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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Studs Terkell
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une vieille veste. Nous
sommes entrés dans une cabane le long de la voie ferrée où étaient entreposés
des binettes et des râteaux. Nous cherchions de quoi manger, et on n’avait
trouvé personne susceptible de nous aider. On reconnaissait les Russes aisément.
Des prisonniers de guerre. En général, ils ne portaient pas de chaussures, ils
s’entouraient les pieds de sacs de toile. Mais cette fois-là, pas un Russe à l’horizon.
Travail obligatoire : entretien des villages et des fermes. Il était très
facile de communiquer avec eux. Il suffisait de dire : « Américains, Américains. »
Et ils se marraient, parce qu’on était tous solidaires. S’ils avaient du pain
ou autre chose, ils le partageaient avec nous.
    Nous avons marché dans Vienne jusqu’à la nuit. On croisait
des gens qui nous souriaient : «  Morgen  », vous savez,
«  Morgen  ». Mais on ne s’est jamais fait piéger à discuter
avec eux. Une fois la nuit tombée, nous avons marché pendant une dizaine de
kilomètres en dehors de la ville, et nous sommes montés dans un train. Nous pensions
qu’il allait vers Trieste. Les Anglais nous avaient dit qu’à Trieste il y avait
une grande organisation secrète, et qu’on pourrait rentrer chez nous sur un
sous-marin américain ou allié. Au lieu de cela, on s’est retrouvés en Hongrie. Il
y avait très peu de place pour les garde-freins à l’arrière de ces wagons. C’est
là que nous étions. Pendant la journée, on est descendus, et on s’est cachés. Au
petit matin, on a commencé à voir des Russes. Ils n’étaient pas gardés de très
près, parce que de toute façon ils ne pouvaient aller nulle part.
    Un soir, ces Russes nous ont dit de venir avec eux. Ils nous
ont conduits dans une petite cabane, en dehors du village. Ils nous ont montré
une gigantesque barrière de bois d’environ quatre mètres de haut. Ils nous ont
fait comprendre que quand il ferait nuit, il faudrait qu’on passe de l’autre
côté. C’était là qu’ils habitaient. Nous avons passé la nuit avec ces Russes
qui étaient des travailleurs forcés. On a eu des œufs, des pommes de terre, et
plein de trucs. Ils avaient ça par les fermiers autrichiens. Pas par la
générosité des Allemands.
    Nous y avons passé la journée. La nuit suivante, ils nous
ont donné des colis de nourriture, comme les colis CARE. (Il rit.) Et
nous ont dit de partir. Ils nous ont donné une carte et nous ont dit quel train
prendre. Imaginez un peu, nous ne parlions pas russe, et eux ne parlaient pas anglais.
Ils nous ont fait traverser les lignes de gardes allemandes, jusqu’à la voie
ferrée. Ils essayaient de nous expliquer : tel train, quand il démarre il
va doucement, vous le prenez, et il vous conduit à Trieste. Au lieu de ça, on s’est
retrouvés en Roumanie. On s’était fichus dedans. On était restés trop longtemps.
On aurait pu descendre et aller jusqu’à Trieste. On a continué à contacter des
travailleurs forcés : des Roumains. Et on a été vraiment bien traités. Il
suffisait de dire : «  Amerikanski. »
    Cette nuit-là, un garde-frein allemand nous a repérés, a
braqué sa torche sur nous, et a commencé à hurler. On a couru. Je suis monté
sur un attelage entre deux wagons. Steve est allé vers un autre wagon, s’est
glissé dessous, près des roues. D’autres employés cherchaient avec leurs
torches, en courant vers le gars qui braillait. Quand il a braqué sa torche sur
moi, je lui ai sauté dessus. Je paniquais. J’ai attrapé une de ces plaques de
métal avec lesquelles ils fixent les traverses, et je l’ai assommé. Steve est
arrivé, on est partis chacun de notre côté dans les bois. On ne s’est pas arrêtés.
En plus on n’était pas tranquilles, parce que j’étais persuadé d’avoir tué ce
type. Non seulement on était en civil, mais en plus on avait fait autre chose, vous
voyez ? Après notre capture, ils n’ont jamais fait allusion à quoi que ce
soit.
    Après on a rencontré des STO français. Juste à quelques
kilomètres du centre de Trieste. (Il rit.) Nous sommes restés avec eux. Ces
travailleurs, on les trouvait à travers toute l’Allemagne et la Prusse
orientale. « Passez la journée ici », nous ont-ils dit. « On va
vous expliquer ce qu’il faut faire. » Le lendemain soir, ils nous ont dit
qu’il était temps de partir. Chouette ! « Vous allez trouver un
abreuvoir et quelqu’un va s’approcher de vous. » C’est exactement ce qui

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