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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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circulaient dans la salle afin de réserver une danse auprès d'elles. Chacune écrivait les noms à côté de l'une ou l'autre des lignes imprimées qui donnaient les titres des pièces musicales.
    Depuis quelques minutes, Edouard s'abandonnait aux retrouvailles joyeuses de quelques-uns de ses camarades de classe. Ils s'amusaient entre eux à «noter» les jeunes filles présentes. Il revint bientôt à côté de ses parents pour demander :
    —    Adorable maman, puis-je avoir la première danse?
    —    Certainement pas, joli cœur : elle sera pour ton père. Et si j'étais toi, je ne songerais pas à demander la première danse de mon premier bal à ma belle-mère. Ce serait donner un curieux message à toutes les personnes présentes.
    Le garçon la regarda un moment, avant de lui adresser son meilleur sourire :
    —    C'est bien vrai. Mais tu m'en réserveras une ?
    —    Promis. Quand tu auras un moment de libre... Car aussi charmeur que tu l'es, tu ne devrais pas faire tapisserie.
    Edouard lui adressa un clin d'œil, puis se perdit dans la foule. Pour la première fois, il arborait une queue-de-pie noire, un plastron d'un blanc immaculé et un nœud papillon au cou.
    —    Le voilà prêt à ravager les cœurs, remarqua-t-elle en le regardant s'éloigner.
    —    Tout de même, à son âge, sa présence ici est un peu présomptueuse.
    —    Tu penses que tu aurais pu le laisser à la maison ?
    —    Aucune chance, convint le père dans un sourire.
    Le garçon tenait absolument à se trouver au milieu d'une assemblée de belles filles. Sans hésiter, il traversa toute la pièce, aborda Elise pour demander :
    —    Mademoiselle Caron, me feriez-vous l'honneur d'inscrire mon nom dans votre petit carnet?
    Lors d'un événement de ce genre, les usages voulaient qu'une jeune fille, à moins d'un motif grave, accepte toutes les invitations à danser... et que les garçons ne sollicitent pas plus d'une fois la même personne. Après tout, ce genre de soirée devait permettre à une débutante de rencontrer le plus grand nombre de partis possibles.
    —    ... Oui, bien sûr, balbutia-t-elle après une hésitation. Ce sera la quatrième.
    Pendant tout ce temps, dans un coin de la grande salle, un orchestre jouait en sourdine. Pendant une demi-heure encore, la procession des jeunes filles auprès du gouverneur général continua. Dès le passage de la dernière d'entre elles, sur un signe d'un employé de l'hôtel, les musiciens commencèrent une valse. Le centre de la salle se dégagea afin de fournir un espace où danser. Le comte Grey entraîna sa femme dans un tourbillon, seul pendant une minute, puis des couples se joignirent à eux.
    —    Madame, vous dansez? demanda Thomas.
    Elisabeth acquiesça. Un moment plus tard, sa longue silhouette attirait les regards de nombreux hommes.
    Progressivement, les jeunes couples, gauches au point d'être touchants, joignirent, leurs virevoltes à celles de leurs aînés. Eugénie dansait dans les bras d'un grand efflanqué à la peau un peu grasse, ses cheveux séparés au milieu et plaqués sur le crâné. Son carnet de bal s'était rempli très vite, mais tous ses cavaliers, plutôt que de pratiquer l'art de la conversation, égaraient leurs yeux dans son corsage, captivés par des appâts aussi exposés que menus. Retrouveraient-ils suffisamment leurs sens pour demander, dans la dernière pirouette : « Puis-je demander à monsieur votre père... » ?
    A la quatrième danse, Edouard tendit les bras à une Elise un peu rougissante dans sa robe blanche, un ravissant fourreau de satin, le cou et la naissance de la gorge noyés dans une mousse de dentelle. Il apprécia la chaleur de la taille sous sa main, chercha ses yeux avant de murmurer :
    —    Vous êtes particulièrement délicieuse ce soir, mademoiselle Caron.
    —    ... Merci. Et vous, très élégant.
    —    Chez Picard, on trouve de tout pour habiller l'homme élégant, des souliers au melon.
    —    Une véritable réclame.
    Elle battit des cils avant d'ajouter, taquine :
    —    Moi, je suis allée rue de la Fabrique. Votre oncle offre vraiment de jolies robes françaises.
    —    Tant que cela reste dans la famille, je vous pardonne.
    Au moment où la musique s'arrêta, Edouard se pencha pour embrasser les doigts de la jeune fille, tout en lui adressant ses remerciements. Ensuite, il chercha sa belle-mère des yeux, afin de se prévaloir de la danse

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