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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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cause de tant de chagrin.
    Une ou deux semaines s’écoulèrent, et il se manifesta dans tous les symptômes une grande amélioration, – un de ces leurres de l’inexorable mal qui entretient l’espoir jusque sur les bords de la fosse. Le pas léger glissa de nouveau dans les jardins, sur les balcons ; – Éva joua, Éva rit encore. – Son père déclara, dans les transports de sa joie, qu’il la verrait bientôt aussi robuste que jamais. Miss Ophélia et le docteur seuls ne tirèrent aucun encouragement de cette trêve illusoire. Un autre cœur aussi partageait leur conviction, et c’était le petit cœur d’Éva. Qu’est-ce donc qui parle quelquefois au fond de l’âme d’une façon si calme, si lucide, pour lui apprendre que son temps sur terre sera court ? Est-ce l’instinct secret de la nature défaillante ? Sont-ce les palpitations, les battements d’ailes de l’âme qui entrevoit l’immortalité ? Quelle que soit la cause, au fond du cœur d’Éva reposait la paisible, douce et prophétique assurance que le ciel était proche : persuasion sereine comme les rayons adoucis du soleil couchant, suave comme les placides beautés de l’automne, et dans laquelle se reposait ce pur esprit, troublé seulement par la douleur de ceux qui l’aimaient.
    Quant à elle, quoique entourés dès le berceau de si vives tendresses, quoique voyant se déployer devant elle les perspectives dorées et séduisantes de l’opulence et de l’amour, elle ne regrettait rien, et ne pleurait pas sur elle-même.
    À travers les récits du livre qu’elle et son humble ami lisaient si souvent ensemble, elle avait entrevu, et avait accueilli en son jeune sein, l’image de celui qui aimait les petits enfants : à mesure qu’elle la contemplait en ses pensées ingénues, l’image, cessant peu à peu de n’être qu’un souvenir, un divin et lointain reflet, arriva presque à la rayonnante réalité. Son âme émue se fondit en une tendresse surhumaine, et c’était vers Lui, disait-elle, c’était vers son royaume, qu’elle se sentait glisser.
    Puis elle se reprenait, avec une touchante sollicitude, à s’attendrir sur ceux qu’elle laissait en arrière, – son père surtout. Éva, d’instinct, et sans qu’elle s’en fut rendue compte, savait qu’au fond de ce cœur-là elle pénétrait plus avant que dans tous les autres. Elle aimait aussi sa mère, – n’était-elle pas tout amour ? – Le féroce égoïsme, sur lequel il était si difficile de fermer totalement les yeux, l’inquiétait un peu dans sa naïve croyance en l’infaillibilité maternelle ; mais, ce qu’elle définissait mal, et n’aurait pu justifier, elle le palliait en se disant qu’après tout c’était maman, et qu’elle l’aimait bien fort.
    Elle s’affligeait aussi pour les affectionnés et fidèles serviteurs, dont elle était la lumière et le soleil. Les enfants ne généralisent guère ; mais ce que Évangeline avait entrevu des horreurs du régime sous lequel les esclaves gémissent, était entré dans les profondeurs de cette âme recueillie, méditative, et d’une maturité précoce. Elle avait de vagues aspirations, d’ardents et douloureux désirs de faire quelque chose pour eux ; – de sauver, de rendre heureux, non-seulement ceux qu’elle connaissait, mais tous ! – élans passionnés, fervents, trop peu d’accord avec sa frêle enveloppe.
    « Oncle Tom, dit-elle un jour, interrompant sa lecture à son humble ami, je puis mieux comprendre à présent que Jésus ait voulu mourir pour nous.
    – Pourquoi, miss Éva ?
    – Parce que je sens un peu de même.
    – Comment ? miss Éva ? – Comprends pas bien.
    – Je ne sais pas l’expliquer ; mais, quand je voyais ces pauvres gens sur le bateau, – vous savez, lorsque vous descendiez la rivière avec nous, – il y en avait qui regrettaient leurs mères, – d’autres leurs maris ; – d’autres pleuraient leurs petits enfants ; et aussi la pauvre Prue, quand j’ai entendu son histoire ! – Oh ! n’était-ce pas terrible ! – et, tant d’autres fois encore, j’ai senti que je serais contente de mourir, si en mourant j’empêchais tout ce mal. – Je voudrais mourir pour eux, oncle Tom, si je pouvais ! » dit l’enfant avec ferveur, et elle posa sur les robustes doigts de Tom sa petite main diaphane.
    Tom regarda l’enfant avec respect ; et lorsque, appelée par son père, elle s’éloignait doucement, il essuya ses yeux à

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