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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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allons ! cousine ! répondit Saint-Clair en se levant vivement ; vous ne nous connaissez pas encore ! » Il s’assit au piano et attaqua un air de bravoure. Saint-Clair avait le génie de la musique, son exécution était brillante et ferme, ses doigts volaient sur les touches avec le mouvement rapide et léger d’un oiseau. Il joua air après air, en homme qui essaye de se remettre de belle humeur ; à la fin, repoussant les cahiers de musique, il se leva et dit gaiement : « Eh bien, cousine, vous nous avez donné une leçon un peu verte, mais vous avez fait votre devoir, et en somme, je ne vous en estime que plus. Je ne mets pas en doute que vous ne m’ayez jeté un pur diamant, mais il m’a si rudement atteint en plein visage, qu’au premier choc je ne l’ai pas apprécié tout ce qu’il vaut.
    – Pour moi, je ne vois pas le but de cette mercuriale, reprit Marie. S’il est au monde quelqu’un qui traite mieux que nous ses esclaves, je serais enchantée qu’on me le montrât. Cela ne les rend pas meilleurs d’un atome ; au contraire, ils deviennent de plus en plus mauvais. Quant à les sermonner ou à les reprendre, je l’ai fait à m’égosiller, leur disant leurs devoirs et le reste. Ils peuvent aller à l’église autant qu’ils le veulent, quoiqu’ils ne comprennent pas plus le prêche que ne le comprendraient des porcs. En sorte que, vous le voyez, cela ne leur est pas de grande utilité ; mais ils y vont ; ainsi les moyens de s’instruire leur sont donnés. Mais, comme je vous l’ai déjà dit, c’est une race inférieure ; toujours elle le sera. Il n’y a pas de rachat pour elle. Vous n’en pourrez rien faire, si vous l’essayez. Vous ne l’avez pas encore tenté, cousine Ophélia ; moi, je l’ai tenté ; je suis née et j’ai été élevée au milieu d’eux, je les connais. »
    Miss Ophélia pensait en avoir assez dit, et elle garda le silence. Saint-Clair se mit à siffler.
    « Saint-Clair, je vous prierai de ne pas siffler ; cela augmente mon mal de tête.
    – Je me tais, dit Saint-Clair. Est-il encore quelque autre chose que vous désiriez que je ne fasse pas ?
    – Je désirerais que vous eussiez quelque sympathie pour mes souffrances : vous n’avez aucun égard pour moi.
    – Cher ange accusateur !
    – C’est insoutenable de s’entendre parler sur ce ton !
    – Comment dois-je vous parler ? dites, et je parlerai au commandement – de la manière que vous indiquerez, rien que pour vous plaire. »
    Un frais éclat de rire, parti de la cour, pénétra à travers les courtines de soie de la véranda. Saint-Clair s’avança, souleva le rideau, et rit aussi.
    « Qu’y a-t-il ? » demanda miss Ophélia s’approchant du balcon.
    Tom était assis dans la cour sur un petit banc de mousse ; chaque boutonnière de sa veste était ornée de branches de jasmin, Éva lui passait en riant une guirlande de roses autour du cou, puis, riant toujours, elle se percha sur ses genoux, comme un moineau apprivoisé.
    « Ô Tom, vous êtes si drôle ! »
    Tom avait un bon et discret sourire, et semblait, en sa paisible façon, être aussi réjoui de sa drôlerie que l’était sa petite maîtresse. En apercevant son maître, il leva les yeux vers lui, d’un air demi confus, demi suppliant.
    « Comment pouvez-vous la laisser aussi familièrement avec eux  ? demanda miss Ophélia.
    – Et pourquoi pas ? demanda à son tour Saint-Clair.
    – Je ne sais ; mais cela me répugne.
    – Vous ne trouveriez pas mal que l’enfant caressât un gros chien, fut-il noir ; mais une créature raisonnable, sensible, immortelle, vous répugne ! Je connais là-dessus les sentiments de vos habitants du Nord : non qu’il y ait de notre part la plus petite parcelle de vertu à ne pas les éprouver ; mais l’habitude fait chez nous ce que devrait faire la charité chrétienne : elle détruit la répugnance. J’ai eu l’occasion, pendant mes voyages, d’observer combien cette répugnance était plus vive chez vous que chez nous. Ils vous dégoûtent comme autant de serpents ou de crapauds, et cependant leur misère vous révolte. Vous ne voulez pas les maltraiter, mais vous ne voulez avoir avec eux aucun contact. Vous les expédieriez en Afrique, loin de votre vue et de votre odorat, puis, vous leur enverriez un ou deux missionnaires, qui auraient l’abnégation de les instruire de la façon la plus brève possible, n’est-ce pas ?
    – Hélas ! cousin,

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