adresser des prières à saint Nicolas, qui ressemblait au prêtre Alexandru Koruga, son mari. Les Russes et les paysans lui versèrent d’autres verres de vin, sur la tête, dans sa chemise et sous ses jupes. Sa robe et sa chemise étaient trempées. Puis ils l’étendirent brutalement sur le plancher. La femme du prêtre sentait que sa robe et son corps étaient aussi mouillés que si elle était tombée à l’eau. Puis elle eut la sensation de couler et de se noyer. Saint Nicolas était resté sur la rive et priait pour elle.
    Le lendemain, à la suite de ce qui s’était passé à la mairie, Corina, la femme du prêtre Koruga, se pendit dans le poulailler.
     
     
     
120
     
     
     
    Nora West . Première nuit au camp de concentration de Ohrdruf.
    " Ils ne peuvent tout de même pas nous avoir arrêtés sans motif", se dit Nora.
    Elle était étendue. Elle n’avait pas de matelas. Pas de couverture. Rien que le lit en planches. Les hanches, les coudes, les os, tout lui faisait mal.
    Quand elle était arrivée quelques heures auparavant dans le camp de concentration, il faisait déjà nuit.
    Aussitôt descendus du camion qui les avait transportés depuis Weimar, on les avait séparés, et Traian avait été emmené ailleurs. Quant à elle, on l’avait fait venir ici.
    Le camp de concentration de femmes se composait de baraques en bots. Dans la chambre où elle était couchée, il y avait encore une trentaine de femmes. Elle n ’avait pu voir leurs visages lorsqu’elle avait pénétré dans la baraque, car il faisait sombre. Mais elles paraissaient toutes très jeunes.
    Nora s’était étendue sur le lit en bois et s’était mise à pleurer. Puis elle s’était endormie. " Maintenant il doit être minuit, se dit-elle. Qui peuvent bien être ces femmes qui sont enfermées ici ? " Un rire étouffé jaillit de l’autre coin de la chambre. Nora eut l’impression que c’était un rire d’homme. Mais dans un camp de femmes il ne pouvait y avoir d’hommes. Elle tendit l’oreille. C’était sûrement un homme. Il ne riait plus, mais on sentait qu’il faisait l’amour. On entendait distinctement les ébats du couple. L’homme se mit de nouveau à rire. Mais cette fois-ci, le rire venait d’un autre coin de la chambre. Nora prit peur.
    " Pourquoi aurais-je peur de ces hommes qui font l’amour ? " se dit-elle. Mais elle n’arrivait pas à se calmer. Elle se boucha les oreilles. Elle n’entendait plus rien. Elle ne continuait à les voir, même en fermant les yeux. La planche de son lit trembla. Nora rouvrit les yeux. La porte était largement ouverte. D’autres hommes encore étaient entrés dans la pièce. Ils demeuraient debout au milieu de la chambre et parlaient entre eux. Une femme en chemise de nuit se tenait auprès d’eux. Nora ne put plus se retenir et se mit à crier. Elle ferma les yeux et hurla de toutes ses forces. Elle ne savait pas elle-même pourquoi elle avait commen cé à le faire. Mais maintenant elle continuait à crier parce qu’elle avait peur des femmes et des hommes qui se trouvaient dans la chambre. Ils allaient la rouer de coups parce qu’elle avait crié et les avait empêchés de faire l’amour.
    " C’est stupide, se dit-elle. Je n’aurais pas dû crier. Maintenant, ils vont tous me tomber dessus et vont me frapper jusqu’à la mort. Ils auront raison de me tuer parce que j’ai crié. "
    Les hommes quittèrent précipitamment la pièce. Ils s’enfuyaient. Ils étaient nombreux. Plusieurs étaient allongés dans la chambre à même le sol et Nora ne les avait

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