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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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poursuivit :
    « J’apportais, en épousant Saint-Clair, ma dot et mes esclaves, et la loi m’autorisait à les conduire à ma guise. Saint-Clair, lui aussi, avait sa fortune et ses gens, et j’eusse été charmée qu’il les menât à sa façon, s’il n’était intervenu dans mes affaires. Il a quelques idées saugrenues, extravagantes, sur certains chapitres, entre autres sur le traitement des esclaves. Il les fait presque passer avant moi, et même avant lui ; il leur laisse faire toutes sortes de dégâts sans jamais lever le doigt. Parfois, pourtant, Saint-Clair est effrayant. – Il m’effraie, dans certains cas, moi-même, doux comme il le paraît d’ordinaire ! Il a mis les choses sur un pied tel, que, quoiqu’il arrive, il ne doit pas dans sa maison y avoir un seul coup donné, excepté par lui ou par moi ; et sa volonté sur ce point est si absolue que je n’ose la contrecarrer. Vous pouvez deviner où cela mène ! Saint-Clair ne les battrait pas, quand ils le fouleraient aux pieds ! et moi… jugez si on peut, sans cruauté, m’infliger une pareille fatigue ! Vous le savez, les esclaves ne sont que de grands enfants.
    – Je n’en sais rien, et remercie Dieu de l’ignorer, répondit brièvement miss Ophélia.
    – Vous l’apprendrez, et à vos dépens, si vous restez ici. Vous ne vous doutez pas de ce qu’est ce troupeau de méchantes, paresseuses, ingrates créatures ! » Ce sujet, quand elle l’abordait, semblait toujours merveilleusement surexciter Marie ; ses yeux s’étaient ouverts, sa langueur s’était envolée, lorsqu’elle reprit, avec plus de véhémence :
    « Vous n’imaginez pas, vous ne pouvez imaginer les épreuves qu’ils suscitent tous les jours, à toutes heures, en tout et pour tout, à leur maîtresse. Je ne m’en plains pas à Saint-Clair ; il a là-dessus les principes les plus étranges. Ne prétend-il pas que, les ayant faits ce qu’ils sont, nous devons les supporter ! Que leurs défauts viennent des nôtres, et qu’il serait cruel de les leur donner, et de les en châtier. Il dit qu’à leur place nous en ferions tout autant, comme s’ils pouvaient nous être comparés !
    – Croyez-vous que Dieu les ait tirés du même limon ? demanda laconiquement miss Ophélia.
    – Non, vraiment, non, je ne le crois pas ! Belle fable, en vérité ! c’est une race inférieure !
    – Leur accordez-vous des âmes immortelles ? s’écria miss Ophélia, dont l’indignation grandissait.
    – Oui, répondit-elle en baillant, c’est avéré ; personne ne le conteste. Mais les égaler à nous, en quoi que ce soit, les comparer à nous, c’est impossible ! Eh bien ! Saint-Clair m’a parlé de la séparation de Mamie d’avec son mari, comme il m’eut parlé de ma séparation d’avec mon mari, à moi ! Il n’y a aucun parallèle à établir. Mamie ne peut sentir ce que j’aurais senti. Ce sont choses si différentes, n’est-il pas vrai ? Et cependant Saint-Clair assure ne pas le comprendre. Comme si, par exemple, Mamie pouvait aimer ses sales petits diablotins noirs comme j’aime Éva ! Croiriez-vous que Saint-Clair essaya une fois, sérieusement, de me persuader qu’il était de mon devoir, malgré ma faible santé et ce que je souffre, de renvoyer Mamie à ses enfants et à son mari, et de prendre quelque autre à sa place ? C’était par trop rude à supporter, même pour moi ! Je ne laisse pas souvent voir ce que j’éprouve ; je me suis fait une loi de tout souffrir en silence ; c’est le dur partage de la femme, et je l’accepte. Mais cette fois j’éclatai ; et depuis il n’y a jamais fait la plus petite allusion. Je n’en vois pas moins, par ses regards et quelques mots de temps en temps, qu’il pense toujours de même ; et c’est impatientant, c’est agaçant ! »
    Miss Ophélia parut craindre de rompre le silence ; mais, dans le mouvement rapide et saccadé de ses aiguilles, il y avait des volumes, si Marie eût été capable de les comprendre.
    « Vous êtes maintenant, poursuivit-elle, au courant de ce que vous avez à diriger. Une maison sans règle, où les serviteurs ont et font ce qui leur plaît, à l’exception de ce que, malgré ma pauvre santé, j’ai pu sauvegarder d’autorité. Je prends mon nerf de bœuf, et leur en applique parfois quelques coups ; mais c’est un exercice beaucoup trop fatigant pour moi. Si Saint-Clair voulait seulement faire comme les autres !
    – Et que

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