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la Bible au Féminin 03 Lilah

la Bible au Féminin 03 Lilah

Titel: la Bible au Féminin 03 Lilah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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aussi brusquement que le vent du désert change de cap.
    Cela aussi, elle y était accoutumée. Inclinant le buste, elle posa une main sur les genoux de son frère.
    — Peut-être t’inquiètes-tu à tort ? dit-elle avec tendresse. Si les rumeurs venues de Jérusalem avant la bataille de Kounaya étaient fausses, pourquoi celles d’aujourd’hui seraient-elles vraies ?
    Ezra repoussa sèchement sa main, mais avant qu’il prononce un mot, maître Baruch déclara :
    — C’est une bonne question, ma fille. Si un oiseau vole dans un sens, pourquoi ne volerait-il pas dans un autre ?
    Figé dans sa fureur, les lèvres frémissantes, Ezra les toisa l’un et l’autre. Le vieux maître désigna l’une des jarres de ses doigts décharnés.
    — Montre-lui la lettre.
    Ezra tira un papyrus parmi la vingtaine que contenait le récipient. Il le lança sans cérémonie à Lilah.
    — C’est une lettre de Yaqquv, le gardien des portes du Temple que Néhémie lui-même a chargé de cette fonction avant de mourir. Une lettre rédigée à Jérusalem il y a deux printemps. Elle n’est arrivée entre les mains des lévites de Babylone qu’après la mort de Cyrus le Jeune. L’un d’eux l’a fait parvenir à maître Baruch, car c’était à lui que Yaqquv adressait sa plainte. Tout ce que je viens de te dire est consigné là, de sa plume à lui, Yaqquv, qui le vit là-bas.
    Quoique enroulée sur une tige de bois de cèdre, la bande de papyrus était en mauvais état. Jaunie, déchirée, usée, elle semblait avoir été manipulée par des centaines de personnes. L’encre en était légèrement ocre, différente de celle que l’on utilisait à Suse. L’écriture n’était pas celle de Perse ou de Chaldée. Lilah reconnut les signes hauts et liés des Hébreux que maître Baruch enseignait à Ezra. Elle-même ne les déchiffrait qu’à grand-peine.
    Comme s’il devinait sa pensée, Ezra retira un autre papyrus de la jarre, plus court et fraîchement écrit.
    — J’ai traduit ce qui était nécessaire dans la langue de Babylone. J’en ai exécuté plus de quarante copies qui ont été distribuées aux familles de l’exil de Suse-la-Ville. J’espérais que les unes et les autres ouvriraient les yeux sur la plaie de Jérusalem. Tu aurais pu en avoir une entre les mains. Mais n’était-ce pas folie que d’espérer atteindre le cœur de notre oncle ou même franchir sa porte ?
    Lilah baissa le front. Son frère avait raison. Ces dures nouvelles n’avaient pas pénétré la maison de l’oncle Mardochée.
    Elle se tourna vers le vieux maître.
    — J’ai honte, maître Baruch. Ezra a raison. Comme tu le sais, la maison de notre oncle est close à tout ce qui vient de son neveu, souffla-t-elle avant d’ajouter vivement : mais notre oncle le regrettera, je le sais.
    Maître Baruch eut un regard vers Ezra avant de soupirer :
    — Nous avons tous honte. Toi, moi, Ezra. Tous ! Néhémie est parti en assurant : « J’avoue les fautes des fils d’Israël ! Nous avons fauté contre Toi, Yhwh ! Moi et la maison de mon père, dans la faute, dans la faute ! » Voilà ce qu’il disait en quittant Suse-la-Citadelle. Voilà ce que l’on peut encore répéter aujourd’hui. Le temps est passé, mais rien de bon n’est advenu.
    Il se tut, les lèvres closes en une grimace. Sa main aux doigts doux chercha à nouveau celle de Lilah. Ezra aussi respecta son silence. Ils demeurèrent ainsi un instant.
    Il n’y avait rien à ajouter. Il suffisait de repenser au poids des mots.
    Lilah entendit quelques bruits provenant de la pièce voisine qui servait de cuisine. Sogdiam devait ranger les victuailles.
     
    *
    * *
     
    Aussi vite qu’il s’était mis en colère, Ezra s’apaisait. Avec calme, il replaça les papyrus dans la jarre, puis se rassit près de Lilah.
    Elle n’avait pas besoin de se retourner pour s’assurer du regard qu’il portait sur elle. Elle ne doutait pas qu’il fût plein d’affection et d’indulgence. Elle garda cependant le front baissé et les yeux rivés sur la main tavelée de maître Baruch qui pétrissait la sienne.
    Elle était venue pour annoncer à Ezra le retour d’Antinoès. Son retour et sa volonté de l’épouser. Comment le pourrait-elle à présent ?
    Comment, après ce qu’elle venait d’entendre, oser dire : « Moi aussi, j’ai une nouvelle. Antinoès est revenu de la guerre pour m’épouser. J’ai passé la nuit près de lui. Je l’aime et je sens encore

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