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La campagne de Russie de 1812

La campagne de Russie de 1812

Titel: La campagne de Russie de 1812 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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cosaques
continuent à les harceler. À plusieurs reprises, ils
s'avancent vers les Français et chargent.

    – Eh bien,
Freytag, que pensez-vous de cela ? lui demande le maréchal
Ney.

    – Que notre
position n'est pas brillante, monsieur le Maréchal, mais cela
ne serait encore qu'un demi-mal Si nous avions des cartouches.

    – C'est
vrai. Mais c'est ici qu'il faut savoir vendre chèrement sa
peau !

    Pendant ce temps,
Napoléon, en proie à de véritables angoisses,
est toujours sans nouvelles de Ney et de l'arrière-garde. On
l'entend s'exclamer :

    – Je
donnerais bien les trois cents millions en or que j'ai dans les caves
des Tuileries pour le sauver !

    Et. la mort dans
l'âme, il reprend le dur chemin. Le bataillon de la Vieille
Garde de service au « palais » a bien manqué
se faire surprendre par les cosaques. Napoléon en est
épouvanté et, dès le lendemain, à une
lieue de Doubrovna, il ordonne de former le carré. D'une voix
presque épuisée, il lance :

    – Grenadiers
et chasseurs de ma garde, vous êtes témoins de la
désorganisation de l'armée. Si vous imitiez ce funeste
exemple, tout serait perdu. Le salut de l'armée vous est
confié ; vous justifierez la bonne opinion que j'ai de vous.
Il faut non seulement que les officiers maintiennent une discipline
sévère, mais que les soldats exercent entre eux une
rigoureuse surveillance et punissent eux-mêmes ceux qui
s'écarteraient de leurs rangs. Je compte sur vous. Jurez de ne
pas abandonner votre Empereur !

    D'une seule voix
les grognards crient :

    – Vive
l'Empereur !

    Et le soir de ce
jeudi 19 novembre, ils entrent à Orcha, musique en tête.
Ils ne sont plus que six mille hommes ! Six mille sur trente-cinq
mille ! Eugène n'a plus que mille huit cents soldats sur
quarante-deux mille ! Davout commande à quatre mille
combattants, débris d'une armée de soixante-dix mille
hommes ! Le maréchal lui-même a tout perdu : il est
exténué de faim. Il se jette sur un morceau de pain que
lui offre l'un de ses compagnons d'armes et le dévore. On lui
tend un mouchoir pour qu'il puisse essuyer sa figure couverte de
frimas...

    Fort heureusement,
à Orcha, on trouve des vivres ainsi que des munitions, et même
quarante canons ! L'entrepôt contient également soixante
bateaux destinés à lancer des ponts, mais, faute de
chevaux on les laisse sur place. On s'en repentira quelques jours
plus tard, car la Bérézina n'est plus très
loin...

    Le thermomètre
est maintenant descendu à moins 28 degrés. « Ce
qu'il y avait de plus affreux que tout cela, dira l'un des
combattants, c'étaient les seize heures de nuit, qu'il fallait
passer dans les bivouacs au milieu de la, neige, le plus souvent sans
vivres et sans feux. Au moment de quitter le bivouac, on voit des
hommes se lever les jambes tremblantes, le corps penché en
avant puis tomber pour ne plus se relever. »

    « La
mort s'annonçait par d'étranges symptômes,
racontera un témoin : celui-ci vous abordait l'œil
riant, la figure épanouie : il vous serrait la main avec
effusion, c'était un homme perdu ; cet autre vous regardait
d'un œil sombre, sa bouche proférait des paroles
d'indignation et de désespoir, c'était un homme
perdu. » De plus en plus nombreux sont ceux qui ont déjà
jeté leurs fusils, leurs mains nues ne pouvant toucher le fer
glacé « sans qu'ils éprouvent une douleur
vive, semblable à la douleur qu'un charbon ardent fait
éprouver ». Et l'on repart... laissant derrière
soi des cadavres gelés et recouverts de neige.

    Le 20 novembre, au
château de Baranoïe, l'Empereur connaît une grande
joie : le maréchal Ney, que l'on croyait définitivement
perdu, rejoint l'armée – et Napoléon se jette
dans ses bras. Mais, ce même jour, l'Empereur apprend aussi que
le pont de Borissov, sur la Bérézina, gardé par
douze cents Polonais, a été pris par les Russes.

    La retraite se
trouve coupée ! Il faut donc se préparer à
foncer et à bousculer l'ennemi !

    – Cette
fois, confie-t-il à Caulaincourt, il n'y aura de salut que
pour les braves. Si nous franchissons la Bérézina, je
suis maître des événements, car la Garde et les
deux corps frais que je vais trouver ici – ceux de Victor et
d'Oudinot – suffiront pour battre les Russes. Si l'on ne peut
pas passer, nous ferons le coup de pistolet. Voyez avec Duroc ce que
l'on pourrait emporter dans le cas où on serait obligé
de faire une trouée à travers champs sans voitures. Il
faut d'avance

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