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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Virgil Gheorghiu
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pour acheter quelque chose à votre mari. Je vous ai apporté ce portefeuille pour que vous lui en fassiez cadeau. Il lui fera sûrement plaisir. C’est une assez belle chose.
    – C’est demain le deuxième anniversaire de mon mariage ? dit Eleonora. Je l’avais totalement oublié. Je vous remercie, monsieur Stein, d’y avoir pensé à ma place. Traian sera enchanté.
    Elle regarda le portefeuille tout en passant doucement la main dessus comme pour le caresser.
    – Je ne sais pas pourquoi je persiste à garder ce secret. Peut-être que je l’aime trop. Il ferait tout pour m’aider s’il le savait. J’en suis certaine. Mais je ne le lui dirai pas. J’ai trop peur de le perdre. Je sais que ma peur est absurde. Chaque fois que je me décidais à lui en parler, j’étais brusquement envahie par la peur et j’ai continué à garder ce secret horrible. Traian est le seul être qui m’attache encore à la vie. Si je le perdais, je me perdrais moi-même.
    Eleonora West posa le portefeuille et dit brusquement :
    – Savez-vous ce que m’a dit le procureur général ? Il a prétendu que je n’étais pas mariée.
    La voix d’Eleonora tremblait.
    – Et il a raison. Je me suis mariée après que la loi interdisant aux Roumains d’épouser des juives, fut entrée en vigueur. La loi a été promulguée en avril et moi j’ai épousé Traian deux mois plus tard. D’office mon mariage est nul. Tous les mariages effectués après cette date en connaissance ou en non connaissance de cause sont automatiquement annulés.
    Eleonora West se tut. Elle entendait encore résonner à ses oreilles la voix du procureur : " M. Traian Koruga n’est pas votre mari. D’après la loi il n’est pas marié. Votre mariage s’annule de lui-même. M. Traian Koruga peut épouser à n’importe quel moment une autre femme, sans que pour cela il soit considéré comme bigame. Si vous aviez un enfant, ce serait un enfant naturel et il devrait porter le nom de West et non celui de Koruga. Vous-même, madame, vous vous inscrivez en faux chaque fois que vous signez du nom de Eleonora Koruga. " – Payez n’importe quelle somme, monsieur Stein, dit Eleonora West. Dans un délai très court nous devons à tout prix avoir les passeports et les visas en main. Les passeports au nom de M. et M me  Koruga…
     
     
     
73
     
     
     
    Cinq jours plus tard, Leopold Stein revint avec la nomination de Traian Koruga comme directeur de l’Institut roumain de Raguse et les passeports diplomatiques reliés en cuir bleu.
    – Nous avons gagné, madame Koruga ! dit-il tout réjoui. J’ai réservé les couchettes de wagon-lit jusqu’à Vienne. Vous partez lundi. Je suis heureux que vous puissiez partir.
    Leopold Stein essuya ses lunettes. Eleonora West qui n’avait pas cessé d’examiner les passeports, regarda le vieillard. Elle vit qu’il avait beaucoup maigri. Elle aurait voulu lui demander s’il ne partait pas lui aussi, mais Leopold Stein lui dit :
    – Je ne sais pas si nous nous reverrons jamais. Cette nuit même, un nombre considérable de juifs seront transportés en Transnistrie. Je suis content que vous partiez. Si jamais vous revenez, vous ne retrouverez plus un seul juif à Bucarest. Moi non plus. Un homme de mon âge ne fait pas de vieux os dans les camps de concentration d’au-delà du Boug.
     
     
     
74
     
     
     
    Traian Koruga était dans son bureau. Nora n’y entrait jamais lorsqu’il travaillait. Mais aujourd’hui elle pénétra dans la chambre, les passeports à la main. Traian Koruga était à sa table de travail, la tête enfouie entre ses mains.
    – J’ai un cadeau pour nos deux ans de mariage. J’ai fait en sorte que tu sois nommé directeur de l’Institut de Culture roumaine de Raguse.
    En lui tendant le décret de nomination elle ajouta :
    – La Dalmatie possède un des plus beaux rivages du monde. Tu pourrais continuer tranquillement ton roman.
    – Comment as-tu réussi à faire cela toute seule ? demanda Traian. Et surtout comment as-tu pu garder ce terrible secret ?
    Traian l’embrassa.
    – Nora, tu es géniale ! dit-il.
    Puis il continua :
    – Si tu savais comme je suis enchanté. J’avais besoin de changer de climat pour pouvoir continuer ce roman. Je ne pouvais plus écrire le chapitre suivant. Je sentais qu’il devait être écrit autre part. Je le pressentais. Ce sera peut-être le chapitre le plus fort du livre…
    Eleonora West s’approcha de lui et l’embrassa sur

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