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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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font-ils ?
    – Ils les envoient à la Calebousse, ou ailleurs, pour qu’on les fouette. C’est l’unique moyen. Si je n’étais pas une pauvre femme souffreteuse, je crois que je les conduirais avec deux fois l’énergie de Saint-Clair.
    – Comment parvient-il donc à en être obéi ? vous dites qu’il ne les frappe jamais.
    – Les hommes, vous le savez, ont un plus grand air de commandement que nous ; cela leur est plus facile. Puis, si vous avez jamais observé les yeux de Saint-Clair avec attention (c’est très-singulier), vous aurez vu que, quand il parle d’un ton ferme, ses yeux étincellent. J’en suis parfois presque interdite, et les esclaves savent alors qu’ils doivent plier. Je ne puis en obtenir autant, avec une tempête et des cris, que Saint-Clair avec un éclair de ses yeux, quand il est monté. Ils se taisent devant Saint-Clair, et de là vient son indifférence pour ce que j’endure, moi ! Vous verrez, quand il vous faudra les faire marcher, qu’on n’en peut rien obtenir sans sévérité. Ils sont si mauvais, si trompeurs, si paresseux !
    – Toujours le vieux refrain ! interrompit Saint-Clair entrant nonchalamment. Et quel beau modèle ont à copier ces méchantes créatures, surtout pour la paresse ! Voyez, cousine, ajouta-t-il, en se jetant tout de son long sur le sofa opposé à celui de Marie, voyez, cousine, si leur paresse n’est pas tout à fait impardonnable, lorsque nous leur donnons, Marie et moi, un si brillant exemple !
    – Allons ! Saint-Clair, vous êtes par trop maussade ?
    – Moi aussi ? je croyais tout à fait bien parler, d’une façon remarquable pour moi ! Je fortifie toujours vos observations, Marie.
    – Vous savez bien que vous faites tout le contraire !
    – C’est qu’alors je me trompe ; je vous remercie, ma chère, de me remettre dans le droit chemin.
    – Vous voulez m’irriter, s’écria Marie.
    – Oh ! je vous en prie, Marie ; la chaleur est accablante, et je viens d’avoir avec Dolphe une prise qui m’a exténué ; ainsi, je vous en supplie, montrez-vous aimable, et laissez un pauvre garçon épuisé se raviver à l’éclat de votre sourire.
    – Qu’a fait Dolphe ? son impudence s’est accrue à tel point que ce drôle m’est devenu insupportable. Je souhaiterais l’avoir, pendant quelque temps, sous ma direction exclusive. Je le romprais, je vous en réponds.
    – Ce que vous dites là, ma chère, est marqué au coin de votre esprit et de votre bon sens habituels. Quant à Dolphe, voici le fait : il s’est exercé si longtemps à imiter mes grâces et autres perfections, qu’il a fini par se prendre pour son maître, et j’ai été obligé de lui faire sentir sa méprise.
    – Comment ?
    – Je lui ai fait comprendre d’une façon explicite, que je désirais garder quelques-uns de mes habits pour mon usage personnel ; j’ai arrêté aussi sa munificence à l’égard de mon eau de Cologne, et j’ai même été assez cruel pour le restreindre à une douzaine de mes mouchoirs de batiste. Ceci surtout a fortement humilié Dolphe, et pour le consoler je lui ai parlé en père.
    – Oh ! Saint-Clair, quand donc apprendrez-vous à conduire vos esclaves ! vous les perdez par votre faiblesse.
    – Après tout, où est le mal que le grand pauvre diable désire ressembler à son maître ? et si je l’ai élevé de façon à ce qu’il plaçât son bonheur suprême dans l’eau de Cologne et les mouchoirs de batiste, pourquoi ne lui en donnerais-je pas ?
    – Pourquoi plutôt ne l’avez-vous pas mieux élevé ? demanda miss Ophélia, avec une soudaine résolution.
    – Trop de peine à prendre ; la paresse, cousine, l’invincible paresse, qui ruine plus d’âmes qu’on ne mettrait de gens en fuite en faisant le moulinet. Sans la paresse, j’aurais été un ange. Je serais porté à croire que cette paresse est ce que votre vieux docteur du Vermont appelait : « L’essence du mal moral. » C’est à coup sûr un triste sujet de méditation.
    – Je pense qu’une responsabilité terrible pèse sur vous, maîtres d’esclaves ! Je ne voudrais pas l’avoir pour des mondes. Vous devez élever vos esclaves, et les traiter comme des créatures raisonnables, des créatures immortelles, dont vous rendrez un jour compte devant Dieu. C’est là ma pensée, s’écria miss Ophélia cédant à l’élan d’indignation qui, tout le jour, s’était amassée dans son sein.
    – Allons !

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