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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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s’endormit.
    Oh ! comment l’âme mauvaise ose-t-elle aborder le monde fantastique du sommeil, empire dont les contours indécis touchent de si près aux mystères de l’autre vie ? Legris eut un rêve. Dans son lourd et fiévreux sommeil, il vit, debout à ses côtés, une forme vague qui posa sur lui une main froide et douce. Il lui sembla la reconnaître, et il frissonna d’horreur, quoique la figure fût voilée ; puis, il sentit la mèche de cheveux s’enrouler à ses doigts, se glisser doucement autour de son cou, et l’étreindre, – l’étreindre, jusqu’à ce qu’il en perdit le souffle. Il crut entendre des voix lui murmurer tout bas des mots pleins d’épouvante. Tout à coup, il se trouva sur le bord d’un abîme sans fond, criant et luttant, en proie à de mortelles terreurs, tandis que des mains noires, sorties du précipice, le saisissaient et l’attiraient à elles ; Cassy survint derrière lui et le poussa en riant. Alors la solennelle figure voilée s’avança et se découvrit. C’était sa mère. Elle se détourna de lui, et il roula au plus profond du gouffre, au bruit de cris, de huées, d’éclats de rire diaboliques, – et… Legris s’éveilla.
    La lueur calme et rosée de l’aube se glissait dans la chambre. L’étoile du matin, comme un œil divin, avec sa chaste et solennelle clarté, regardait, du haut du ciel de plus en plus radieux, l’homme de péché. Quelles fraîches et saintes splendeurs accompagnent le lever du jour ! Ne semblent-elles pas dire à l’insensé : « Regarde ! voici une chance de plus ! efforce -toi de conquérir la gloire immortelle ! » Il n’y a ni langue, ni pays où cette voix ne s’entende ; mais l’homme endurci dans le mal ne la comprend pas. Legris s’éveilla, une imprécation à la bouche. Que lui importaient l’or et la pourpre du miracle quotidien de l’aube ? Que lui importait la sainteté de cette étoile que le Fils de Dieu a bénie en la prenant pour emblème ? Abruti comme il l’était, il voyait sans percevoir. Il se leva en chancelant, se versa un verre d’eau-de-vie, et en avala moitié.
    « J’ai passé une nuit infernale, dit-il à Cassy qui entrait.
    – Vous en aurez beaucoup de pareilles avant peu, dit-elle sèchement.
    – Qu’entends-tu par là, coquine ?
    – Vous le saurez un de ces jours, répondit Cassy du même ton. Maintenant, Simon, j’ai un mot d’avis à vous donner.
    – Ah diable ! un avis à moi ?
    – Oui, reprit Cassy avec fermeté, en remettant un peu d’ordre dans la chambre ; je vous conseille de laisser Tom en repos.
    – Qu’as-tu à y voir ? ce ne sont pas tes affaires.
    – Non, à coup sûr, et je ne sais pourquoi je m’en mêlerais. S’il vous prend fantaisie de payer douze cents dollars un esclave et de l’éreinter au moment le plus pressé de l’année, rien que pour satisfaire votre dépit, ce ne sont, certes, pas mes affaires ! J’ai fait pour lui ce que je pouvais.
    – Ce que tu pouvais ? Qu’as-tu besoin de te mêler de ce qui me regarde ?
    – Aucun, assurément. Je vous ai économisé quelques milliers de dollars, à différentes reprises, en prenant soin de vos manœuvres, c’est le remerciement que j’en reçois. Si vous avez au marché plus petite récolte que les autres, ne perdrez-vous pas votre gageure ? Tompkins ne chantera-t-il pas victoire ? et vous payerez à beaux deniers comptants, n’est-ce pas ? il me semble déjà vous y voir ! »
    Legris, comme beaucoup d’autres planteurs, n’avait qu’une ambition : – faire la plus belle récolte de la contrée. Et il avait engagé, à ce sujet, plusieurs paris à la ville voisine. Cassy avait donc, avec le tact féminin, touché la seule corde qui pût vibrer en lui.
    « Eh bien ! je l’en tiendrai quitte pour ce qu’il a reçu, dit Legris ; mais il me demandera pardon et promettra de s’amender.
    – Il ne le fera pas, répondit Cassy.
    – Il ne le fera pas ! hein ?
    – Non, il n’en fera rien, répéta Cassy.
    – Je voudrais bien savoir pourquoi , maîtresse ? dit Legris avec un suprême dédain.
    – Parce qu’il a bien agi, qu’il le sait, et qu’il ne dira pas qu’il a eu tort.
    – Qui diable s’inquiète de ce qu’il sait ? Le maudit nègre dira ce qu’il me plaît de lui faire dire, ou bien…
    – Ou bien, vous perdrez vos paris sur la récolte, en l’éloignant du champ au moment de la presse.
    – Mais il cédera, il cédera !

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