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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Studs Terkell
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les protégions et
nous les payions.
    Le 1 er juin 1948, on a reçu de nouvelles
directives d’en haut. Nous n’étions plus intéressés comme avant par les anciens
nazis. Ce qui comptait désormais c’était ce qui se passait au-delà de la frontière
Est-Ouest. Le communisme devenait notre principal centre d’intérêt. Nous
faisions alors la chasse aux communistes. Nous voulions des renseignements sur
le nouveau gouvernement français mis en place tout de suite après la guerre. Combien
comptait-il de communistes ? Parce que Barbie s’était fait ses réseaux
là-bas en trois ans. Il était bien informé sur les communistes français. C’est
ce que nous cherchions à obtenir de lui.
    Nous étions complètement obsédés par les communistes… Il y a
eu une grève à l’usine à gaz d’Augsbourg. On m’a demandé d’enquêter sur le
nombre de communistes qui y participaient. Je suis allé assister à une réunion
d’une cellule communiste avec Barbie. J’avais un costume fabriqué en Allemagne.
Je portais mon 38 spécial dans un holster à l’épaule. Nous étions au fond d’un
café en plein air. J’ai écrasé ma cigarette dans un cendrier, et j’ai oublié de
remettre le mégot dans ma poche. Personne ne laissait jamais traîner un mégot
dans un cendrier. Barbie m’a donné un coup de pied : « Ramassez ce
foutu mégot sinon nous sommes grillés. »
    J’ai découvert que les communistes n’avaient pas noyauté la
grève. En fait ces types avaient faim. Ils n’arrivaient plus à enfourner le
charbon parce qu’ils n’avaient pas assez à manger. Nous avons découvert que les
cargaisons de saindoux qui devaient arriver de Hambourg à Augsbourg pour être
distribuées dans le cadre durationnement aux ouvriers
allemands attendaient quelque part sur une voie de garage. Rien à voir avec les
communistes.
    Mon patron m’a dit : « Dis donc, Dabringhaus, c’est
pas un bon rapport ça. Nous voulions que tu nous dises que c’étaient les
communistes qui menaient ça. » Il a ajouté : « C’est pas
possible que les communistes n’aient pas incité à la grève. » Je lui ai
répondu : « Non, ces pauvres bougres ont faim. Ils s’écroulent de
faiblesse devant les fourneaux à cause de la chaleur et parce qu’ils n’ont pas
assez à manger. » Si j’avais dit que les communistes étaient à l’origine
de la grève ils m’auraient donné une médaille. Mais il fallait que je dise la
vérité, que ça leur plaise ou non.
    En novembre 48 j’ai demandé mon transfert. Ça me contrariait
de travailler avec ce type. Ils m’ont dit : « Pas question. On a
encore besoin de lui. » Le pont aérien de Berlin avait commencé. J’ai
quand même réussi à quitter le contre-espionnage, et on m’a envoyé dans la
police à Stuttgart, mais toujours dans les services secrets. Mon successeur a
repris mon poste avec Barbie.
    Je travaillais alors avec un réseau d’informateurs SS. Le
responsable en était un colonel du nom de Gunther Bernau. Il m’a dit :
« J’ai une centaine d’amis dans le circuit, qui m’informent par téléphone.
Ce sont de très bons amis, et j’ai besoin de votre aide pour protéger leurs
vies. » On lui a dit : « D’accord, vous nous fournissez des
renseignements sur la Russie. » Il nous a répondu : « Pas de
problème, on a des informateurs à Moscou. » Il y a plein de SS qui sont
restés à l’Est et qui sont devenus de bons communistes. Beaucoup d’anciens SS
sont devenus des chefs de la Volkspolizei. Une fois que vous êtes dans
un extrême, vous pouvez passer très vite à l’autre extrême. Les Russes les
utilisaient également.
    Les gars avec qui je travaillais venaient de la 5 e division Panzer SS appelée Viking. Elle n’a pas été reconnue coupable à
Nuremberg parce qu’elle avait toujours été sur le front russe. Ils n’avaient
jamais été utilisés à l’arrière pour traquer les partisans et les résistants. Ç’a
été la seule division SS sur trente à être innocentée. Tous les amis de ce
Bernau étaient des types qu’on recherche encore maintenant, des criminels de
guerre. En vérité ils ne nous intéressaient pas le moins du monde. Ils disaient
que les deux camps les protégeaient. Ils se portaient à merveille. À l’heure qu’il
est ils doivent être millionnaires, certains sont à la tête de grosses
entreprises.
    On savait tous que Barbie s’était
enfui en Bolivie. Tout le monde le savait. On lui avait

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