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La canne aux rubans

La canne aux rubans

Titel: La canne aux rubans
Autoren: Jean Grangeot
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bien alors… tout
est fini.
    — Tu crois que je peux trouver ici à construire un
pont, une voie de chemin de fer, même une simple passerelle ?
    — Non. Nous autres les Suisses n’avons confiance qu’en
nous, et encore ! Personne ne t’emploiera dans ce pays, ou alors pour
pousser des brouettes ! Il faut que tu te rendes là où des besoins
existent et où les indigènes ne possèdent pas la science, voire les moyens de
réaliser leurs projets. Ce soir, après la tenue en loge, nous bavarderons avec
deux frères roumains de passage. De la discussion naîtra peut-être la lumière,
comme on dit. En attendant, je t’emmène déjeuner. Ma femme est chez sa mère
pour quelques jours.
    Je retrouve pendant quelques instants un foyer avec des
objets qui ne changent pas de place, des senteurs propres au ménage Ferri, des
photos de famille sur les murs, nichées dans des cadres sans poussière. Un gros
coucou rythme le temps derrière la petite porte fermée.
    — À la réflexion, Adolphe, mes connaissances culinaires
étant très restreintes, nous ne prendrons ici que l’apéritif et nous irons
manger des filets de poissons du lac avec des roëstis arrosés de Fendant
neuchâtelois.
    Durant le déjeuner, Claude tente de me faire rire en contant
des histoires un peu lestes. Je souris par politesse mais ne m’amuse pas. Puis
il me parle des deux personnes que je dois rencontrer le soir même.
    — Marinescu, attaché au ministère de l’Économie, dirige
un service très important. Il parle le français presque comme toi et moi et en
est fier. L’autre se nomme Corneliu. Il vit comme le premier à Bucarest et
remplit ses fonctions au ministère des Transports à un poste de hautes
responsabilités. Hors de son travail, il passe pour un joyeux luron, levant
bien le coude et les jupons. Tu ne t’ennuieras pas, Adolphe, avec ces deux
phénomènes. Au demeurant ce sont des frères, aussi droits que le fil à plomb,
qui possèdent un excellent esprit de fraternité.
    Quelques heures plus tard, je vérifie combien Claude avait
raison. L’un et l’autre me prodiguent une amitié chaude et délicate à la fois.
Ils me laissent leur adresse en me faisant promettre de leur rendre visite.
    — Tu verras, me dit Corneliu, Bucarest est un petit
Paris. Lorsqu’un Français arrive les étrangers locaux sont les Roumains, et
puis j’aurai sûrement besoin de tes conseils pour les travaux que nous allons
entreprendre.
    — Je t’attends aussi Adolphe, souligne avec un bon
sourire Marinescu. Un changement d’air te fera le plus grand bien.
    Nous nous sommes quittés tard dans la soirée et pour la
première fois je parcours le livre traitant des pays balkaniques que j’avais
acheté. Mes cauchemars nocturnes deviennent moins épais, moins tragiques.
Durant les jours suivants, je constate que je m’ennuie à ne rien faire.
    — Tu vas mieux, Adolphe, s’exclame Ferri. Tu remontes
le courant doucement. J’en suis ravi. Pourquoi n’irais-tu pas passer quelques
semaines à Bucarest ?
    — J’y pensais un peu, mais il faut que je me décide.
    — Allons jusqu’à la gare consulter les horaires, cela
ne t’engage à rien !
    Quelques heures plus tard, j’ai un billet de chemin de fer
en poche, direction Bucarest, où je dois arriver après-demain en fin
d’après-midi. Ferri a réussi à me faire bouger !
    Le parcours me semble long, mais le paysage est magnifique.
Les montagnes, véritables forteresses naturelles, sont suivies brusquement par
une plaine immense. Des petits villages, très éloignés les uns des autres,
présentent leurs maisons basses et leur église orthodoxe. Des lacs, aux
contours irréguliers, s’effacent pour faire place à des forêts emplies d’arbres
magnifiques. À côté des gares, les traîneaux attendent avec leur cocher engoncé
dans des peaux de moutons. Mes yeux ne se lassent pas des spectacles qu’offre
la Roumanie.
    J’arrive à Bucarest à la « gara de Nord ». Une
surprise m’attend sur le quai. Corneliu est là, tout sourire.
    — Te voilà Adolphe ! « Bine ati venit »,
ce qui veut dire « Soyez le bien venu » ; à cela tu réponds
« Multumese », ce qui signifie, « Merci ».
    — Multumese, mon frère.
    — Tu dois avoir très soif. Allons déposer tes bagages à
l’hôtel. Je te l’ai choisi dans la vieille ville, car je sais que tu aimes les
belles choses.
    — Multumese, Multumese beaucoup.
    — Viens, prenons une voiture à cheval et
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