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La canne aux rubans

La canne aux rubans

Titel: La canne aux rubans Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Grangeot
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responsabilités ! Dans mon esprit tout se met en
place et s’organise. Par chance, je rencontre Normand le Chanteur sous les
arcades du Louvre. Nous tombons dans les bras l’un de l’autre. Mon coterie est
devenu un des directeurs de la Maison Lecœur, une grosse entreprise de petites
ferrailles et tuyaux. Déjà midi ! nous décidons de continuer la
conversation à une bonne table. Je lui raconte mes aventures africaines, lui
donne des nouvelles de Beauceron, bref résumé après plus de dix ans de
séparation. Une fois le repas achevé, il me conduit chez un marchand de charbon
en gros qui veut bien mettre à Ivry-sur-Seine un espace à ma disposition pour
entreposer mes achats futurs. Normand me quitte en me faisant promettre de
revenir le voir un prochain jour. Le soir, j’examine les plans dans ma chambre
d’hôtel et calcule les quantités de chaque matériau dont j’aurai besoin. Je
prends le train le lendemain pour le Jura. Je ne connais pas cette région qui
me ravit. L’air y est excellent, la nourriture et le vin délicieux. Les
scieries Daloz ravitailleront mon chantier en toute confiance et, de plus, très
rapidement. Je descends ensuite à Lyon où le même accueil m’est réservé chez
Teste.
    Repassant par Paris, je me dirige vers Lille, où monsieur
Balme me reçoit les bras ouverts.
    — Tout ce que tu veux Adolphe. Demande ce dont tu as
besoin. Quant au règlement nous verrons cela quand tu auras été payé.
    Il ne me reste plus qu’à trouver les hommes. La rue Mabillon
est ma mine ; si bien que je commence les travaux avec un mois d’avance,
au grand étonnement de monsieur Dupré. Sur ce chantier, je suis en butte à la
circulation importante sur le quai de Billy et, parfois, j’en viens presque aux
mains avec les cochers de fiacre. Un second combat, si je puis dire, se livre
avec les compagnons qui désirent travailler avec moi. Ne pouvant employer plus
d’hommes que ceux dont j’ai besoin, je réponds à chacun que je penserai à eux,
dès qu’il se présentera une opportunité.
    Cinq mois plus tard, monsieur Dupré et les responsables du
bureau d’études viennent officiellement prendre livraison des deux passerelles.
Tout se passe très bien. Je reçois un chèque et vais le porter immédiatement
chez mon banquier. Après avoir payé les fournisseurs et les salaires de mes
compagnons, je me rends chez monsieur Mangini afin de lui rembourser l’avance
qu’il m’avait versée et lui propose des intérêts qu’il refuse en se fâchant
presque.
    — Si, un jour, je suis dans la dèche, j’irai te voir,
Adolphe. Dis-moi plutôt quels sont tes projets ?
    — Le séjour à Paris me suffit. Je désire retourner en
province pour m’y sentir mieux.
    — Alors viens avec moi de ce pas je vais te présenter à
Lucien Roy, architecte du ministère des Beaux-Arts. En dehors de ce qu’il te
donnera à restaurer, tu pourras prendre d’autres chantiers à ton compte.
    Monsieur Roy nous reçoit dans un bureau magnifique. Mangini
se retire après les présentations. Rapidement, nous nous découvrons une
philosophie commune que conforte notre appartenance à la franc-maçonnerie. Les
dernières barrières s’abattent. Il me confie plusieurs chantiers de
restauration de flèches d’églises. Ce travail me convient très bien. Je décide
de m’installer au centre des chantiers à Montargis. J’achète une maison ainsi
que trois hectares de prés sur lesquels je monte des hangars pour y entreposer
les matériaux. J’emmène avec moi trois compagnons que je connais bien et trouve
quatre autres ouvriers plus jeunes à Orléans. Ils me serviront de tâcherons. En
plus de vingt-six clochers répartis en Beauce, Gâtinais, Berry, Sologne, je
dirige des chantiers de voies ferrées, de ponts ferroviaires. Je réalise des
marchés couverts, les ateliers de pyrotechnique de Bourges. Je me rends
acquéreur de plusieurs forêts et monte mes propres scieries. Afin de me
déplacer rapidement, j’achète ma première voiture, une Torpédo Lorraine
Dietrich. J’avoue éprouver une grande joie et un orgueil réel. Elle est blanche,
avec une capote gris sombre, un long capot, deux sièges avant en forme de
baquets et les ailes avant relevées. Une large courroie de cuir maintient
latéralement les volets du moteur.
    Ma mère, accompagnée de Marie, vient de temps en temps à la
maison prendre quelques jours de vacances. Mon frère Georges, après avoir
trimardé, devient mon bras droit.

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