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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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filtrait par un judas brisé au-dessus de la porte : l’air était malsain et glacial comme celui d’une cave.
    Legris s’arrêta au pied de l’escalier, et entendit une voix qui chantait. Elle résonnait d’une façon étrange et surnaturelle dans la déserte et sombre demeure. Peut-être aussi ses nerfs surexcités lui prêtaient-ils un accent lugubre. Écoutez !
    Une voix, inculte et mélancolique, chante un hymne familier aux esclaves :

    « On versera des pleurs, des pleurs, des pleurs, des pleurs,

    Au tribunal du Christ, on versera des pleurs ! »
    « Maudit soit la fille ! s’écria Legris. Je l’étranglerai. – Em ! Em ! » appela-t-il d’un ton dur ; mais l’écho moqueur des vieilles murailles lui répondit seul. La douce voix continua :

    « Vous serez séparés pour la vie éternelle,

    Mères, enfants, frères et sœurs,

    Vous serez séparés pour la vie éternelle ! »
    Et le lugubre refrain résonna, haut et clair, à travers les salles vides :

    « On versera des pleurs, des pleurs, des pleurs, des pleurs,

    Au tribunal du Christ, on versera des pleurs ! »
    Legris s’arrêta. Il eût rougi d’avouer que de larges gouttes de sueur perlaient sur son front ; que son cœur, oppressé, alourdi, battait de peur. Il crut même voir une ombre blanche s’élever et se glisser devant lui dans les ténèbres. Il frissonna à la pensée que la figure de sa mère morte allait peut-être lui apparaître.
    « Je sais ce que je ferai, se dit-il, comme il rentrait en chancelant dans le salon et s’affaissait sur sa chaise, je laisserai le drôle en repos ! Qu’avais-je besoin de son maudit papier ? Je crois, le diable m’emporte ! que je suis ensorcelé ! Je n’ai fait que suer et trembler depuis ! Où a-t-il attrapé ces cheveux ? Ce ne peut être les mêmes ! je les ai brûlés – les autres, – j’en suis sûr ! Il serait curieux que des cheveux pussent ressusciter ! »
    Ah ! Legris ! ces boucles dorées avaient en elles un charme magique ! Chaque cheveu t’apportait une terreur, un remords ; envoyés par un pouvoir divin, ils auraient dû lier tes mains cruelles, et t’empêcher de torturer le faible sans défense.
    « Allons ! dit Legris, frappant du pied et sifflant ses chiens, éveillez-vous, vous autres, et tenez-moi compagnie ! » Mais les chiens ouvrirent un œil, le regardèrent d’un air somnolent, et se rendormirent.
    « Je vais faire venir Sambo et Quimbo : leurs chants, leurs danses infernales chasseront de ma tête ces horribles cauchemars. » Legris mit son chapeau, s’avança sur la véranda, et donna du cor pour appeler ses deux noirs piqueurs.
    Quand il était en gracieuse humeur, il faisait souvent venir ces dignes satellites ; et, après les avoir échauffés de whisky, s’amusait à les faire chanter, danser ou s’entre-battre, selon son caprice du moment.
    Cassy rentrait, après sa visite au pauvre Tom : il pouvait être une heure ou deux du matin ; elle entendit partir du salon des cris sauvages, des hurlements, des chants barbares, mêlés aux aboiements des chiens, sorte de tintamarre diabolique.
    Elle franchit les marches de la véranda, et regarda dans l’intérieur. Legris et ses deux compagnons, ivres et furieux, criaient, vociféraient, tourbillonnaient, renversaient les chaises, et se faisaient les uns aux autres de hideuses et repoussantes grimaces.
    Sa petite main délicate posée sur la persienne, elle les considérait d’un œil fixe. Tout un monde d’angoisse, de mépris, de farouche amertume passa dans ses yeux noirs.
    « Serait-ce donc péché que de débarrasser la terre d’un pareil misérable ? » se demanda-t-elle.
    Elle se détourna précipitamment, et, faisant le tour pour gagner une entrée dérobée, elle se glissa dans l’escalier, et alla frapper à la porte d’Emmeline.

CHAPITRE XXXVII

Emmeline et Cassy.

Cassy ouvrit, et aperçut Emmeline, pâle d’épouvante, blottie dans le coin le plus reculé de la chambre. À son entrée, la jeune fille eut un tressaillement nerveux ; mais elle la reconnut, s’élança au devant d’elle, lui saisit le bras, et s’écria :
    « Ô Cassy, est-ce vous ? Je suis si contente que vous veniez ! J’avais si grand’peur que ce fût… Oh ! vous ne savez pas quel effroyable bruit il y a eu là-bas toute la soirée !
    – Je dois le connaître, répondit sèchement Cassy ; je l’ai assez entendu !
    – Oh ! dites, Cassy ! ne

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